La Fleur d’Or/Hymne au Père

La Fleur d’OrAlphonse Lemerre, éditeurvol. 3 (p. 101-103).


Hymne au Père


Nous pouvons comparer la
Divinité à un triangle dont les
trois côtés sont égaux.
Les Platoniciens.


I


Pure essence de tout, dont un nombre est l’emblème,
Combien de fois, type suprême,
Trouvas-tu ton bonheur à sortir de toi-même ?

Combien, après tes longs travaux,
Beau triangle mystique aux trois côtés égaux,
Es-tu rentre dans ton repos ?

Puissance, Amour, Sagesse, ô mouvant équilibre !
Accord triple qui toujours vibre !
Dans ses épanchements force incessante et libre !

Nos temps venus, sainte Unité,
Tu te développas selon ta volonté,
Et l’univers fut enfanté.


Belle œuvre harmonieuse en tout ce qu’elle enferme,
Où, comme la fleur à son germe.
Chaque être répondait à son principe et terme.

Pour l’être simple, mais complet,
Sans voile dans les cieux le triangle brillait,
Dans l’homme imprimant son reflet.

Crime ou faiblesse, un jour (Trinôme, grâce ! grâce !),
Amour, Sagesse, tout s’efface !…
Toi seul. Père indulgent, n’as point caché ta face.

II

 
Homme marqué du sceau fatal,
À présent suis la voie où t’a lancé le Mal,
Esprit boiteux, cœur inégal !

Des humaines erreurs va dérouler la trame.
Et, triste de ton propre blâme.
Tâche par le savoir de refaire ton âme.

Ô labeur toujours avorté !
Entrevoir l’astre pur toujours d’un seul côté.
amais toute la vérité !

Pèlerin vague, errer de système en système,
Et, l’œil louche, la face bléme,
Etudier le monde et soi comme un problème !

 
Seigneur, il est long, le détour
Qui doit ramener l’homme à son premier séjour,
Jardin de candeur et d’amour.

Sur sa route pourtant vous lui versiez la manne.
Et celui qui de vous émane.
Père, vint racheter ce captif d’Arimane,

Et Lui, l’Esprit, l’ardent Milieu,
Sur ce front autrefois illuminé par Dieu
Descendit en langues de feu.

III

 
Ainsi, marchant vers vous, Sagesse, Amour, Puissance,
Sous l’arbre vert de sa naissance
L’homme un jour s’assoira fort d’une autre innocence.

Le théâtre de son labeur.
Ce monde, il le rendra baigné de sa sueur.
Changé, mais comme lui meilleur.

Et toi, triple clarté, que nul œil n’a sondée,
Mais que tous voyaient en idée,
Des dòl-mens de la Gaule aux autels de Judée,

Dans ton éclat primordial.
Tu brilleras encor sur ton ciel de cristal,
Beau triangle équilatéral !