Michel Lévy frères, éditeurs (2p. 97-98).

II

ENVOI


Quand on entre chez vous, clémente châtelaine,
Au milieu du salon où la brise d’été
Pénètre avec le jour par le store agité,
On voit toujours des fleurs dans quelque porcelaine.

C’est tantôt, sur la table, un beau vase azuré,
Où se baigne dans l’eau votre gerbe choisie,
Un beau vase venu des pagodes d’Asie,
Avec le madrigal d’un mandarin lettré.

C’est tantôt une étroite amphore de la Grèce
Qui porte vos jasmins et vos camellias,
Et, dans un médaillon rêvé par Phidias,
Met sous vos propres yeux un profil de déesse.


Vous possédez cet art mystérieux, ce don
De marier les fleurs, d’assortir les nuances.
Tout de vos doigts légers connaît les influences ;
Vous feriez adorer même un brin de chardon.

Explique qui voudra comment se fait la chose ;
Mais, dès qu’il est de vous, le chef-d’œuvre est complet.
La pervenche reçoit le parfum de l’œillet,
Et la glycine en pleurs se penche sur la rose.

Et puis, sous ce bouquet qui s’étale si bien,
Un volume entr’ouvert repose au pied du vase.
Livre heureux ! mon orgueil ira jusqu’à l’extase,
Si jamais, sous vos fleurs, ce volume est le mien.