Bibliothèque de l’Action française (p. 15-17).


PAYSAGE




Le jour brille. Les portes s’ouvrent. Les coqs chantent.
Dans l’aube les maisons sont des fleurs de soleil.
La campagne rayonne, et les vieux bois s’enchantent
Du bonheur que répand le magique réveil.

La fermière gaiement, à son vieux seuil se penche.
Je vois aller, joyeuse avec un air badin,
Resplendissante dans sa robe rose et blanche,
La jeune paysanne au fond de son jardin…


Sur la mer les bateaux s’en vont, deux, trois ensemble,
Immaculés et comme incorporés à l’air,
Si blancs que leur voilure imprécise nous semble
L’aile d’un grand oiseau perdu dans le ciel clair !…

Des senteurs de foin vert, des murmures étranges,
Vont à l’assaut des toits, des seuils, des escaliers.
Par les portes on croit voir sourire les granges,
Et les greniers ont des échos particuliers…

Les habitants heureux interrogent la plaine,
Parlent de leurs travaux, se jettent le bonsoir,
Cependant que la nuit couvre de son haleine
Le chemin où les bœufs s’en reviennent le soir…


Et le sol généreux, lourd d’espoirs, semble attendre
Le blé que va mûrir le soleil indulgent.
Tandis que la charrue, inerte en l’herbe tendre,
Tend aux rayons du jour ses oreilles d’argent…