L. Hachette et Cie. (p. 186-223).

CHAPITRE V.

LE GOUVERNEMENT ET L’ADMINISTRATION.


I


Le gouvernement. ― Analyse de la charte. ― Le roi l’a donnée malgré lui. ― Les ministres et les fonctionnaires. ― Les chambres. ― Un député dont l’élection a coûté quatorze hommes. ― Le sénat. ― Le corps judiciaire : tous les magistrats sont amovibles. ― Puissance du roi. ― Sentiments du peuple. ― Le roi est étranger et hétérodoxe. ― Il n’y a pas d’héritier présomptif.


La Grèce est de nom une monarchie constitutionnelle.

Le roi a juré le 30 mars 1844 une charte votée par l’assemblée nationale.

La charte garantit aux citoyens l’égalité devant la loi, la liberté individuelle, la liberté de la presse, l’abolition de la confiscation, l’instruction primaire et supérieure gratuites, et la liberté religieuse.

En fait, la presse est libre, l’instruction est donnée gratuitement à tous les degrés ; mais l’égalité devant la loi est une chimère, la liberté individuelle est violée, la confiscation est remplacée par la spoliation, la canaille a brûlé impunément la maison d’un juif, et les tribunaux ont emprisonné un homme qui avait émis dans sa maison une opinion hétérodoxe.

« La puissance législative s’exerce collectivement par le roi, la chambre et le sénat. La personne du roi est sacrée, les ministres sont responsables ; le roi jouit de tous les droits accordés aux monarques constitutionnels. Les députés sont élus parmi les hommes âgés de plus de trente ans qui possèdent une propriété quelconque ou une profession indépendante. Ils sont nommés pour trois ans, et reçoivent 250 drachmes par mois durant la session. Le corps électoral se compose de tous les hommes âgés de vingt-cinq ans qui possèdent une propriété ou exercent une profession indépendante dans la province où ils ont leur domicile politique. Il suit de là que tous les électeurs de trente ans sont éligibles.

« Les sénateurs sont nommés à vie par le roi : ils doivent avoir quarante ans ; ils reçoivent 500 drachmes par mois, même en dehors des sessions. »

En fait, le pouvoir du roi n’est tempéré que par la diplomatie. Tout ministre est prêt à tout faire pour garder son portefeuille. Ces hommes pauvres, ambitieux, sans principes, élevés à une triste école de politique, n’aspirent qu’à gagner le plus longtemps possible 800 drachmes par mois. Ils savent que leur position est précaire, qu’aucun ministère n’a duré, et que les nouvellistes du café de la Belle-Grèce annoncent tous les matins la formation d’un nouveau cabinet. Ils ne songent donc qu’à se maintenir en place et à tirer le meilleur parti de leur passage aux affaires. Chacun d’eux, en arrivant au pouvoir, prend soin de s’entourer de ses créatures. Il le fait par prudence et par devoir : par prudence, pour n’être pas trahi par ses subalternes, par devoir, pour récompenser le dévouement de ceux qui l’ont servi. Un ministre qui ne ferait pas place nette dans son département et qui ne remplacerait pas tous les hommes capables par des hommes dévoués, passeraient pour un sot et un ingrat. Il perdrait l’amitié de ses clients et serait la risée de ses ennemis. Il suit de là que tout le personnel de l’administration se renouvelle à chaque nouveau ministère : qu’il ne se forme jamais d’employés capables dans les bureaux ; que les employés de tout rang, n’ayant aucun avenir assuré, font main basse sur ce qui se trouve à leur portée ; que l’État n’a point de vieux serviteurs, et qu’il n’existe dans le royaume qu’un seul fonctionnaire civil qui ait pu acquérir des droits à la retraite. La conséquence plus éloignée, mais non moins nécessaire d’un pareil ordre de choses, c’est que le roi ne trouve jamais aucune résistance ni dans ses ministres, ni dans les autres fonctionnaires. Tous se sentent ou coupables, ou du moins incapables ; ils savent que leur fortune tient à un fil, et que, lors même qu’ils auraient plus de talent que d’honnêteté, la mauvaise humeur du roi ou la mauvaise digestion de la reine pourrait les précipiter : l’expérience leur a appris que la seule vertu prisée à la cour était l’obéissance ; ils obéissent.

Le roi tient dans sa main les sénateurs et les députés aussi bien que les préfets et les ministres.

Ni les gouvernements qui ont doté la Grèce d’une monarchie absolue n’ont assez sérieusement considéré le caractère du peuple et l’état du pays, ni les révolutionnaires qui ont arraché au roi la constitution de 1844 n’ont tenu compte de l’ignorance et de la barbarie de la nation. Si l’on a jamais pu dire qu’un pays n’était pas mûr pour la liberté, c’est en parlant de la Grèce. Non que les esprits soient fermés aux idées politiques, tant s’en faut. Tous les Grecs, sans exception, sont aptes à discuter les affaires publiques, tous en parlent, sinon savamment, au moins sciemment ; tous prennent un intérêt passionné aux moindres débats des assemblées. Je dis plus : tous connaissent à fond les hommes d’État qui se querellent sur les intérêts publics, et, si le scrutin de liste peut être appliqué dans un pays, c’est en Grèce. Mais ils manquent des deux premières vertus du citoyen : la probité et la modération. Tous les électeurs, sans exception, sont à vendre, et, si le roi voulait faire élire une assemblée de sourds-muets, il l’obtiendrait en y mettant le prix. Ajoutez que les passions politiques ne reculent jamais devant l’assassinat, et vous comprendrez pourquoi un jour d’élection ressemble tantôt à un jour de marché, tantôt à un jour de bataille. J’ai entendu un député qui disait : « Mon élection nous a coûté quatorze hommes. » Il ne comptait pas dans ce nombre les hommes que son concurrent avait dépensés.

Le gouvernement dispose du budget pour les élections qui s’achètent, et de l’armée pour les élections qui s’enlèvent.

Les chambres assemblées, si on n’a pas une majorité toute faite, rien n’est plus aisé que de la faire. Un homme qui touche 250 drachmes par mois, et qui est forcé d’héberger ses électeurs, ne sera jamais un homme indépendant.

Le sénat, riche de 6000 drachmes par an et inamovible, a deux garanties d’indépendance ; mais n’en abuse point. Dans un État où tous les hommes, sans exception, aspirent aux emplois publics, on tient les sénateurs par leurs clients et par leurs familles.

En tous pays, le corps judiciaire, gardien naturel des lois, peut et doit défendre le bon droit contre les caprices du gouvernement. C’est un rôle qu’il a joué non-seulement dans les monarchies constitutionnelles, mais dans les pays de pouvoir absolu. Frédéric II, qui n’était pas un roi constitutionnel, reconnaissait cependant qu’il y avait des juges à Berlin. Le roi Othon n’a jamais permis qu’il y eût des juges à Athènes, car il n’y souffre pas de magistrats inamovibles. La charte consacrait le principe de l’inamovibilité de la magistrature assise, mais le roi, depuis qu’il s’est laissé arracher une constitution, n’est occupé que du soin de la reprendre.

Il est donc maître absolu dans son royaume. Ce n’est pas à dire que tous les cœurs soient à lui. Othon fût-il le meilleur et le plus intelligent des rois, son peuple ne lui pardonnerait jamais sa religion ni son origine. Bavarois et catholique, il sera toujours pour les Grecs orthodoxes un étranger mal baptisé. Enfin, comment le peuple s’attacherait-il à un prince qui n’a pas d’héritier présomptif ? Le principal argument des partisans de la monarchie, c’est que la monarchie est un gouvernement stable, et que la transmission régulière du pouvoir dans une même famille prévient les révolutions et assure la paix publique. Voilà pourquoi, à l’instant même où un souverain expire, on se hâte de crier au peuple : « Le roi est mort ! vive le roi ! » C’est pour le même motif que tous les souverains, lorsqu’ils n’ont pas d’enfant, désignent leur héritier à l’avance, afin que les sujets soient convaincus qu’ils ne manqueront jamais de maîtres, et que le pouvoir tombera sans secousse dans des mains préparées à le recevoir.

La Grèce ignore encore à qui elle obéira après la mort du roi Othon. On lui avait d’abord promis le prince Luitpold, troisième fils du roi Louis De Bavière ; mais il est dit que le nouveau souverain doit être de la religion orthodoxe, et le prince Luitpold aime mieux être catholique que roi. Le quatrième fils du roi Louis, le prince Adalbert, consent à embrasser la religion grecque ; son frère Luitpold lui cède ses droits, la conférence de Londres a autorisé la substitution : mais le prince Adalbert, qui craint où la survenance d’un héritier direct ou une révolution qui renverse le trône de Grèce, ne veut pas changer de religion avant de changer d’état, et refuse d’abjurer sa foi avant de tenir sa couronne.

Si le malheur du peuple grec veut qu’il passe d’un Bavarois à un autre, le prince Adalbert débarquera au Pirée en étranger et en inconnu, et la nation recommencera sur nouveaux frais à faire connaissance avec un nouveau roi.


II


Divisions administratives. ― Le fonctionnaire grec. ― Les passagers de l’Othon et de l’Amélie. ― Histoire d’un jeune employé du ministère des affaires étrangères, qui avait peur de l’eau comme Panurge, et d’un préfet de police qui aima mieux revecoir un coup de pied que de payer quarante-cinq francs.


Le royaume est divisé en dix monarchies ou préfectures, et en quarante-neuf éparchies ou sous-préfectures. Un seul sous-préfet peut administrer à la fois deux éparchies.

Les éparchies se subdivisent en dimarchies ou cantons. Les communes rurales sont administrées par des fonctionnaires municipaux qui portent le nom de parèdres, c’est-à-dire adjoints du dimarque. Tous les fonctionnaires municipaux sont nommés par le roi ; tous sont rétribués. Il a été impossible jusqu’à ce jour de créer des fonctions gratuites. Rien pour rien, est la devise de l’administration. Cependant tous les fonctionnaires montrent le plus grand empressement à se faire nourrir, loger et surtout transporter pour rien. Au dernier voyage du roi, plus de cent personnes avaient demandé et obtenu la faveur de faire route avec lui jusqu’à Trieste. Le petit vapeur l’Othon était encombré de fonctionnaires : les uns couchaient sur le pont, les autres perchaient sur les mâts. Dans l’hiver de 1852-53, la corvette l’Amélie a péri en vue du Pirée. Elle était surchargée de fonctionnaires, de femmes de fonctionnaires, d’enfants de fonctionnaires : peu s’en est fallu que le royaume ne perdît dans ce naufrage un quart du personnel de l’administration. On l’aurait aisément remplacé :

Il est assez de cette marchandise.

Les employés grecs trouvent aussi naturel de faire leurs affaires aux dépens de notre gouvernement qu’aux dépens du leur. La France s’est toujours montrée si généreuse ! Tel ministre plénipotentiaire n’hésitait pas à chauffer un bateau à vapeur pour transporter un député soi-disant dévoué à la France. Aujourd’hui ces abus ont disparu, et, lorsque nos bateaux à vapeur transportent un agent du gouvernement, c’est à la prière du roi et pour affaire pressante. Tandis qu’on discutait à la conférence de Londres la question de succession, le roi eut besoin d’envoyer à Trieste un employé du ministère des affaires étrangères. On choisit un jeune homme d’une grande famille phanariote, et M. le ministre de France permit qu’il se rendît à destination sur un de nos bateaux à hélice, bon marcheur et bien commandé, le Chaptal. Le Chaptal était entré dans l’Adriatique lorsqu’il survint un gros temps. Le diplomate grec fut pris d’une terreur que l’on ne peut comparer qu’à celle de Panurge. « Holos ! Holos ! Je naye ! vrai Dieu, envoie-moi quelque dauphin pour me sauver en terre comme un beau petit Arion ! Bebebebous, bebe, bous, bous ! Commandant, débarquez-moi, je vous en supplie, où vous voudrez, pourvu que ce soit à terre. — Fi ! qu’il est laid le pleurard ! répondait le commandant Poultier, homme aussi hardi, aventureux et délibéré que frère Jean Des Entommeures. Et vos dépêches, diplomate de peu de cœur ? — Au diable les dépêches, commandant, mon bon ami. Soyons hors de ce danger, je vous en prie. Je sais ce qu’elles contiennent, mes maudites dépêches. Des sottises, mon cher commandant, de pures sottises. Est-ce que vous croyez à la diplomatie, vous ? Bouboubouboubous ! je prends tout sur moi ; relâchez ici ou là. N’est-ce pas la côte d’Illyrie que je vois à notre droite ? Que l’on doit y être à l’aise ! Commandant, êtes-vous père ? Songez à ma famille en pleurs ? Hélas ! cette vague enfondrera notre nauf ! Bebebebous, je meurs, je naye, mes amis. Je pardonne à tout le monde. — Magna, gna, gna, dit frère Jean. — Commandant, je vous somme de me mettre à terre. Vous répondez de mes jours. La Grèce vous en demandera compte. Souvenez-vous que je m’appelle S… — Souvenez-vous-en vous-même, mon petit ami, » répliqua le commandant.

Il était une fois un ministre de France qui s’appelait M. Sabatier, et un préfet de police d’Athènes qui s’appelait D…. M. Sabatier, l’homme intrépide, ne craignait rien au monde, pas même d’être volé au jeu par les Grecs. Il les surveillait si bien et avec des yeux si fiers, que les pauvres gens avaient les mains paralysées. C’est ainsi que le ministre de France gagna au préfet de police d’Athènes deux cents drachmes, ou cent quatre-vingt francs, sur parole. S’il avait été moins attentif au jeu, peut-être les aurait-il perdues au lieu de les gagner. Mais l’argent d’un Grec est plus difficile à saisir que les oreilles d’un lièvre. Le préfet de police pensa qu’il était assez malheureux d’avoir perdu son argent, et il s’épargna le chagrin de le débourser. Il vint plus rarement à la légation, et choisit pour ses promenades les chemins où M. Sabatier ne passait pas. Cependant, comme le créancier et le débiteur n’étaient pas des montagnes, ils finirent par se rencontrer.

« Mon cher D…, dit familièrement M. Sabatier, si vous ne me payez pas deux cents drachmes, je vous donnerai du pied vous savez où.

— Monsieur le ministre, ne prenez pas cette peine ; j’aurai l’honneur de vous porter l’argent. »

Un mois après, deuxième rencontre : « Préfet, mon bel ami, dit le ministre, vous savez où je vous donnerai du pied si vous ne me payez pas deux cents drachmes. »

Quelques semaines plus tard, le ministre et le préfet se rencontrèrent au milieu de quinze ou vingt personnes : « Préfet très-illustre, dit M. Sabatier, c’est aujourd’hui que vous recevrez ce dont nous sommes convenus, si vous ne me payez deux cents drachmes.

— Mon cher monsieur le ministre, je vous jure que je suis sans un sou. Peut-être ai-je sur moi un billet de cinquante drachmes : seriez-vous assez clément pour l’accepter en à-compte ?

— C’est deux cents drachmes à donner, préfet très-précieux, ou un coup de pied à recevoir.

— Mon cher monsieur le ministre, j’aimerais mieux ne rien recevoir et ne rien donner, si vous vouliez bien le permettre. Mais je me rappelle que j’ai mis dans cette poche un billet de cent drachmes, et justement le voici. Cent cinquante drachmes, monsieur le ministre ! Ne me ferez-vous pas grâce du reste ? »

M. Sabatier prit l’argent et donna le coup de pied. « Tiens, dit-il, nous sommes quittes.

— Ce Monsieur Sabatier ! dit le préfet, il a toujours le mot pour rire ! »


III


La capitale transportée d’Astros à Égine, d’Égine à Nauplie, de Nauplie à Athènes. ― Ce que deviennent les capitales mises au rebut. ― Le gouvernement aurait dû s’établir à Corinthe ou au moins au Pirée. ― Influence de l’archéologie. ― Fureur de bâtir. ― Aspect d’Athènes. ― Le bazar. ― L’horloge de lord Elgin. ― La ville neuve. ― Les monuments modernes. ― Les ministères. ― Avenir d’Athènes.


Pendant la guerre de l’indépendance, l’assemblée qui proclama la liberté et qui gouverna le pays siégeait dans la petite ville d’Astros, au sud de Nauplie.

Le comte Capo d’Istria, nommé président de la république au commencement de l’année 1828, établit le siége du gouvernement dans le village d’Égine. La population mobile et remuante qui recherche les emplois publics s’y porta en masse ; on y construisit force maisons, et le village devint une ville.

En juin 1829, Capo d’Istria transporta la capitale à Nauplie. Égine fut laissée, les maisons qu’on y avait bâties tombèrent en ruine, la ville redevint village ; l’activité et la vie s’enfuirent avec le gouvernement. Il n’y a dans le royaume ni assez d’hommes ni assez de capitaux pour que deux villes en même temps soient peuplées et florissantes. Le port d’Égine est entouré de ruines qui datent de vingt-cinq ans. La maison de Capo d’Istria n’est plus habitable. Y entre qui veut ; la porte est enfoncée ; les fenêtres n’ont plus de vitres ; une grosse vigne, qui grimpait autrefois le long du mur, rampe à terre au milieu de la cour.

Les insulaires d’Égine, pour se fixer au bord de la mer et peupler la ville de Capo d’Istria, avaient abandonné l’ancien chef-lieu situé sur une montagne. Il y a donc, dans une île de trois lieues de long, deux villes ruinées, dont l’une est complètement déserte, et l’autre compte un habitant par deux maisons.

Nauplie grandit à son tour : la foule s’y porte, les rues se tracent, les maisons s’élèvent. Au mois de décembre 1834, le gouvernement se transporte à Athènes, et c’en est fait de Nauplie.

C’est le roi Othon, ou plutôt c’est son père, qui a voulu qu’Athènes devînt la capitale du royaume. On a fait là un choix plus archéologique que politique. La capitale eût été beaucoup mieux placée à l’isthme de Corinthe, au centre du royaume, entre l’Orient et l’Occident, à cheval sur deux mers. Elle eût été plus près de Trieste, de Marseille et de Londres, sans être plus loin d’Alexandrie et de Constantinople. Les bâtiments perdent deux jours à doubler le Péloponèse. La plaine de Corinthe est d’ailleurs plus fertile que celle d’Athènes, le climat y est plus doux, l’air plus sain, l’eau plus abondante. Mais le roi s’imaginait sans doute qu’il deviendrait un grand général dans le pays de Miltiade, un grand marin dans la patrie de Thémistocle, un profond politique dans la ville de Périclès. Corinthe pouvait devenir en peu de temps une ville de commerce et l’un des principaux marchés de l’Orient. Elle a deux ports qui suffisent à la marine marchande : les bateaux du Lloyd abordent tous les jours à Loutraki et à Calamaki. Athènes n’est pas sur le grand chemin du commerce, et les navires se détournent de leur route lorsqu’ils sont forcés d’y relâcher. Mais Athènes s’appelle Athènes.

Lorsque le roi vint s’y établir avec toute l’administration centrale du royaume, la capitale n’était qu’un village en ruine entouré d’une plaine aride. On bâtit à la hâte une maison qui servit de palais ; la cour s’installa comme elle put dans les baraques voisines ; les employés campèrent.

Si, à ce moment du moins, on avait consulté le sens commun, on eût placé Athènes au Pirée. La capitale d’un peuple de marins doit être un port de mer, et, puisque tout était à faire, il n’en eût pas coûté plus cher pour créer une ville ici plutôt que là. Le Pirée d’ailleurs est beaucoup moins malsain que l’emplacement qu’on a choisi. Mais la santé publique, aussi bien que l’intérêt du commerce, dut céder à l’archéologie. Si le roi avait pu coucher dans le lit de Sophocle, il se serait cru capable d’écrire des tragédies.

Athènes s’agrandit rapidement, comme avaient fait Égine et Nauplie. Les Grecs sont très-entreprenants, et toujours prêts à bâtir. L’affluence des gens sans domicile qui occupaient et sollicitaient des places éleva si haut le prix des loyers, que les constructeurs de maisons firent de beaux bénéfices. Ce n’était pas une mauvaise opération que d’emprunter à douze pour cent pour bâtir : la maison rendait dix-huit ou vingt et le propriétaire y trouvait son compte. Aujourd’hui encore, tout Grec qui est à la tête d’une somme de dix mille drachmes se hâte de construire une maison de cinquante mille, qui est chargée d’hypothèques avant d’être couverte d’ardoises. Les neuf dixièmes des maisons d’Athènes sont dans le même cas, et cependant la fureur de bâtir ne s’est pas ralentie.

Les maçons grecs ne sont pas maladroits, la pierre est à vil prix, l’Hymette fournit un marbre qui vaut mieux que la pierre et qui ne coûte pas plus cher ; le plâtre, qui est détestable pour la sculpture, est excellent pour la bâtisse ; le bois seul est cher : j’ai dit pourquoi. Les petites gens savent au besoin bâtir sans pierre des maisons qui suffisent à les loger. On pétrit de la terre délayée, on la verse dans des moules, on la fait sécher au soleil, et l’on fabrique ainsi des briques crues qui peuvent durer quatre ou cinq mille ans. Un bon nombre des monuments que l’on retrouve à Ninive n’étaient pas bâtis autrement.

La ville moderne occupe une partie de l’emplacement de la ville d’Adrien. La ville de Thésée, la vieille Athènes, s’étendait entre l’Acropole et les ports : on peut mesurer sur la roche nue l’emplacement des maisonnettes du temps de Périclès, et suivre les rues en casse-cou qui ont gardé les ornières antiques où se cahotait le char d’Alcibiade. Les maisons romaines n’ont pas laissé de traces : le terrain est tellement exhaussé par les débris de toute espèce qu’il faut fouiller jusqu’à deux ou trois mètres pour retrouver le sol antique.

Le village turc qui se groupait jadis au bas de l’Acropole n’a pas disparu. Il forme tout un quartier de la ville. Ce sont des ruelles étroites, des cabanes à hauteur d’appui, des cours où les poulets, les enfants et les cochons grouillent pêle-mêle entre un tas de fumier et un tas de fagots. L’immense majorité de la population de ce quartier est composée d’Albanais.

Le bazar est à la même place que sous la domination turque. On y voit encore l’horloge que lord Elgin donna à la ville pour la consoler de tout ce qu’il lui prenait. C’est ainsi que les navigateurs du bon temps achetaient des lingots d’or contre des colliers de verre et des montres de trois sous.

Le bazar d’Athènes, non plus qu’aucun des bazars de l’Orient, ne ressemble au bazar Bonne-Nouvelle. C’est tout simplement le quartier marchand de la ville. Les Orientaux, qui aiment la paix et le silence, ont soin de reléguer le commerce dans un coin séparé. Les marchands eux-mêmes n’habitent pas auprès de leurs boutiques. Ils y viennent le matin et s’en retournent le soir. Pendant le jour les boutiques sont ouvertes, et l’on trouve au bazar tout ce qu’on peut désirer, de la viande, du papier à lettre, des concombres et des gants jaunes.

La ville est coupée en croix par deux grandes rues, la rue d’Éole et la rue d’Hermès. La rue d’Hermès est la continuation de la route du Pirée ; elle aboutit au palais du roi. C’est une ligne droite, interrompue en deux endroits par une église et par un palmier.

La rue d’Éole est perpendiculaire à la rue d’Hermès. Elle commence au pied de l’Acropole et se continue par une route d’un kilomètre de long qui mène au Patissia. Ces deux rues sont bordées de magasins et de cafés. Les négociants européens ne daignent pas se confiner dans les ruelles du bazar, et quelques marchands grecs ont voulu comme eux se mettre sur le passage des chalands et épargner aux étrangers la peine de les chercher. À l’intersection des deux rues est le café de la Belle-Grèce, rendez-vous de toute la population mâle de la ville.

Dans le triangle formé par le palais, la rue d’Hermès et la partie de la rue d’Éole qui se dirige vers Patissia, s’étend la Néapolis, ou ville neuve. Ce quartier s’agrandit et s’embellit tous les jours. On y rencontre à chaque pas de jolies maisons entourées de jardins et coquettement décorées de pilastres ou de colonnes. Les rues ne sont ni très-régulièrement tracées, ni très-soigneusement nivelées, et un grand fossé, véritable cloaque à ciel ouvert, traverse ce beau quartier dans toute sa longueur. Mais ces maisonnettes un peu prétentieuses forment un petit panorama assez gai. Elles ont ordinairement trois étages, dont un sous terre. L’hypogée est, comme les caves de nos pays, frais en été, chaud en hiver. On s’y retire en hiver comme en été pour prendre le repas. Les appartements de réception sont au rez-de-chaussée, les chambres à coucher au premier ; le toit vient ensuite. Les légations de France[1], de Bavière, d’Angleterre et de Russie, et l’École française, sont dans la ville neuve. Les deux monuments modernes de la ville, le Palais et l’Université, sont dans la ville neuve. L’hôpital civil et l’hôpital des aveugles y sont aussi ; c’est dans la ville neuve que le ministre de France a posé, l’an dernier, la première pierre d’une église catholique. La population se porte de ce côté, comme à Paris vers les Champs-Élysées. En février 1852, j’ai trouvé l’École française environnée de terrains incultes : je l’ai laissée entourée de maisons.

La ville d’Athènes n’est pas encombrée de monuments modernes, et de tout ce qui s’est fait depuis vingt ans, la façade de l’Université est le seul ouvrage réussi. Il reste d’ailleurs beaucoup à faire. Les ministères et les tribunaux sont établis, l’un au-dessus d’une boutique, l’autre au premier étage d’une gargote, l’autre dans une maison borgne d’une rue mal habitée. On voit la justice trôner dans des galetas dont un porteur d’eau ne se contenterait pas. Les ministres se logent à leurs frais, où bon leur semble, à l’auberge, s’ils y trouvent de l’économie. Ils ne s’inquiètent pas d’une remise ou d’une écurie : le ministre des affaires étrangères est le seul à qui l’État paye un fiacre pour aller voir les ambassadeurs.

Athènes est une ville de vingt mille âmes et de deux mille maisons. C’est la présence du gouvernement qui a fait élever toutes ces constructions et qui tient tant de monde assemblé sur un même point. Cette capitale accidentelle n’a point de racines dans le sol. Elle ne communique point par des routes avec le reste du pays ; elle n’envoie pas au reste de la Grèce les produits de son industrie. Les populations, qui n’ont rien à attendre du gouvernement, ne tournent pas les yeux avec espérance vers Athènes. La ville n’a pas de banlieue ; les rares villages qui l’environnent ne se soucient point de son existence ; la plaine est en grande partie inculte, et les laboureurs qui en défrichent quelque chose sont les mêmes malheureux qui y cherchaient leur vie avant l’arrivée du roi Othon. En un mot, rien ne retiendrait plus à Athènes cette population de vingt mille personnes, si le gouvernement se transportait à Corinthe, et l’on verrait bientôt Athènes aussi déserte et aussi ruinée qu’Égine et que Nauplie.


IV


La justice : point de justice. ― Intégrité des juges. ― Leur patriotisme. ― La justice a des façons un peu vives. Leftéri en prison. ― Un procès en justice de paix. ― Les prisons. ― La peine de mort. ― Tragédie abominable.


La Grèce possède un conseil d’État, une cour des comptes, un aréopage ou cour de cassation, deux cours d’appel, dix tribunaux de première instance, trois tribunaux de commerce, cent vingt justices de paix, des cours d’assises, un jury, des avocats, des notaires, des huissiers, et point d’avoués. Cependant il n’y a point de justice en Grèce.

Elle possède un Code civil provisoire emprunté au droit romain, au Code Napoléon et à la législation allemande ; un Code de commerce calqué sur le nôtre ; un Code pénal très-complet, très-méthodique et très-doux ; un Code de procédure civile comprenant onze cents articles ; un Code de procédure criminelle qui offre toutes les garanties désirables à la justice et à l’accusé. Cependant il n’y a pas de justice en Grèce.

Les juges ne sont ni inamovibles ni incorruptibles. Êtes-vous protégé par la cour ou par un homme puissant : votre affaire est bonne. Avez-vous quelques milliers de drachmes à dépenser : elle est excellente. Il y a deux juges de paix à Athènes. « Quel est le plus honnête des deux ? demandais-je à un magistrat d’un ordre supérieur.

— Ni l’un ni l’autre, » me répondit-il.

Les juges sont d’un patriotisme effréné. J’ai entendu un magistrat dire, en parlant de la duchesse de Plaisance : « Ses héritiers n’hériteront pas du bien qu’elle possède ici.

— Quoi ! tant d’argent qui lui est dû…

— Nos tribunaux ne donneront jamais gain de cause à un étranger.

— Mais elle a d’excellentes hypothèques.

— Oh ! les hypothèques, c’est notre fort. »

En effet, placez une somme sur la première hypothèque : demain l’emprunteur se fabrique un faux contrat de mariage qui vous enlève des mains le gage que vous croyiez tenir.

La justice a des façons un peu brutales avec le pauvre monde. Un matin, Leftéri nous arrive tout hors de lui. « Qu’as-tu donc, mon pauvre Leftéri ?

— Effendi, je sors de prison.

— Qu’avais-tu fait ?

— Rien. Je donnais l’orge à mes chevaux lorsqu’on est venu me prendre au collet sans me dire pourquoi. Quand j’ai été sous les verrous, on m’a dit : « Donne trente-six drachmes et tu sortiras. »

— Tu devais donc trente-six drachmes ?

— Je ne devais pas un lepton ; mais la douane a prétendu que j’avais fait entrer des chevaux turcs. J’ai eu beau dire que tous mes chevaux avaient été achetés à Athènes ; on m’a répondu que je m’expliquerais quand j’aurais payé trente-six drachmes. »

Ce pauvre garçon qu’on emprisonnait sans jugement ne devait pas la somme réclamée. Nous le savions mieux que personne, puisqu’il avait fait le voyage de Turquie avec trois d’entre nous. Cependant il lui fut impossible de se faire restituer son argent.

J’ai assisté comme témoin à un petit procès en justice de paix. Un manant, demi-cabaretier, demi-soldat, avait insulté des Français sur la route de Patissia. Le greffier du juge paix, faisant l’office de ministère public, requit toute la sévérité du tribunal, je veux dire du juge, contre l’accusé. Toute son argumentation se réduisait à ceci : « Considérez, monsieur le juge, que la plainte a été déposée par M. le ministre de France ! La France… » etc. L’accusé, qui était d’ailleurs parfaitement coupable, ne savait que répondre à ces raisons. Un gamin de vingt ans qui se trouvait dans l’auditoire lui cria : « Veux-tu que je plaide ta cause ?

— Non, tu m’ennuies.

— Je te ferai acquitter.

— Eh bien ! Je te nomme mon avocat. »

Le jeune drôle s’avance, et, prenant tout le public à partie, il s’écrie à haute voix : « Que vient-on nous parler de la France et des Français ? Ne sommes-nous pas des Hellènes ? Oui, nous sommes Hellènes, ô mes frères, et un Hellène est toujours innocent ! (Marques d’approbation.) D’ailleurs, l’acte d’accusation a menti. J’étais présent, moi, le jour où cette victime résignée, ce doux soldat, ce timide aubergiste a été insulté, frappé, blessé par une horde de barbares venus du Nord ! » Là-dessus, l’avocat s’improvise témoin, et, sans même prêter serment, entasse mensonge sur mensonge. Le public, composé de dix ou douze vauriens, fait chorus avec lui : on était dans la première émotion des affaires d’Orient, et le doux soldat, qui avait bel et bien gagné un mois de prison, en fut quitte pour vingt-quatre heures. Encore ne voudrais-je point jurer qu’il les a faites. Les témoins ne déposent pas volontiers contre les criminels, les gendarmes ne les mènent pas très-scrupuleusement en prison, et les geôliers laissent de temps en temps la porte ouverte. Le sage fait provision d’amis.

Il n’y a dans tout le royaume qu’une prison munie d’un bon verrou. C’est le pénitencier du château de Nauplie. Partout ailleurs, les détenus ont un pied dans la cage et l’autre dans la rue. Le gouvernement grec ferait bien d’aller étudier les prisons de Corfou.

La plus horrible de toutes les peines infligées par la justice est en tout pays la plus facile à appliquer. On s’échappe de la prison et des galères, on ne s’échappe pas de la tombe, et un homme est bientôt mort.

Il n’en est pas ainsi dans le royaume de la Grèce ; et l’application de la peine de mort y a été impossible jusqu’en 1847.

Le gouvernement chercha un bourreau dans le pays : il n’en trouva point. Il en fit venir deux ou trois du dehors : il les vit massacrer par le peuple. Il s’avisa de prendre les soldats pour exécuteurs : le sénat ne le permit pas. Enfin, on a trouvé un homme assez affamé pour prêter sa main aux tristes œuvres de la justice humaine. Ce malheureux vit seul, loin d’Athènes, dans une forteresse où il est gardé par des soldats. On l’amène clandestinement en bateau la veille de l’exécution ; on le ramène en toute hâte dès qu’il a fait son coup : avant, pendant et après l’exercice de ses fonctions, les soldats l’entourent pour protéger sa vie.

Lorsque le ministère de la justice fut assez heureux pour trouver un bourreau, il y avait dans les prisons trente ou quarante condamnés à mort qui attendait patiemment leur tour. On liquida comme on put cet arriéré.

La guillotine se dresse à quelques pas d’Athènes, à l’entrée de la grotte des Nymphes. L’échafaud est à hauteur d’homme, et l’horreur du spectacle s’en accroît. Il semble aux regardants qu’ils n’auraient qu’à étendre la main pour arrêter le couteau, et ils se sentent complices du sang répandu. Mais ce qui ajoute le plus à l’intérêt de cette tragédie légale, c’est que le patient défend sa vie. La loi ordonne qu’il marche librement au supplice et que ses mains ne soient pas enchaînées. Or, la plupart des condamnés, brigands de leur état, sont des hommes vigoureux qui ne manquent jamais d’engager une lutte avec le bourreau. Une exécution commence par un duel où la justice a toujours le dessus, car elle est armée d’un long poignard.

Lorsque le condamné a reçu huit ou dix blessures et perdu toutes ses forces avec tout son sang, il marche librement au supplice, et sa tête tombe.

Le peuple retourne à la ville en se demandant comment il pourrait bien faire pour assassiner le bourreau. C’est la moralité de cette tragédie.


V


Armée et marine. ― Effectif de l’armée. ― L’armée utile et l’armée inutile. ― Application ingénieuse de la conscription. ― L’école des Évelpides et l’avenir des jeunes officiers. ― Matériel de la marine. ― Personnel. ― Deux matelots par officier.


L’armée grecque, qui a été réorganisée en 1843, se compose :

1o De deux bataillons d’infanterie de ligne de huit compagnies chacun, ces deux bataillons formant un effectif de 50 officiers, 227 sous-officiers et 2000 soldats ;

2o De deux bataillons d’infanterie légère de six compagnies chacun, ces deux bataillons comprenant un effectif de 36 officiers, 138 sous-officiers et 1526 soldats ;

3o D’une division de cavalerie de deux compagnies, ayant un effectif de 12 officiers, 30 sous-officiers et 140 cavaliers ;

4o De trois compagnies d’artillerie d’un effectif de 21 officiers, 40 sous-officiers et 250 soldats, y compris le train ;

5o D’une compagnie d’ouvriers d’artillerie ayant un effectif de 5 officiers, 20 sous-officiers, 103 ouvriers ;

6o D’un corps de gendarmerie d’un effectif de 50 officiers, 152 brigadiers et 1250 gendarmes, dont 150 à cheval ;

7o De huit bataillons de la garde des frontières, chaque bataillon ayant quatre compagnies, ces huit bataillons comprenant un effectif de 149 officiers, 272 sous-officiers et 1536 soldats ;

8o D’un corps de la phalange dans lequel on a inscrit les anciens officiers des troupes irrégulières qui avaient été reconnus avoir droit à une récompense. La phalange s’est composée autrefois de 900 officiers ; on l’a réduite à 350 ; elle est remontée à 440[2].

L’effectif de l’armée grecque, en y comprenant l’administration centrale, les arsenaux, la commission d’habillements, les hôpitaux militaires, les officiers et les soldats en retraite ou en disponibilité, se compose de 8500 hommes, dont 1071 officiers. Les officiers formeraient à eux seuls une petite armée. Les généraux, qui sont au nombre de 70, composeraient un fort détachement.

Les deux seuls corps qui aient rendu des services au pays sont la gendarmerie et les gardes de la frontière. Ces irréguliers sont comme une seconde gendarmerie établie dans les provinces les plus exposées au brigandage. Ils sont de tous les soldats, ceux qui coûtent le moins à l’État. On leur donne 42 drachmes par mois et le pain. Ils se nourrissent, s’arment et s’habillent eux-mêmes ; ils couchent à la belle étoile, enveloppés dans un gros manteau. Lorsque les affaires du service en appellent quelques-uns à Athènes, ils sont vraiment curieux à voir avec leurs haillons pittoresques, leur foustanelle terreuse et leurs armes de fantaisie.

C’est en 1836 que les progrès du brigandage et les révoltes de l’Acarnanie décidèrent le gouvernement à rassembler un corps d’irréguliers. La plupart des soldats qui s’y enrôlèrent avaient fait partie des anciennes bandes ; on leur donna pour officiers leurs anciens chefs. Ces sacripants pacifièrent l’Acarnanie et réprimèrent le brigandage ; la Grèce leur doit cent fois plus qu’à l’armée régulière, qui coûte plus cher[3].

Les gardes-frontière, ainsi que les gendarmes sont tous des enrôlés volontaires. Ils s’engagent pour deux ans.

La gendarmerie coûte à l’État environ.............. 750 000 dr. par an.
Le corps des gardes-frontière, environ.............. 850 000

Total....... 1 600 000

Un million six cent mille drachmes suffisent à payer le logement, la solde, l’armement et l’entretien des 3500 hommes et des 150 chevaux qui composent l’armée utile et sérieuse du royaume.

Les soldats réguliers, qui servent surtout à la parade, se sont recrutés par des engagements jusqu’en 1838. Depuis cette époque, ils sont désignés par la conscription ; mais la conscription n’est pas une opération facile dans un pays dépourvu d’état civil.

Le contingent annuel est fixé à 1200 hommes ; la durée du service est limitée à quatre ans. Le gouvernement fait savoir à chaque commune qu’elle doit fournir tant de soldats par année, et l’administration municipale se charge de les trouver.

Or la Grèce est divisée en une multitude de royautés de clocher, et chaque commune vit dans la dépendance d’un ou deux individus plus riches ou plus puissants que les autres. Si l’équité ne règne pas dans Athènes, elle ne s’est pas réfugiée dans les campagnes. Il arrive donc que ni les chefs de village, ni leurs amis, ni leurs clients ne sont assujettis à la conscription, et que les pauvres diables qu’on force de tirer au sort ne manquent jamais de tomber. S’ils tirent par maladresse un bon numéro, on les fait recommencer jusqu’à ce qu’ils en rencontrent un mauvais. Tel individu a tiré au sort jusqu’à sept fois.

Au reste, les malheureux qu’on enrôle ainsi contre leur vouloir et contre le droit ne sont pas menacés de devenir officiers. Les cadres de l’armée sont encombrés, et l’école militaire des Évelpides, qui est une sorte de compromis entre la Flèche et Saint-Cyr, jette tous les ans sur le pavé une douzaine d’adjudants sous-officiers sans avenir. On leur donne 75 drachmes par mois, en attendant mieux. Quelques-uns attendent sept années une commission de sous-lieutenant.

La marine n’est pas moins encombrée que l’armée de terre ; je veux dire encombrée d’officiers, car le matériel n’est pas gênant.

La flotte grecque était considérable après la guerre de l’indépendance ; Capo d’Istria voulut forcer les commandants à remettre leurs navires aux officiers russes : les commandants aimèrent mieux les faire sauter.

Depuis cette époque, le nombre des bâtiments de guerre va toujours en décroissant. En 1842, la Grèce possédait 34 petits bâtiments ; elle n’en avait plus que 14 en 1851 ; aujourd’hui, la flotte se compose de 1 corvette, 3 goëlettes, 3 cutters, 1 canonnière, 1 balaou, 1 garde-côte et 1 aviso à vapeur ; en tout 11 navires, dont le seul sérieux est la corvette le Ludovic.

Il est trop évident qu’une pareille flotte ne peut ni protéger la Grèce contre les puissances étrangères, ni défendre la sécurité publique contre les pirates. Elle est précisément aussi utile que l’armée régulière, qui ne fait peur ni aux brigands ni aux étrangers.

Cette futilité coûte au peuple grec 1 150 000 drachmes dans les années ordinaires.

Le personnel de la marine se compose de 1150 hommes qui ne naviguent pas.

Sur ces 1150 hommes, on compte 450 officiers. C’est un peu plus de deux hommes par officier.


VI


L’instruction. ― Gratuité de l’enseignement. ― Penchant de tous les Grecs pour les professions libérales. ― L’étudiant domestique. ― Littérature. ― Beaux-arts. ― Un mot sur les antiquités. ― M. Pittakis. ― Conduite du gouvernement.


On compte dans le royaume de Grèce une grande université, une école militaire, une école polytechnique, une école normale, une école d’agriculture, un séminaire, sept lycées, un immense institut pour l’éducation des filles, cent soixante-dix-neuf écoles helléniques et trois cent soixante-neuf écoles communales ; mais il est bon de s’entendre sur le sens de chaque mot.

Nous avons déjà parlé de l’école d’agriculture et de ses sept élèves. L’école polytechnique est tout simplement une école d’arts et métiers où les sculpteurs apprennent à mouler, et les peintres à barbouiller des enseignes. L’école normale forme des instituteurs primaires ; nous parlerons bientôt du savoir que les papas ont amassé au séminaire ; et les adjudants sous-officiers qui sortent de l’école des Évelpides ne sont ni des savants ni des héros.

Les écoles helléniques sont celles où l’on apprend un peu de grec ancien ; les écoles communales ou romaïques, celles où l’on reçoit strictement l’instruction élémentaire. Le nombre de ces écoles n’a rien d’exagéré : nos départements les plus pauvres et les moins peuplés en ont davantage.

Les sept lycées sont bien au-dessous de nos collèges communaux, et l’université d’Athènes, avec ses trente-deux professeurs, n’est pas une Sorbonne. Athènes possède un observatoire, une bibliothèque, une collection d’instruments de physique, un musée d’histoire naturelle, un musée anatomique, un musée d’anatomie pathologique. Tout cela se réduit à quelques instruments en mauvais état, quelques échantillons en désordre et quelques lézards empaillés. Elle possédait une collection de médailles, mais le conservateur l’a emportée en Allemagne.

L’enseignement de l’université d’Athènes est réparti en quatre facultés, de théologie, de philosophie, de droit et de médecine.

La faculté de philosophie comprend treize cours :

Littérature grecque générale ;

Explication et analyse des prosateurs et des poëtes grecs ;

Rhétorique et philologie ;

Philosophie ;

Astronomie mathématique ;

Histoire naturelle ;

Histoire ancienne et antiquités grecques ;

Histoire moderne et du moyen âge ; statistique ;

Archéologie et histoire de l’art ;

Physique ;

Chimie générale ;

Langues orientales.

On voit que les Grecs appellent philosophie, comme au temps de Thalès, l’ensemble des connaissances humaines. La faculté de philosophie remplace à elle seule une faculté des lettres et une faculté des sciences.

Je pense qu’il est inutile de faire remarquer le peu de place qu’ils accordent aux sciences. Un cours d’astronomie et de mathématiques, un cours d’histoire naturelle, un cours de physique et un cours de chimie générale ne peuvent donner aux écoliers que des notions superficielles. Mais j’ai dit que les Grecs n’ont aucun goût pour les sciences de pure spéculation, qu’ils n’acquièrent avidement que les connaissances utiles, et qu’ils n’étudient avec plaisir que lorsqu’ils apprennent en même temps une science et un métier.

Notez aussi l’omission des langues et des littératures de l’Occident. Les Grecs s’imaginent que leurs ancêtres savaient tout, et ils se trompent.

Les cours de la faculté de philosophie sont beaucoup moins fréquentés que les autres. C’est qu’ils n’aboutissent à aucune carrière lucrative.

Dans les premières années qui ont suivi la fondation de l’université, toute la jeunesse étudiait le droit. Quand les tribunaux ont été envahis, on s’est rejeté sur la médecine. Aujourd’hui le royaume possède une armée de juges et d’avocats et une armée de médecins, sans parler d’une armée d’officiers.

La seule chose que j’admire dans l’instruction publique en Grèce, c’est qu’elle est gratuite à tous les degrés, depuis les écoles de villages jusqu’aux cours de l’université.

Mais cette gratuité a ses dangers : elle favorise outre mesure le penchant qui entraîne la jeunesse vers les professions libérales.

Ce qui n’est pas moins remarquable, c’est l’application soutenue des écoliers. Les enfants de tout âge poursuivent leurs études avec un acharnement infatigable. Ces jeunes esprits, sérieux dès l’enfance et initiés de bonne heure aux difficultés de la vie, ne perdent jamais de vue le diplôme qui sera leur gagne-pain.

J’ai vu, dans un petit village, une quinzaine d’enfants accroupis au soleil, le livre à la main, devant la porte de l’école. En France, il serait impossible de faire une classe en plein air : l’attention des écoliers se répartirait par moitiés égales entre les gens qui passent et les hirondelles qui volent ; le professeur aurait le reste. Ces studieux bambins nous virent défiler, nous et nos bagages, et un événement aussi rare, dans un pays perdu, leur fit à peine lever la tête.

On trouve à Athènes toutes les espèces d’étudiants, excepté l’étudiant qui n’étudie pas.

L’écolier mendiant n’y est pas rare ; l’écolier domestique est le plus nombreux de tous. Petros a fait venir, il y a deux ans, un sien neveu, natif de Léondari en Arcadie ; il l’a fait admettre dans la maison comme apprenti domestique, et au collège comme apprenti savant. Si le gamin est intelligent, et il le sera sans doute, car son oncle ne lui a pas dérobé sa part, il entrera dans cinq ou six ans chez un Phanariote comme valet de chambre, et à l’université comme étudiant en médecine. Au bout de deux ou trois ans d’étude dans l’une et l’autre profession, il ira un beau matin trouver son maître et lui dira, tout en époussetant les meubles :

« Monsieur est content de mon service ?

— Oui, mon Basile.

— Monsieur n’a jamais eu à se plaindre de moi ?

— Non.

— Monsieur ne m’a trouvé ni bête ni coquin ?

— Non.

— Alors puis-je espérer que monsieur voudra bien me permettre de lui continuer mes soins ?…

— Sans doute.

— En qualité de médecin. J’ai passé ma thèse hier avec quelque succès. »

Voilà pourquoi l’on ne trouve plus de garçons de charrue.

Cette ambition furieuse dont tous les Grecs sont possédés n’est pas une passion misérable. Elle ne fait pas le bonheur du peuple, mais elle l’élève au-dessus de nations plus riches et plus heureuses. L’homme ne vit pas seulement de pain. Un Grec qui n’a rien à mettre sous la dent déjeune d’une discussion politique ou d’un article de journal.

Athènes possédait en 1852 dix-neuf imprimeries contenant quarante presses, huit fonderies, dix presses lithographiques ; Syra, cinq imprimeries et une fonderie ; Tripolitza, Nauplie, Patras et Chalcis avaient aussi des imprimeries. Il se publiait en Grèce vingt-deux journaux et quatre recueils périodiques ; ces quatre recueils, ainsi que quinze journaux sur vingt-deux, paraissaient à Athènes ; les autres se publiaient à Syra, à Tripolitza, à Nauplie, à Patras et à Chalcis.

Les journaux sont à peu près toute la littérature du pays. Les quelques livres qui ont été imprimés en grec moderne sont des traductions du français : c’est Télémaque, Paul et Virginie, Atala, Picciola, etc. La littérature originale se compose de quelques tragédies enflées, de quelques odes emphatiques et de quelques histoires de la guerre de l’indépendance. Je ne parle pas des livres de théologie.

Les chants populaires publiés par M. Fauriel ont donné à croire à quelques lecteurs que tous les Grecs étaient inspirés, et que la poésie coulait à pleins bords dans ce beau pays. Mais il ne faut pas oublier qu’un bon nombre de ces chants soi-disant populaires ont été recueillis sur les albums des demoiselles de Smyrne. Plus d’un a été pensé en français et écrit en grec par un jeune raya qui avait fait ses classes. Les seuls chants originaux étaient les chants clephtiques, et la source en est tarie. La Grèce, telle qu’on la voit aujourd’hui, est un pays de prose.

Si le peuple n’est pas poëte, il est encore moins artiste. Tous les Grecs sans exception chantent faux et du nez ; ils n’ont ni le sentiment de la couleur, ni le sentiment de la forme ; ils ne sont ni peintres, ni architectes, ni statuaires. On peut avoir de l’esprit pour un million sans être artiste pour un sou.

Les voyageurs sont dûment avertis qu’ils ne trouveront pas dans le royaume une œuvre d’art signée d’un nom moderne, excepté, peut-être, quelques bâtisses agréables de M. Caftandji-Oglou.

Quant aux chefs-d’œuvre de l’antiquité, ils n’y sont pas innombrables. Toutes les peintures ont disparu, comme on peut le deviner ; les sculptures sont parties pour Rome au temps des Césars, pour Venise au temps de Morosini, pour l’Allemagne au temps de Gropius, pour l’Angleterre au temps de lord Elgin, pour la Russie au temps d’Orloff et sous la présidence de Capo d’Istria. On ne saura jamais tout ce que les Russes ont enlevé ou détruit dans l’Archipel à l’époque où ils s’en étaient rendus maîtres, et les archéologues athéniens parlent encore avec douleur des libéralités diplomatiques du président.

Ce qui reste à la Grèce de tous les ouvrages de ses sculpteurs, c’est la frise occidentale du Parthénon, les cinq cariatides du temple d’Érechthée, et des fragments : fragments de chefs-d’œuvre entassés avec des débris d’ouvrages médiocres.

Mais, si le statuaire a peu de chose à étudier en Grèce, l’architecte y trouve un monde. L’Acropole, c’est-à-dire la forteresse de la vieille Athènes, est encore un nid de chefs-d’œuvre. Quoi que vous ayez entendu dire à la louange du Parthénon, croyez-moi sur parole, on ne vous en a pas assez dit ; et l’immensité de l’édifice, la simplicité grandiose du plan, la beauté des matériaux, et, avant tout peut-être, la délicatesse fabuleuse de l’exécution, a de quoi surprendre l’œil le mieux averti et l’enthousiasme le mieux préparé.

Il n’entre pas dans le plan de ce livre de dépeindre les monuments de l’ancienne Athènes ; on en trouvera la description et l’histoire dans les ouvrages spéciaux, et surtout dans les deux volumes de M. Beulé, qui sont le dernier mot sur l’Acropole. J’aime mieux dire avec quel soin le peuple et le gouvernement conservent les antiquités.

Le gouvernement ne laisse rien perdre. Le soin des antiquités d’Athènes est confié au digne M. Pittakis, correspondant de l’Institut de France, et le plus honnête savant de son pays. M. Pittakis est né au pied de l’Acropole. Dès sa naissance, il aima d’instinct les monuments de sa patrie : enfant, il se glissait à l’Acropole et déchiffrait les inscriptions, sans tenir compte des sentinelles turques et des coups de pied qu’il recevait par derrière. Jeune homme, il fut de tous les combats et de tous les assauts ; le premier au feu, le premier sur la brèche, le premier dans l’Acropole, pour voir si l’on n’avait point brisé quelque colonne ou écorné quelque fronton. Vieillard, il se repose en courant d’un temple à l’autre et en protégeant comme un jaloux l’Acropole, ses amours.

Un poste d’invalides, antique et solennelle garnison, défend l’Acropole contre les mains dévorantes de ces touristes collectionneurs qui voyagent avec un marteau dans leur poche, et qui plaindraient l’argent qu’ils ont dépensé s’ils ne rapportaient pas le nez d’une statue pour l’ornement de leur château.

Le gouvernement interdit sévèrement le commerce et l’exportation des antiquités. Voilà tous les services qu’il rend à l’archéologie.

Les statues ou les fragments que l’on découvre sont entassés soit aux Propylées, sous la voûte du ciel, soit au temple de Thésée, sous un méchant toit. La ville n’a pas de musée. On conserve dans une petite mosquée, grande comme la main, les moulages de tous les marbres de lord Elgin. C’est l’Angleterre qui les a envoyés. Elle offrait l’an dernier de donner à la Grèce les plâtres de toutes les statues du musée britannique, à la condition qu’on bâtirait un musée. Le gouvernement se souvint qu’une souscription avait été ouverte à cet effet, il y a quelque quinze ans, et qu’on avait recueilli 30 000 drachmes, ou environ. On s’informa des commissaires, on en trouva quelques-uns, on découvrit même un peu d’argent ; mais les intérêts de la somme avaient disparu, entraînant dans leur fuite une bonne moitié du capital.

M. Typaldos, conservateur et fondateur de la bibliothèque d’Athènes, dont l’éloquence persuasive a quêté dans l’Europe soixante-dix mille volumes, fut reçu avec distinction à la cour du roi de Naples, et l’on promit, comme au temps des fées, de lui accorder le premier vœu qu’il exprimerait. Il demanda, pour la ville d’Athènes, un moulage du taureau Farnèse. Ce groupe énorme est caché dans un coin de la ville, je ne sais où. Qui sait s’il sera jamais déballé[4] ?

Il existe sur plusieurs points du territoire grec des tumulus où l’on serait sûr de trouver des antiquités. L’administration n’y fait point de fouilles. Plus d’une fois des particuliers ou même des gouvernements ont offert d’entreprendre les travaux, moyennant une part raisonnable dans les profits : toutes les offres ont été repoussées.

Le soubassement des Propylées tombe en ruine. M. Wise, ministre d’Angleterre en Grèce, a proposé de le faire réparer aux frais de son pays, si l’on voulait permettre que cette restauration fût signée du nom de l’Angleterre. Les Grecs ont refusé. Les Propylées s’écrouleront s’il le faut ; mais la vanité grecque ne sera pas humiliée[5].

Le commerce des objets d’art est interdit : ce n’est pas à dire que le gouvernement les achète. Il se contente de les confisquer. Le bel Antonio avait acheté des vases antiques pour 1500 drachmes : on lui a pris ses vases, mais sans lui rendre son argent. Qu’arrive-t-il ? Les courtiers se livrent à un commerce clandestin et cachent sous leur manteau toute leur marchandise. Si quelque marbre est trop grand ou trop pesant pour être transporté en cachette, ils le mettent en morceaux, et l’on débite une statue comme un mouton, pour la vendre.

Le petit peuple d’Italie témoigne un respect religieux pour les œuvres d’art qui font la richesse du pays. Le petit peuple de Grèce ne respecte rien. J’ai vu les bergers casser soigneusement les débris du temple de Phigalie, par curiosité pure, et pour voir si c’était du marbre ou de la pierre. Les chasseurs athéniens passent rarement auprès des rochers de Cologne sans décharger leur fusil sur la stèle de marbre qui couvre le tombeau d’Ottfried Müller. M. David d’Angers a donné à la ville de Missolonghi une admirable figure de jeune fille accroupie qui déchiffre au milieu des grandes herbes le nom presque effacé de Botzaris. Le vieux maître passait l’an dernier près de Missolonghi avant de revenir en France. Il ne put pas résister au désir de revoir une œuvre qu’il avait tendrement caressée. La population de Missolonghi vint au-devant du grand artiste qu’un hasard inespéré lui envoyait ; le dimarque et les principaux habitants de la ville lui adressèrent une grande lettre verbeuse. Mais la jeune vierge de marbre est mutilée par les coups de fusil.



  1. M. Mercier, ministre de France en Grèce, vient d’installer la légation dans la maison bâtie par Janthe, à gauche de la route de Patissia.
  2. Note de M. Guérin, consul de France à Syra. ― M. Guérin, après avoir pris part à l’expédition du maréchal Maison, est resté quelques années au service du gouvernement grec, et a contribué puisamment à l’organisation de l’armée.
  3. J’ai parlé trop tôt. En 1854, les irréguliers ont envahi irrégulièrement le territoire de la Turquie ; ils ont volé, tué, et commis des légèretés impardonnables. Voltaire l’a bien dit :
    On a du goût pour son premier métier.

    Le général Kalergi, premier ministre et principal adversaire du roi Othon, a licencié les irréguliers et s’occupe à refondre l’armée. Il serait plus simple de refondre le royaume. (Note de la 2e édition.)

  4. Ce groupe est en Grèce depuis quelques années. Il y a quelques mois que le roi de Naples a reçu les remercîments du gouvernement grec. (Note de la 2e édition.)
  5. Le gouvernement s’est piqué d’honneur : il vient de consolider le soubassement des Propylées. (Note de la 2e édition.)