La Verdure dorée/Fumerai-je au soir de ma vie

La Verdure doréeÉditions Émile-Paul frères (p. 77).

L


Fumerai-je au soir de ma vie
Une pipe en bois de laurier ?
Nous voilà vieux, ma pauvre amie,
J’ai eu vingt ans en février.

Nous avons vu bien des feuillages,
Des lacs, des golfes, la clarté
Du songe, et de tous nos voyages,
Hélas ! qu’avons-nous rapporté ?

Et tout cela n’est pas peu triste,
Mais dans l’ombre où nous nous plaignons,
Enfin l’ironie oculiste
Ouvre boutique de lorgnons.

Des lièvres dansent aux pelouses,
Et dans ma chambre mon espoir.
Maintenant j’attends que tu couses
Une rose à ton jupon noir,

Et que le rire ensevelisse,
Sous des guirlandes de clarté,
Notre rêve, ce vieil Ulysse
Que les sirènes ont tenté.