III

la chimie actuelle permet-elle de nier l’existence de la pierre philosophale ?

Deux chimistes contemporains ont poussé leurs investigations dans l’obscur domaine de l’alchimie ; ce sont MM. Figuier, vers 1853, qui publiait l’Alchimie et les Alchimistes, livre dont nous aurons tout à l’heure l’occasion de parler, et M. le professeur M. Berthelot, membre de l’Institut, qui fit paraître, en 1885, les Origines de l’Alchimie.

Ces deux savants officiels, le dernier surtout, fait autorité en la matière et leur opinion mérite d’être écoutée par toutes les personnes sérieuses.

Tous deux ils considèrent l’alchimie et son but comme de beaux rêves dignes des temps passés ; tous deux ils nient formellement l’existence de la pierre philosophale (quoique Figuier prouve à son insu cette existence). Et cependant ils déclarent que scientifiquement la chose ne peut pas être niée a priori. Ainsi Figuier dit :

« Dans l’état présent de nos connaissances, on ne peut prouver d’une manière absolument rigoureuse que la transmutation des métaux soit impossible ; quelques circonstances s’opposent à ce que l’opinion alchimique soit rejetée comme une absurdité en contradiction avec les faits. »

(L’Alchimie et les Alchimistes, p. 353.)

M. Berthelot, dans plusieurs passages de son livre, montre que loin d’être opposée à la chimie contemporaine, la théorie alchimique tend au contraire à remplacer aujourd’hui les données primitives de la philosophie chimique. Voici quelques extraits à l’appui :

« À travers les explications mystiques et les symboles dont s’enveloppent les alchimistes, nous pouvons entrevoir les théories essentielles de leur philosophie ; lesquelles se réduisent en somme à un petit nombre d’idées claires, plausibles, et dont certaines offrent une analogie étrange avec les conceptions de notre temps. »

(Berthelot, les Origines de l’Alchimie, p. 280.)

« Pourquoi ne pourrions-nous pas former le soufre avec l’oxygène, former le sélénium et le tellure avec le soufre, par des procédés de condensation convenables ? Pourquoi le tellure, le sélénium ne pourraient-ils pas être changés inversement en soufre, et celui-ci à son tour métamorphosé en oxygène ?

« Rien en effet ne s’y oppose a priori. »

(Ibid., p. 297.)

« Assurément, je le répète, nul ne peut affirmer que la fabrication des corps réputés simples soit impossible a priori. »

(Ibid., p. 321.)

Tout cela montre assez que la Pierre Philosophale n’est pas fatalement impossible, même de l’avis des savants contemporains. C’est maintenant qu’il nous faut chercher si nous avons des preuves positives de son existence.