Leçons élémentaires de chimie agricole/Chapitre IX

CHAPITRE IX.

PRINCIPES FERTILISANTS ENLEVÉS PAR LES DIVERSES RÉCOLTES


Nous avons essayé dans le chapitre précédent de définir la fertilité de la terre. Que deviendra la fertilité, si on soumet un champ à une culture continue pratiquée sans le secours d’aucun engrais ? Il est certain que chaque récolte enlevée emporte une partie des principes nutritifs, azote, phosphore, potasse, chaux, soufre, qui existaient dans la terre végétale. D’ailleurs, à ces causes utiles d’appauvrissement viennent s’ajouter d’autres causes naturelles de déperdition, comme le drainage, qui, dans certaines conditions culturales très fréquentes, soustrait au sol des doses importantes d’azote nitrique et de chaux.

La richesse de la terre en matières nutritives ira donc toujours en s’abaissant et la fertilité doit visiblement subir une décroissance corrélative. Dans quelle mesure cet affaiblissement se produira-t-il, et combien y a-t-il lieu de redouter l’épuisement complet de la terre ? C’est une question qu’il convient d’élucider soigneusement.

Pour cela, il faut mettre en regard d’un côté la richesse du sol telle que nous la révèle l’analyse chimique, de l’autre les quantités de matières utiles emportées par les diverses récoltes.

Composition des récoltes. — Nous avons réuni dans un tableau d’ensemble un grand nombre de résultats analytiques qui indiquent la composition des principales récoltes : graines et pailles de céréales et légumineuses, racines et tubercules, fourrages, fruits, bois et feuilles d’arbres. Ces tables font connaître combien 1,000 kilogrammes de chaque matière contiennent d’azote, d’acide phosphorique, de potasse, de chaux. On y a joint, à titre de renseignement utile, la proportion d’eau qui figure dans chaque produit et la dose de cendres qu’il donne lorsqu’on le brûle. L’évaluation des quantités de soufre qui existent dans les plantes n’a été faite que rarement, et encore le plus souvent d’une manière incorrecte et incomplète en se bornant à la matière des cendres : aussi avons-nous laissé de côté les résultats qui s’y rapportent.

Composition moyenne des récoltes fraîches ou séchées au soleil.
d’après WOLFF et divers autres observateurs.
(Les doses sont rapportées à 1,000 kil. de chaque matière.)
EAU CENDRES AZOTE ACIDE
phospho­rique.
POTASSE CHAUX
CÉRÉALES (Graines).
Blé 143 17,7 20,8 08,2 05,5 00,6
Seigle 143 17,3 17,6 08,2 05,4 00,5
Orge 145 21,8 16,0 07,2 04,8 00,5
Avoine 140 26,4 17,9 05,5 04,2 01,0
Maïs 136 12,3 16,0 05,5 03,3 00,2
Riz non mondé 120 69,0 » 32,6 12,7 03,1
Millet id. 130 39,1 24,0 09,1 04,7 00,4
Sarrasin 141 » 17,2 06,1 04,5 01,0
Sorgho 140 16,0 » 08,1 04,2 00,2
CÉRÉALES (Pailles).
Blé 141 42,6 4,8 2,3 04,9 02,6
Seigle 154 40,7 4,0 1,9 07,6 03,1
Orge 140 43,9 4,8 1,9 09,3 03,3
Avoine 141 44,0 4,0 1,8 09,7 03,6
Maïs 140 47,2 4,8 3,8 16,6 05,0
Sarrasin 160 51,7 7,8 1,8 12,3 19,1
CÉRÉALES (Balles).
Blé 138 092,5 7,2 4,0 08,4 01,9
Orge (barbes) 140 122,4 4,8 2,4 09,4 12,7
Avoine 143 079,0 6,4 0,2 10,4 07,0
Maïs (râfles) 115 005,0 2,3 0,2 02,4 00,2
RACINES ET TUBERCULES.
Pomme de terre 750 09,4 3,2 1,8 5,6 0,2
Betteraves à sucre 816 08,0 1,6 1,1 4,0 0,5
Betteraves fourragères 883 08,0 1,8 0,8 4,3 0,4
Raves (turneps) 909 07,5 1,6 1,0 3,0 0,8
Choux-raves 877 09,5 2,5 1,4 4,9 0,9
Carottes 860 08,8 2,1 1,1 3,2 0,9
Topinambours 800 10,3 3,2 1,6 6,7 0,4
Navets 915 06,1 1,33 1,1 3,1 0,8
FEUILLES ET TIGES DES MÊMES PLANTES.
Pomme de terre 770 11,8 5,0 1,0 3,0 5,5
Betteraves à sucre 897 18,0 3,0 1,3 4,0 3,6
Betteraves fourragères 907 14,8 3,0 0,8 4,3 1,7
Raves (turneps) 898 14,0 3,0 1,3 3,2 4,5
Choux-raves 850 25,3 3,5 2,6 3,6 8,4
Carottes 808 26,1 5,1 1,2 3,7 8,6
Topinambours » » 4,3 0,7 4,1 9,1
PLANTES INDUSTRIELLES (Graines).
Lin 118 32,2 32,0 13,0 10,4 02,7
Colza 120 37,3 31,0 16,4 08,8 05,2
Chanvre 122 48,1 26,2 17,5 09,7 11,3
Pavot (œillette) 147 52,2 28,0 16,4 07,1 18,5
Moutarde 120 37,8 » 14,7 06,0 07,1
PLANTES INDUSTRIELLES (Pailles ou feuilles).
Lin (paille) 140 031,9 4,8 4,3 11,8 08,3
Lin (plante entière) 250 032,3 » 4,7 11,3 05,0
Lin (filasse) 100 006,0 0,0 0,7 00,2 03,8
Chanvre (plante) 300 028,2 » 3,3 05,2 12,1
Colza (paille) 170 038,0 3,0 2,7 09,7 10,1
Pavots (paille) 160 066,0 » 2,3 25,1 19,9
Houblon (plante) 250 074,0 » 9,0 19,4 11,8
Houblon (cônes) 120 059,8 » 9,0 22,3 10,1
Tabac 180 197,5 » 7,1 54,1 73,1
LÉGUMINEUSES COMESTIBLES (Graines et pailles).
Haricots » » 41,5 9,4 14,0 02,0
Pois 138 24,2 35,8 8,8 09,8 01,2
Fèves de jardin 148 26,1 » 7,9 11,5 02,0
Lentilles 134 17,8 41,7 5,2 07,7 00,9
Lupins 138 34,0 60,0 8,7 11,4 02,7
Pois (paille) 143 49,2 10,4 3,8 10,7 18,6
Fèves (paille) 150 51,5 » 4,1 19,1 14,1
Lentilles (paille) » » 10,1 4,8 05,2 20,0
FOURRAGES VERTS.
Trèfle rouge 800 13,4 5,9 1,3 4,6 4,6
Trèfle blanc 810 13,6 5,6 2,0 2,4 4,3
Luzerne 753 17,6 7,2 1,5 4,5 8,5
Esparcette 785 11,6 5,1 1,2 4,6 3,7
Vesces 820 15,7 4,8 2,0 6,6 4,1
Pois 815 13,7 5,1 1,8 5,6 3,9
Avoine (en fleur) 770 16,6 3,8 1,4 6,5 1,1
Seigle 700 16,3 4,3 2,4 6,3 1,2
Orge (en fleur) 680 22,5 3,6 2,2 5,9 1,4
Maïs fourrage 852 08,2 2,8 0,7 3,2 1,2
Sarrasin 828 17,6 5,1 1,1 4,3 6,6
Ray-grass 700 21,3 5,7 1,7 5,3 1,6
Herbe de pré (en fleur) 700 23,3 4,4 1,5 6,0 2,7
Choux fourrages » » 2,1 1,8 3,8 2,0
FOURRAGES SECS.
Trèfle rouge 160 56,5 20,0 5,6 19,5 19,2
Trèfle blanc 160 60,3 20,8 8,5 10,6 19,4
Luzerne 160 60,0 20,0 5,1 15,2 28,8
Esparcette 160 45,3 18,0 4,7 17,9 14,6
Vesces 160 73,4 22,7 6,2 20,0 19,3
Avoine 145 61,8 » 5,1 24,1 04,1
Foin de prairie 144 66,8 13,1 4,1 17,1 07,7
FRUITS DIVERS ET PRODUITS DES FRUITS.
Fraises 870 » 01,9 0,5 0,9 00,6
Pommes 840 02,7 02,1 0,4 1,0 00,1
Poires 800 04,1 02,2 0,6 2,2 00,3
Cerises 780 04,3 » 0,7 2,2 00,3
Prunes 820 04,0 03,7 0,6 2,4 00,2
Marrons frais 492 12,0 06,9 2,7 7,1 01,4
Glands de chêne 560 09,6 04,2 1,6 6,2 00,7
Pépins de raisins 120 24,7 » 5,9 7,1 08,4
Peaux de raisins 600 16,2 » 3,4 8,0 02,1
Marcs de raisins 650 16,1 10,0 2,5 8,6 02,5
Vin 866 02,8 00,2 0,5 1,8 00,2
Hêtre 550 30,5 » 1,3 1,6 13,7
ARBRES ET ARBUSTES (Bois séchés à l’air).
Bouleau 150 02,6 » 0,2 00,3 01,5
Chêne (tronc) 150 005,1 06,0 0,3 00,5 03,7
Id. (branches)
150 010,2 » 0,9 02,0 05,5
Hêtre (tronc) 150 005,5 » 0,3 00,9 03,1
Id. (branches)
150 012,3 » 1,5 01,7 05,9
Pin sylvestre 150 002,6 06,0 0,2 00,3 01,3
Mélèze 150 002,7 » 0,1 00,4 00,7
Sapin 150 002,1 » 0,1 00,1 01,0
Marronnier (branches) 150 028,1 » 5,9 05,5 14,3
Mûrier 150 013,7 » 0,3 00,9 07,8
Noyer 150 025,5 » 3,1 03,9 14,2
Pommier 150 011,0 » 0,5 01,3 07,8
Olivier 150 » 04,0 1,0 03,5 05,0
Vigne (rameaux) 150 023,4 » 3,0 07,0 08,7
Bruyères 200 036,1 10,0 1,8 04,8 06,8
Genêts à balais 160 018,9 » 1,6 06,9 03,2
Fougères 160 058,9 » 5,7 25,2 08,3
Prêles 140 204,4 » 4,1 27,0 25,6
Roseaux 180 038,5 » 0,8 03,3 02,3
Joncs 140 045,6 » 2,9 16,7 04,3
Varechs 180 011,8 » 3,7 17,1 16,4
ÉCORCES SÉCHÉS.
Bouleau 150 11,3 » 0,8 00,4 05,2
Pin sylvestre 150 17,1 » 1,4 00,5 07,5
Sapin 150 23,9 » 0,6 01,3 14,9
Marronnier 150 55,9 » 3,9 13,5 34,3
Noyer 150 54,4 » 3,2 06,3 38,1
Chêne 150 » 6,0 0,5 07,0 25,0
FEUILLES FRAICHES (Automne).
Chêne 600 19,6 » 1,6 0,7 09,5
Id. (sèches)
150 41,7 08,0 3,5 1,5 20,2
Chêne (sèches) 150 57,4 08,0 2,4 3,0 25,8
Pin sylvestre 550 06,3 » 1,3 0,6 02,6
Id. (sèches)
160 11,8 05,0 1,9 1,2 04,9
Sapin 550 26,2 » 2,1 0,4 04,0
Id. (sèches)
160 48,9 05,0 4,0 0,7 07,4
Marronnier 600 30,1 » 2,5 5,9 12,2
Mûrier 670 » 15,2 2,4 7,3 09,6
Noyer 600 28,4 » 1,1 7,6 15,3
Pommier 600 » 02,1 0,3 0,1 00,1
Olivier » » 05,0 2,9 7,4 14,5
Vignes 600 » 08,0 1,6 2,8 24,0

Les nombres qui figurent dans ces tables n’ont pas une composition absolue et rigoureuse ; les conditions de végétation exercent une influence assez grande sur la composition chimique des plantes.

Influence de la nature du sol sur la composition des récoltes. — D’ordinaire, un élément nutritif qui existe en abondance dans le sol se trouve aussi en quantité plus grande dans les végétaux issus de ce sol. Une terre humide, ou fréquemment irriguée, fournit des récoltes où la proportion d’eau est plus importante ; au contraire, après une saison sèche, la dose relative de matières nutritives est plus grande.

Les terrains très riches en azote, ou ayant reçu des engrais azotés, fournissent des récoltes plus azotées et douées par cela même d’un pouvoir nutritif plus parfait : ainsi, dans une prairie de Rothamsted, irriguée avec une eau d’égoût fortement ammoniacale, le foin récolté renfermait 19 % d’azote, tandis que dans une parcelle identique non irriguée la teneur d’azote ne dépassait pas 13 %.

Les fourrages qui proviennent de prés riches en acide phosphorique, en contiennent davantage et conviennent bien mieux pour l’élevage du bétail.

Le tabac produit par des sols très potassiques retient jusqu’à 5 % de potasse, alors que dans les terres pauvres en cet élément il n’en renferme que 0,25 %, c’est-à-dire une dose vingt fois plus petite.

Les nombres inscrits dans les tableaux représentent seulement les moyennes habituelles obtenues dans des sols ordinaires.

Exigences annuelles des diverses cultures en principes fertilisants. — L’examen des tables qui précèdent serait peu instructif au point de vue de la puissance nutritive de la terre. Pour bien apprécier cette dernière, il faut faire intervenir le rendement des récoltes. Mais, de ce côté, on rencontre des écarts énormes allant du simple au double et même au delà. Pour fixer les idées, nous avons adopté des rendements moyens, tels qu’ils résultent de statistiques agricoles, et nous avons indiqué pour chacun d’eux les quantités de matières nutritives enlevées au sol d’un hectare par les récoltes. Le produit, qui est le but principal de la culture, grains pour les céréales, racines, vin, etc., sert de base au calcul ; mais il est également nécessaire de tenir compte des produits secondaires, paille, feuilles, marcs, etc. La proportion de ces produits au produit principal est très variable selon les conditions de culture et de climat, et nous avons dû adopter pour elle une moyenne.

Le tableau suivant réunit ces divers résultats. Les nombres inscrits dans la quatrième colonne expriment le poids moyen de produit secondaire obtenu par unité de mesure du produit principal : par exemple, pour le blé, la dose de paille produite en même temps que 1 hectolitre de grain est évaluée à 185 kilogrammes ; pour les betteraves fourragères, à 1 kilogramme de racines correspond en général 0k5 de feuilles.

Poids de matières nutritives enlevées en un an sur un hectare par les récoltes de diverses cultures.
CULTURE. QUANTITÉS obtenues du produit principal. NATURE des produits. Poids moyen secondaire, obtenu par unité de mesure du produit principal. AZOTE. ACIDE PHOSPHO­RIQUE. POTASSE. CHAUX.
kilog. kilog. kilog. kilog.
Blé 15 hect. Grains 24,9 09,8 06,6 00,7
Paille 185 kil. 13,3 06,3 13,5 07,1
Total 38,2 16,1 20,1 07,8




Seigle 14 hect. Grains 17,8 08,4 05,5 00,5
Paille 180 kil. 10,1 06,3 20,2 09,1
Total 27,9 14,7 25,7 09,6




Orge 18 hect. Grains 17,7 08,4 05,6 00,6
Paille 112 kil. 09,5 03,8 18,7 06,6
Total 27,2 12,2 24,3 07,2




Avoine 20 hect. Grains 18,4 05,3 04,0 01,0
Paille 84 kil. 06,7 04,8 16,4 06,1
Total 25,1 10,1 20,4 07,1




Sarrasin 15 hect. Grains 15,5 05,5 04,0 00,9
Paille 80 kil. 09,4 02,2 14,8 22,9
Total 24,9 07,7 18,8 23,8




Maïs 14 hect. Grains 15,7 05,4 03,2 00,3
Paille 80 kil. 05,4 04,3 18,6 05,6
Râfles 24 kil. 00,8 00,1 00,8 00,1
Épis mâles frais[1] 160 kil. 06,7 01,6 07,2 02,7
Total 28,6 11,4 29,8 08,7




Haricots 16 hect. Grains 54,9 11,7 17,3 02,5
Paille 75 kil. 12,5 04,6 12,8 22,3
Total 64,4 16,3 30,3 24,8




Pois 18 hect. Grains 53,7 13,2 14,7 01,8
Paille 195 kil. 36,4 13,3 37,5 65,1
Total 90,1 26,5 52,2 66,9




Lentilles 15 hect. Grains 45,7 06,2 09,2 01,2
Paille 113 kil. 17,2 08,2 08,8 34,0
Total 62,9 14,4 18,0 35,2




Colza (d’hiver) 30 hect. Grains 63,2 33,4 17,9 10,6
Paille 107 kil. 16,0 08,6 31,0 32,3
Siliques 53 kil. 13,6 05,8 09,1 54,1
Total 92,8 47,8 58,0 97,0




Pavot (œillette) 20 hect. Grains 33,6 19,7 08,5 22,2
Paille 150 k. 12,0 06,9 60,0 45,0
Total 45,6 06,9 68,5 67,2




Chanvre 12,500 k. Total » 43,7 63,0 132,0
Filasse seule 150 k. 00,0 00,0 00,0 00,0




Lin 520 kil. Graines 16,7 15,0 34,8 28,9
Tiges 7 k. 16,6 06,98 05,4 01,4
Total 33,3 21,8 40,2 30,3




Tabac 1,500 k. Feuilles 75,0 06,7 27,2 112,8




Pommes de terre 18,000 k. Tubercules 57,6 32,4 100,8 03,6
Fanes 0 k. 23 21,0 04,2 012,6 21,0
Total 78,6 36,6 113,4 24,6




Topinambours 25,000 k. Tubercules 094,5 32,8 203,5 05,7
Fanes sèches 0 k. 18 019,1 03,0 018,4 40,8
Total 113,6 35,8 221,9 46,5




Betteraves fourragères 40,000 k. Racines 072 32 172 16
Feuilles 0 k. 5. 060 16 086 34
Total 132 48 258 50




Betteraves sucrières 30,000 k. Racines 48 33 120 15
Feuilles 0 k. 4 36 12 048 43
Total 84 45 168 58




Seigle en vert 20,000 k. Herbe verte 86,0 48,0 126,00 24,0
Maïs fourrage 60,000 k. Id. 170,00 42,0 192,00 72,0
Foin de prairie 06,000 k. Foin sec 78,6 21,0 96,0 46,0
Trèfle rouge 08,000 k. Id. 160,00 44,8 156,00 154,00
Luzerne 10,000 k. Id. 200,00 51,0 152,00 288,00
Sainfoin 04,500 k. Id. 81,0 21,2 80,6 66,0
Vesces 04,000 k. Id. 90,8 24,8 80,0 77,2




Vigne 20 hect. Vin 00,4 00,6 02,0 00,4
Marcs 15 k. 03,0 00,9 01,5 01,5
Feuilles 300 k. 48,0 09,6 16,8 144,00
Sarments 300 k. 12,0 02,4 18,0 31,0
Total 63,4 13,5 38,3 177,00




Idem 120 hect.
M. Marès
Vin 02,4 04,9 12,0 »
Marcs 14 k. 15,4 02,7 07,8 »
Sarments 26 k. 03,4 02,9 05,0 »
Total 21,2 10,5 24,8 »




Oliviers (150 à l’hect.) 02,700 k. d’olives Huile 00,0 0,0 00,0 »
Marcs 07,4 03,45 09,7 »
Branches 0 k. 5 03,0 00,75 02,7 »
Feuilles 0 k. 27 06,7 3,9 10,1 »
Total 17,1 8,1 22,5 »




Pins de 100 ans 3,230 k. Bois sec 20,0 1,1 2,6 10,0
3,190 k. Feuilles 09,0 3,7 4,9 19,0
Total 29,0 4,8 7,5 29,0




Hêtres de 20 ans 3,160 k. Bois 24,0 02,9 04,7 14,4
3,330 k. Feuilles 26,0 10,4 09,8 81,9
Total 50,0 13,3 14,5 96,3

Ce tableau nous révèle de très grandes inégalités entre les besoins nutritifs des diverses récoltes : ces inégalités résultent à la fois de la quantité absolue des matières produites et des différences de composition de ces matières.

Les poids des récoltes obtenues sur 1 hectare varient énormément selon leur nature. La culture du blé, qui fournit moyennement en France 15 hectolitres pesant environ 1,200 kilogrammes, produit à peu près 2,700 kilogrammes de paille, ce qui conduit, pour le poids total de matière récoltée, à 3,900 kilogrammes. Notons en passant que certains sols, cultivés convenablement, peuvent arriver à porter plus du double, soit une masse totale de 10,000 kilogrammes (paille et grain).

Le foin de prairie donne un rendement un peu plus élevé, que nous avons évalué dans le tableau à 6,000 kilogrammes.

À côté de ces quantités relativement petites, nous voyons les betteraves fourragères donner, pour l’ensemble (racines et feuilles), des récoltes de 60,000 kilogrammes et plus. Le maïs fourrage fournit fréquemment ce même poids d’herbe verte, et, dans certains cas, atteint le double, c’est-à-dire le poids énorme de 120,000 kilogrammes.

Les variations présentées par une même culture sont parfois excessives : ainsi, la production de la vigne varie de quelques hectolitres à 200 et même 300 hectolitres par hectare. Il faudra nécessairement tenir compte de ces écarts quand on voudra, dans un cas particulier, apprécier ses exigences nutritives.

Inégalité de répartition des principes nutritifs dans les diverses récoltes. — Nous trouvons aussi des différences notables dans la répartition des divers principes nutritifs, certaines récoltes étant plus spécialement riches en azote, d’autres en acide phosphorique, en potasse ou en chaux. Lorsque, dans le tableau précédent, on compare les poids des éléments fertilisants contenus dans les récoltes totales, on s’aperçoit que le plus souvent c’est l’acide phosphorique qui y figure sous la masse la plus petite. Si pour chaque culture on prend pour unité cette dose d’acide phosphorique, on trouvera donc que les autres principes, azote, potasse, chaux, s’y trouvent dans une proportion généralement supérieure à l’unité. Ce sont ces proportions qui sont indiquées dans le tableau suivant :

Rapport des éléments fertilisants qui entrent dans une récolte moyenne de diverses cultures.
(La dose d’acide phosphorique qui s’y trouve est prise pour unité).
CULTURE. ENSEMBLE DES PRODUITS constituant la récolte. AZOTE. POTASSE. CHAUX.
Blé Grains et paille. 2,4 1,2 0,5
Seigle Id. 1,9 1,7 0,6
Orge Id. 2,2 2,0 0,6
Avoine Id. 2,5 2,0 0,7
Sarrasin Id. 3,2 2,4 3,1
Maïs Grains, paille, rafles, crêtes. 2,5 2,7 0,7
Haricots Grains et paille. 4,0 1,9 1,5
Pois Id. 3,4 2,0 2,5
Lentilles Id. 4,3 1,2 3,4
Colza Graines, paille, siliques. 1,9 1,2 2,4
Œillette Graines et paille. 1,7 2,6 2,5
Chanvre Id. » 1,5 3,4
Lin Id. 1,5 1,8 1,4
Pommes de terre Tubercules et fanes. 3,1 6,1 1,3
Betteraves fourragères Racines et feuilles. 2,7 5,3 1,0
Betteraves à sucre Id. 1,9 3,7 1,3
Seigle en vert 1,7 2,6 0,5
Maïs fourrage 4,0 4,5 1,6
Foin de pré 3,8 4,6 2,2
Trèfle rouge 3,5 3,4 3,4
Luzerne 4,0 3,0 5,6
Sainfoin 3,8 3,8 3,0
Vesces 3,6 3,2 3,1
Vigne Vin, marc, feuilles, sarments. 4,7 3,0 13,00
Pins Bois et feuilles. 6,0 1,5 6,0
Hêtres Id. 3,9 1,1 7,2

Les récoltes qui, proportionnellement, exigent le moins de potasse, de chaux, d’azote, et par conséquent demandent le plus d’acide phosphorique, sont le lin, le colza, et aussi les céréales, blé, orge, seigle, avoine.

Certaines accusent des exigences considérables en potasse : ce sont les pommes de terre, les betteraves, les cultures fourragères proprement dites, la vigne.

La chaux est fixée plus spécialement par les cultures arbustives, y compris la vigne, par les légumineuses en général, par le chanvre et le sarrasin.

Quant à l’azote, il est toujours assez abondant ; mais il l’est principalement dans les plantes qui paraissent favoriser sa fixation directe par les microbes spéciaux de la terre végétale, c’est-à-dire les légumineuses.

Ces indications spéciales sont très importantes, et il ne faudra jamais les perdre de vue dans la pratique particulière des diverses cultures.

D’après ce qui précède, les cultures exigent des quantités fort variables de principes nutritifs : certaines demandent peu, par exemple la culture forestière. Une forêt de pins de cent ans ne demande au sol chaque année que :

29 kilogrammes d’azote,
4,8 d’acide phosphorique,
7,5 de potasse,
29 de chaux,

et encore le plus souvent une part importante de ces matières, accumulées dans les aiguilles de pin et dans les menues branches, retourne au sol dont elle enrichit la surface.

Ces doses sont fort petites, si nous les comparons aux prélèvements de la luzerne, dont les diverses coupes emportent par hectare (pour une production de 10,000 kilogrammes de foin) :

200 kilogrammes d’azote,
57 d’acide phosphorique,
150 de potasse,
290 de chaux.

Ces nombres sont fréquemment dépassés, le rendement des luzernes pouvant, dans certaines conditions, s’élever au-dessus de 15,000 kilogrammes. Les exigences nutritives de la luzerne sont décuples de celles de la forêt de pins, et ici l’exportation est totale.

Les betteraves, principalement les betteraves fourragères, réclament beaucoup à la terre. La vigne, au contraire, est assez peu exigeante ; pour fournir 120 hectolitres de vin, elle n’a demandé que :

21 kilogrammes d’azote,
11 d’acide phosphorique,
25 de potasse.

Les feuilles, il est vrai, ne sont pas comprises dans cette évaluation, mais le plus souvent elles ne sont pas exportées, et la majeure partie de leur substance revient à la terre.

Les céréales ont des exigences moyennes ; une récolte de 15 hectolitres de froment avec sa paille enlève seulement :

25 kilogrammes d’azote,
16 d’acide phosphorique,
20 de potasse,
8 de chaux.

Les récoltes abondantes peuvent prélever une dose double de matières nutritives, ce qui demeure encore bien au-dessous des quantités fixées par la luzerne.



  1. Enlevés par l’écimage et habituellement consommés à l’état frais par les animaux.