Bibliothèque de l’Action française (p. 35-38).

JOIE D’ÉTÉ


Je veux un ciel riant et pur
Réfléchi par un lac limpide…
Théophile Gauthier




Bénissons Dieu ! Voici que nous pouvons encore
Comme un joyeux essaim qui prend son vol au loin.
Courir vers la campagne immense que décore
Le foin !

Dans la fraîcheur de l’herbe épaisse que l’on foule,
Et l’air pur qui descend sur nos fronts accablés,
Nous pourrons, ô bonheur ! voir se lever la houle
Des blés…


Et la forêt sublime, où divine famille,
Les arbres vont, croissant dans leur rêve béni.
Les vertes profondeurs où gazouille et fourmille
Le nid…

Nous allons retrouver les sentiers et les plaines,
Les ravins éveillés de leur sommeil obscur,
Les buissons où le vent vient creuser des fontaines
D’azur !…

Les aulnes rougissants où sifflotent les merles,
La savane au reflet magnifique et changeant ;
Le sol neuf où l’avoine a répandu ses perles
D’argent…


Les routes encerclant d’une ceinture brune
La taille des côteaux rieurs et lourds d’espoir.
Les champs où les maisons s’allument une à une,
Le soir…

Les prés herbus et verts, les riants pâturages
Doucement ranimés aux souffles du printemps ;
Les monts lointains, couverts d’ombres et de feuillages
Flottants…

Nous reverrons la mer, ondoyante ou paisible,
Champ d’ombre qu’un soleil mourant vient embraser,
Et que la brise va, de sa faux invisible,
Raser…


O joie ! Un ciel très pur, l’alouette qui passe,
L’aube rose jetant des fleurs d’or sur le toit,
La mer bleue, une voile blanche sur l’espace,
Et toi !…

Toi dont le clair esprit de beaux rêves s’abreuve,
Et monte comme l’aigle en face du ciel bleu,
Toi dont les yeux profonds sont semblables au fleuve.
En feu !…