Georges Carré (p. 6-8).


ii

qu’entend-on par pierre philosophale ?

Cette question, si simple au premier aspect, est cependant assez difficile à résoudre. Ouvrons les dictionnaires sérieux, parcourons les graves compilations des rares savants qui ont daigné traiter ce sujet. La conclusion est assez facile à poser : Pierre Philosophale, transmutation des métaux, égale Ignorance, Fourberie, Folie.

Si pourtant nous réfléchissons qu’en somme, pour parler draps, mieux vaut aller au drapier qu’au docteur-ès-lettres, l’idée nous viendra peut-être de voir ce que pensent les alchimistes de la question.

Or, au milieu des obscurités voulues et des symboles nombreux qui remplissent leurs traités, il est un point sur lequel ils sont tous d’accord, c’est la définition et les qualités de la Pierre Philosophale.

La Pierre Philosophale parfaite est une poudre rouge qui a la propriété de transformer toutes les impuretés de la nature.

On croit généralement qu’elle ne peut servir, d’après les alchimistes, qu’à changer du plomb ou du mercure en or. C’est une erreur. La théorie alchimique dérive de sources bien trop spéculatives pour localiser ainsi ses effets. L’évolution étant une des grandes lois de la nature, ainsi que l’enseignait il y a plusieurs siècles l’hermétisme, la Pierre Philosophale fait évoluer rapidement ce que les formes naturelles mettent de longues années à produire, voilà pourquoi elle agit, disent les adeptes, sur les règnes végétal et animal aussi bien que sur le règne minéral et peut s’appeler médecine des trois règnes.

Physiquement ce serait une poudre rouge assez semblable comme consistance au chlorure d’or et de l’odeur du sel marin calciné. Tout à l’heure, du reste, nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet. Comme c’est à la transformation des métaux vils, plomb et mercure, en or que doit le plus souvent servir cette Pierre, voyons en quoi consiste cette opération.

Chimiquement c’est une simple augmentation de densité si l’on admet l’unité de la matière, idée fort en honneur parmi les philosophes chimistes contemporains. En effet, le problème à résoudre consiste à transformer un corps de la densité de 13,6 comme le mercure, en un corps de la densité de 19,5 comme l’or. Cette hypothèse de la transmutation est-elle en désaccord avec les plus récentes données de la chimie ?

C’est ce que nous allons voir.