La Grève de Pordic/Côtes de Pordic

Librairie L. Prud’homme (p. 21-22).



Côtes de Pordic.


Plus modeste au midi circonscrit le rivage
Pordic aux bâtiments de pénible arrivage
Ce n’est pas que la mer ne lui verse ses eaux,
Et qu’à ses cent vallons elle fasse défaut.
Au contraire les flots et ses hauts promontoires
Vainqueurs de l’Océan, sont une de ses gloires.

Il est vrai que du Port tous les riches produits
N’abordent pas son sol : mais s’ils lui sont ravis,
Pour lui les grands aspects et la libre pensée
S y trouve plus à l’aise, et l’âme dégagée
De ses terrestres liens, vers le bien infini
S’élance plus légère et d’un vol plus hardi.

Ainsi l’on vit jadis un simple promontoire
Prendre une place illustre aux pages de l’histoire,
Aux lieux les plus vantés disputer leur renom,
Faire pâlir Athène et de son Parthenon,
Egaler sinon l’art, au moins la renommée.

Tous le nomment ce cap, que de la mer Egée
Viennent battre les flots, ce Sunium fameux

Où s’inspira Socrate ; où des temples pompeux[1]
Réunirent jadis la foule aux sacrifices,
Tant ces lieux pour prier semblaient être propices.

De par lui cependant, qu’avait-il ce rocher,
À mille autres qui put le faire préférer ?
Était-il le rempart d’une grande cité,
Et par ses citoyens sans cesse visité
Offrait-il aux regards la plus riche culture ?
Des champs remplis d’épis ? des fruits ? de la verdure ?
La treille venait-elle, attachée aux ormeaux,
De sa grappe vermeille enrichir ces coteaux ?
Voyait-on sur ses flancs des pins au frais ombrage,
Où prenait ses ébats la jeunesse volage ?

Non le roc Sunium d’aucun de ses attraits,
Pour attirer les Grecs ne s’embellit jamais.
Mais à ses deux côtés sur une mer immense
Surplombait un sommet, dont la fière apparence
Ravissait le regard, et sur un monde entier
Semblait donner l’empire et le faire régner.


  1. Il y avait entr’autres en l’honneur de Minerve un temple magnifique en marbre, dont on voit encore 19 colonnes admirables…
    V. Dictionnaire de l’antiquité de Bouillet.