La Vérité sur l’Algérie/05/13

Librairie Universelle (p. 122-124).


CHAPITRE XIII

Les mines sahariennes et la Maurétanie occidentale.


Le pourchas des richesses minérales du Sahara tua d’abord un de nos confrères, Blanchet, du Matin. Une expédition lancée par un grand journal est la réclame classique préliminaire. Blanchet mourut. Puis nous eûmes la toute joyeuse aventure de la colonie de la Maurétanie occidentale, une colonie qui n’exista que sur un papier n’ayant pas toutes les signatures voulues ; qui n’eut jamais d’autre personnel que son gouverneur en expectative, M. Coppolani. Ce spécialiste en théologie musulmane, après nous avoir consolés de bien des tristesses lorsqu’il nous montrait que « l’humanité a toujours des âmes qui prennent leur vol au-dessus des intérêts terrestres », a voulu prendre le sien dans ceux du Sahara. Il avait dans un escalier près d’un corridor eu « vent » du « tuyau ». Comme en partant du côté Algérie ministère de l’intérieur il ne croyait pas arriver, il partit du côté Sénégal ministère des colonies. Il se fit charger des études pour l’organisation d’une nouvelle colonie, la Maurétanie occidentale. Pendant qu’on préparait l’État pour les frais généraux, on tâta le public… avec la Revue franco-musulmane et saharienne. Ce fut de la démographie, de l’anthropologie, de la théologie, de la haute et basse politique ; et ce fut l’appel aux gens qui s’intéressent dans les mines.

En décrivant le Tiris, la région des sebkha, M. Coppolani écrivait :


« Il résulte des renseignements recueillis et des études faites dans la région des sebkha que celle-ci contiendrait des dépôts de nitrates. En 1894 notre consul aux îles Canaries signalait le départ de Las Palmas d’une mission anglaise composée d’ingénieurs spécialistes qui devait se rendre dans la région de Seguiet-el-Hamra pour étudier le tracé d’un chemin de fer du cap Juby à Tombouctou et reconnaître notamment l’existence d’une mine de nitrate découverte la même année. L’emplacement de ces dépôts n’a pas été nettement défini ; ils seraient en partie compris entre le versant septentrional de l’Adrar occidental et de l’oued Draà à peu près à la latitude où se trouvent dans l’hémisphère Sud les grands gisements de nitrate de soude du désert d’Atacama, sur les confins du Chili et du Pérou. Sans vouloir identifier… (Oh ! non… tais-toi, mon cœur !)… les sebhka qui nous occupent aux salarès et aux nitrières du Chili, on doit néanmoins faire remarquer que l’aspect est identique dans les deux régions, qu’elles sont placées dans des conditions climatériques analogues et enfin que la composition des éléments qui les constituent n’offre aucune différence notable. »


Vous n’aimez pas les mines ? L’exemple des salarès du Chili ne vous emballe pas ? Vous préférez l’économie rurale ; voici le couplet qui vous est destiné :


« C’est le pays des aubépines, des jujubiers nains et des euphorbes, les plaines sont des champs de céréales, ou bien des pâturages dans lesquels paissent de nombreux troupeaux de moutons, de chevaux et de chameaux. »


Ça ne vous décide encore pas. Vous désirez peut-être faire du commerce. Eh bien ! rassurez-vous : M. Coppolani vous promet cinq cent mille habitants, cinq cent mille clients.

Ce prospectus alléchant et qui nous paraît suffisant, un autre membre du comité de la Revue franco-musulmane et saharienne, M. Pelatan, ingénieur, le complétait ainsi :


« Dans le Sud, aux confins des oasis sahariennes, la présence de nitrates de soude et de potasse est certaine et, s’il se confirmait que cette matière si précieuse s’y trouve en grande quantité, cela donnerait à ce pays un élément de prospérité indiscutable. Une société anglaise autrefois établie au cap Juby avait projeté d’entreprendre l’exploration de ces nitrates quand des dissentiments avec les tribus voisines de ces établissements la forcèrent à abandonner son projet et même à liquider ses affaires.

« Il est à remarquer que l’existence de nitrate de potasse (salpêtre) en abondance dans la région de Figuig et des oasis du Touat a été établie récemment d’une façon indiscutable par l’explorateur Flamand.

On a de sérieuses raisons aussi de croire que des gisements de houille étendus se trouvent, etc. »


Pour quel client riche, mais ignorant que le nitrate de potasse est le salpêtre, cela était-il écrit ?