Lausanne à travers les âges/Statistique/02

Collectif
Librairie Rouge (p. 93-97).


II

Recettes et dépenses de l’administration communale. Fondations diverses.

Comme on l’a vu par le tableau donné plus haut, le ménage communal, quoique tenu avec une rigoureuse économie, coûte plus cher d’année en année ; l’équilibre ne se maintient qu’avec de constantes aggravations d’impôts. Chaque année, la commission de gestion suggère à la municipalité un certain nombre d’améliorations des services publics, presque toujours coûteuses ; chaque année également, la commission du budget s’efforce, mais en vain, de restreindre les dépenses : la municipalité se trouve ainsi placée entre l’enclume et le marteau.

Le résumé des dépenses et des recettes de l’année 1904 donnera un aperçu des ressources de la ville de Lausanne et des principales dépenses auxquelles est appelée à faire face l’administration communale :


Exercice de 1904.


Pour la Bourse communale les comptes de 1904 accusent :
aux recettes 
Fr. 4 111 098 93
et aux dépenses 
» 3 997 594 49
laissant un excédent des recettes de 
Fr. 113 504 44
Les principaux éléments des recettes sont les suivants :
Impôt communal :
Droit de mutation 
Fr. 457 174 40 Fr. 1 991 387 45
Impôt foncier 
» 454 077 46
Impôt mobilier 
» 600 936 83
Impôt sur les loyers 
» 140 674 20
Impôt sur les personnes et les sociétés 
» 252 811 20
Impôts divers (luxe, patentes, etc.) 
» 85 713 36
Produits des domaines, bâtiments, vignes et forêts 
Fr.
609 171 56
Intérêts actifs 
» 801 073 40
Services publics et recettes diverses 
» 709 466 52
Fr. 4 111 098 93
Les principales rubriques des dépenses sont :
Intérêt de la dette 
Fr. 1 464 887 11 Fr. 1 663 887 11
Amortissement de la dette 
» 199 000 —
Impôts payés à l’État 
» 46 772 57
Instruction publique 
» 735 988 77
Corps de police 
Fr. 173 426 60 Fr. 335 998 39
Police de santé des hommes 
» 17 549 35
Service des inhumations 
» 26 976 90
Service du feu 
» 14 869 40
Éclairage public 
» 103 176 14
Balayage des rues 
» 117 259 35 Fr. 633 822 97
Ébouage et arrosage 
» 51 879 90
Entretien des voies publiques 
» 267 640 87
Entretien des promenades publiques (fleurs, etc.) 
» 45 601 80
Établissements nouveaux (avenue Recordon, avenues de Rosemont, construction de chemins au nord de Chailly, etc., etc.) 
» 151 441 05
Contribution en faveur du théâtre, y compris le gaz et les pompiers 
» 25 525 80 Fr.
38 425 80
Subvention à l’Orchestre symphonique 
» 10 000 —
Subventions aux Sociétés de musique instrumentale 
» 2 900 —
Entretien des bâtiments, cultures des domaines, des forêts, frais d’administration, Bureaux de police, Contrôle des étrangers, frais de perception des impôts, etc.. 
Fr. 542 698 88
Fr. 3 997 594 49

En sus du budget courant, ensuite de décisions prises par le Conseil communal et dont la plupart remontent aux années précédentes, il a été prélevé, en 1904, sur le compte de l’emprunt, au fur et à mesure de l’avancement des travaux, une somme de 2 062 379 fr. 81, se décomposant comme suit :

Pont Chauderon-Montbenon 
Fr. 1 033 694 85
Dotation aux Services industriels 
» 395 939 12
Construction des nouvelles Prisons de district 
» 104 800 95
Subside pour la Policlinique universitaire 
» 200 000 —
Construction de Maisons ouvrières 
» 84 942 75
Divers (construction d’avenues et de chemins, bâtiments d’écoles enfantines) 
» 243 002 14
Fr. 2 062 379 81

Ces travaux, qui contribueront au développement de la ville de Lausanne et dont profiteront les générations successives, sont portés ainsi sur une série d’années et amortis avec les emprunts eux-mêmes. On a vu, plus haut, figurer, en effet, au compte des dépenses annuelles, une somme de 199 000 francs pour les amortissements.


Bilan de la commune de Lausanne au 31 décembre 1904.


ACTIF
Capitaux 
Fr. 3 426 887 —
Dotation des Services industriels 
» 17 252 346 61
Immeubles productifs (forêts, domaines, bâtiments, vignes, Place d’armes, etc.) 
» 7 865 508 —
Fonds de réserve et fonds spéciaux 
» 1 122 977 58
Fr. 29 667 719 19


PASSIF
Dettes et fondations 
» 40 152 782 64
Différence, Fr. 10 485 063 45

Cette différence se trouve compensée :

1o Par la création d’avenues, de quais, de ponts, promenades publiques et par les subventions à la Policlinique, à l’École de commerce, au Simplon, etc.

2o Par les sacrifices que la ville s’est imposés pour la construction du Tribunal fédéral, soit 1 132 000 francs.

3o Par les immeubles improductifs, Hôtel de ville, bâtiments scolaires, temples, etc., qui représentent une somme de 6 522 000 francs[1].

Le découvert de 2 831 000 francs, qui subsisterait, — si l’on tenait compte dans le bilan des immeubles improductifs et de la somme affectée à la construction du Palais fédéral de justice, — est, du reste, plus apparent que réel ; car les immeubles productifs, notamment les forêts, sont taxés fort en dessous de leur valeur réelle. Au prix d’inventaire, en effet, les 1550 hectares de forêts rapportent net du 12 %.

En dehors de la Bourse communale, la Municipalité est appelée à gérer une série de caisses et de fondations, dont les principales sont :

1o La Bourse des pauvres, qui possède une fortune de 1 925 000 fr. et qui distribue, annuellement, aux bourgeois nécessiteux, une somme d’environ 75 000 francs.

2o Les Bains et buanderie Haldimand, dont le fonds s’élève à 223 000 fr.

3o Les Fondations d’Antoine Bugnion et de Mme  Effinger de Willdegg, née de Charrière, en faveur de malades à envoyer aux bains, des anciennes domestiques et des pauvres bourgeois et habitants de Lausanne, capital 
Fr. 112 000
4o La Fondation Pradès, en faveur d’orphelines, capital 
» 62 000
5o La Fondation J.-J. Faure, en faveur d’instituteurs et d’institutrices nécessiteux, capital 
» 138 000
et de plusieurs autres de moindre importance.

En outre, la Municipalité administre la Caisse de retraite du corps de police de la ville, dont le capital s’élève à 140 000 fr., et la Caisse de retraite en faveur des employés et ouvriers de la commune, qui vient d’être créée.

6o Mentionnons encore la Dotation de Rumine, qui a été constituée par Gabriel de Rumine, décédé à Bucarest le 18 juin 1871.

Par testament homologué en date du 5 juillet 1871, Gabriel de Rumine a légué à la ville de Lausanne une somme de 1 500 000 francs aux conditions suivantes :

« Je donne et lègue à la ville de Lausanne, canton de Vaud, Suisse, la somme de 1 500 000 francs, que je prierais de placer dans de bonnes conditions pour que cette somme, étant doublée, soit employée à la construction d’un édifice qui sera jugé, quinze ans après ma mort, d’utilité publique par une commission de dix membres, choisis de moitié parmi les professeurs de l’Académie, de moitié parmi les magistrats de la ville. »

Ensuite d’entente intervenue le 3 août 1888, entre l’État de Vaud et la commune de Lausanne, il a été convenu que les fonds provenant de ce legs seraient affectés à la construction de bâtiments universitaires.

Commencés en 1898, ceux-ci sont aujourd’hui près d’être terminés ; ils seront inaugurés au printemps de 1906.

Les fonds provenant de ce legs s’élevaient, au 31 décembre 1904, à 4 280 000 francs. Ils seront entièrement consacrés à ces constructions et à l’aménagement de leurs abords. La ville de Lausanne aura encore à payer, pour solder les comptes de construction du palais de Rumine, une somme d’environ 700 000 francs.

Les Services industriels font l’objet d’une comptabilité à part : ils sont crédités de l’intérêt de la dotation que la commune leur a faite et qui s’élève aujourd’hui à 17 ¼ millions, et, d’autre part, crédités des fournitures qu’ils font aux diverses branches de l’administration. Dans leur ensemble, ces services produisent un excédant de recettes sur les dépenses, qui est versé à la caisse communale.

Le Service du gaz, qui est le plus ancien, donne des bénéfices ; celui de l’électricité est en équilibre ; en fait, il produit déjà des bénéfices, mais ceux-ci sont consacrés à amortir les déficits des premiers exercices. Cette année déjà, la perte des débuts sera complètement amortie ; le Service des eaux est en déficit. Cela avait été prévu : dans un domaine qui tient d’aussi près à l’hygiène et à la santé publique, il est admissible que la communauté s’impose quelques sacrifices ; on peut s’attendre, du reste, à ce que ceux-ci diminuent d’importance d’année en année.

  1. C’est en vertu d’un règlement cantonal que les immeubles dits improductifs ne figurent pas dans le bilan communal ; dans les comptes de la Confédération, au contraire, les bâtiments improductifs (casernes, bâtiments de poste) figurent à l’actif de la fortune fédérale.