Bibliothèque de l’Action française (p. 9-13).


POÈMES RUSTIQUES


« Un rond d’azur suffit pour voir passer les astres ».
Edmond Rostand


BONHEUR PRINTANIER




La feuille s’ouvre ainsi qu’une dentelle verte ;
Des senteurs de bourgeons flottent dans l’air léger,
Et la brise, soufflant dans ma fenêtre ouverte,
Apporte jusqu’à moi des parfums de verger.

Les enfants réjouis, oubliant l’hiver sombre,
Pieds nus, en robe claire et les cheveux au vent,
Dansent sur l’herbe, et leur groupe forme de l’ombre
Qui sursaute et s’allonge aux bords du bois mouvant…


Le buisson recouvert de feuillages ondoie
Et s’orne vers le soir de reflets empourprés ;
Il monte de partout des murmures de joie ;
On dirait qu’on entend pousser l’herbe des prés…

La vie universelle et généreuse abonde.
L’arbre tend vers l’azur ses gestes infinis.
La sève bout aux flancs de la terre féconde,
Les oiseaux dans les bois recommencent leurs nids…

Que mon vers te célèbre et que ma voix te loue
O Nature, pour ta reposante beauté !
Pour le vent tiède qui vient caresser ma joue,
Pour les soirs odorants baignés de majesté !


Que je te loue, et qu’à te chanter je m’enivre
O Printemps ! Que mon cœur chante avec l’univers !
Je ne veux plus qu’aimer et que me laisser vivre
Puisque la feuille s’ouvre et que les prés sont verts !…

Que je te loue, ô Nature, pour l’allégresse
Que j’ai de voir grandir l’herbe aux tons éclatants,
D’écouter dans les bois l’arbre qui se redresse,
De pouvoir attacher mes yeux sur le printemps !…