La Descendance de l’homme et la sélection sexuelle/15
CHAPITRE XV
Nous avons à examiner, dans ce chapitre, pourquoi, chez beaucoup d’espèces d’oiseaux, la femelle n’a pas acquis les mêmes ornements que le mâle ; et pourquoi, chez beaucoup d’autres, les deux sexes sont également ou presque également ornés ? Dans le chapitre suivant nous étudierons les quelques cas où la femelle est plus brillamment colorée que le mâle.
Je me suis borné à indiquer, dans l’Origine des espèces[1], que la longue queue du paon et que la couleur noire si apparente du grand tétras mâle, seraient l’une incommode, l’autre dangereuse pour les femelles pendant la période de l’incubation ; j’en ai tiré la conséquence que la sélection naturelle était intervenue pour s’opposer à la transmission de ces caractères de la descendance mâle à la descendance femelle. Je crois encore que cette cause a agi dans quelques cas assez rares d’ailleurs ; mais, après avoir mûrement réfléchi à tous les faits que j’ai pu rassembler, je suis maintenant disposé à croire que, lorsque les mâles et les femelles diffèrent, c’est que la transmission des variations successives a été, dès le principe, limitée au sexe chez lequel ces variations se sont produites d’abord. Depuis la publication de mes observations, M. Wallace[2] a discuté dans plusieurs mémoires d’un haut intérêt la question de la coloration sexuelle. M. Wallace admet que, dans presque tous les cas, les variations successives ont tendu d’abord à se transmettre également aux deux sexes, mais que la sélection naturelle a soustrait la femelle au danger qu’elle aurait couru pendant l’incubation si elle avait revêtu les couleurs éclatantes du mâle.
Cette hypothèse nécessite une laborieuse discussion sur un point difficile à élucider : la sélection naturelle peut-elle subséquemment limiter à un sexe seul la transmission d’un caractère, d’abord héréditaire chez les deux sexes ? Ainsi que nous l’avons démontré dans le chapitre préliminaire sur la sélection sexuelle, les caractères développés chez un seul sexe existent toujours à l’état latent chez l’autre. Un exemple imaginaire peut nous aider à comprendre quelles difficultés présente cette question. Supposons qu’un éleveur désire créer une race de pigeons dont les mâles seuls auraient une coloration bleu clair, tandis que les femelles conserveraient leur ancienne teinte ardoisée. Les caractères de toute espèce se transmettent d’ordinaire chez le pigeon également aux deux sexes ; l’éleveur devra donc chercher à convertir cette forme d’hérédité en une transmission limitée sexuellement. Tout ce qu’il pourra faire sera de choisir dans chaque génération successive un pigeon mâle bleu aussi clair que possible ; s’il procède ainsi pendant fort longtemps et que la variation bleu clair soit fortement héréditaire et se présente souvent, le résultat naturel obtenu sera de donner à toute la race une couleur bleue plus claire. Mais l’éleveur qui tient à conserver la couleur ardoisée des femelles sera obligé d’accoupler, génération après génération, ses mâles bleu clair avec des femelles à coloration ardoisée. Il en résulterait la production, soit d’une race métis couleur pie, soit, probablement, la perte rapide et complète de la couleur bleu pâle, car la teinte ardoisée primitive se transmettrait sans aucun doute avec une force prépondérante. Supposons toutefois que, dans chaque génération successive, on obtienne quelques mâles bleu clair et quelques femelles ardoisées, et qu’on les accouple toujours ensemble ; les femelles ardoisées auraient alors beaucoup de sang bleu dans les veines, si j’ose me servir de cette expression, car leurs pères, leurs grands-pères, etc., auraient tous été des oiseaux bleus. Dans ces conditions, il est concevable (bien que je ne connaisse pas de faits positifs qui rendent la chose probable) que les femelles ardoisées puissent acquérir une tendance latente à la coloration claire, assez forte pour ne pas la détruire chez leurs descendants mâles, tandis que leurs descendants femelles continueraient à hériter de la teinte ardoisée. S’il en était ainsi, on pourrait atteindre le but désiré, c’est-à-dire créer une race dont les deux sexes différeraient d’une manière permanente au point de vue de la couleur.
L’exemple suivant fera mieux comprendre l’importance extrême, ou plutôt la nécessité, que le caractère cherché dans la supposition qui précède, à savoir la coloration bleu clair, soit présent chez la femelle à l’état latent afin que la descendance ne s’altère pas. La queue du faisan Sœmmerring mâle a 940 millimètres de longueur, celle de la femelle n’a que 20 centimètres ; la queue du faisan commun mâle a environ 50 centimètres de longueur, et celle de la femelle 304 millimètres. Or, si on croisait un faisan Sœmmerring femelle, à courte queue, avec un mâle de l’espèce commune, le descendant mâle hybride aurait, sans aucun doute, une queue beaucoup plus longue qu’un descendant pur du faisan commun. Si la femelle du faisan commun, au contraire, avec sa queue beaucoup plus longue que celle de la femelle de l’espèce Sœmmerring se croisait avec un mâle de cette dernière espèce, l’hybride mâle produit aurait une queue beaucoup plus courte qu’un descendant pur du faisan Sœmmerring[3].
Notre éleveur, pour donner aux mâles de sa race nouvelle une teinte bleu clair bien déterminée, sans modifier les femelles, aurait à opérer sur les mâles une sélection continue pendant de nombreuses générations ; chaque degré de nuance claire devant être fixé chez les mâles et rendu latent chez les femelles. Ce serait une tâche difficile, qui n’a jamais été tentée, mais qui pourrait réussir. L’obstacle principal serait la perte précoce et complète de la nuance bleu clair, résultant de la nécessité de croisements répétés avec la femelle ardoisée ; car celle-ci n’offrirait dans le commencement aucune tendance latente à produire des descendants bleu clair.
D’autre part, si de légères variations tendant à affecter le caractère de leur coloration venaient à surgir chez certains mâles, et que ces variations fussent dès le principe limitées dans leur transmission au sexe mâle, la production de la race cherchée deviendrait facile, car il suffirait simplement de choisir ces mâles et de les accoupler avec des femelles ordinaires. Un cas analogue s’est présenté, car il existe en Belgique[4] certaines races de pigeons chez lesquelles les mâles seuls portent des raies noires. M. Tegetmeier[5] a récemment démontré que les dragons produisent assez fréquemment des petits argentés, presque toujours des femelles ; il a élevé dix de ces femelles argentées. Il est très-rare, au contraire, qu’il y ait un mâle argenté. De sorte qu’il n’y aurait rien de plus facile que de produire une race de pigeons dragons dont les mâles seraient bleus et les femelles argentées. Cette tendance est si forte que, quand M. Tegetmeier parvint enfin à se procurer un mâle argenté, il l’accoupla avec une femelle de la même couleur, espérant produire une race dont les deux sexes seraient argentés ; toutefois il fut désappointé, car le jeune mâle revêtit la couleur bleue de son grand-père et la jeune femelle seule fut argentée. Sans doute on pourrait, avec beaucoup de patience, vaincre cette tendance au retour chez les mâles provenant d’un couple argenté, et se procurer une race chez laquelle les deux sexes affecteraient la même couleur ; d’ailleurs, M. Esquilant a obtenu ce résultat pour les pigeons Turbits argentés.
Chez les gallinacés, des variations de couleur limitées au sexe mâle dans leur transmission se présentent assez fréquemment. Mais, alors même que cette forme d’hérédité prévaut, il peut arriver que quelques-uns des caractères successivement atteints dans le cours de la variation se transmettent à la femelle ; celle-ci, dans ce cas, ressemblerait un peu au mâle, ce qu’on peut observer chez quelques races gallines. Ou bien encore, presque tous les degrés successivement parcourus se transmettent inégalement aux deux sexes ; la femelle ressemble alors davantage au mâle. Il est probable que cette transmission inégale est cause que le pigeon grosse-gorge mâle a le jabot un peu plus gros, et le pigeon-messager mâle des caroncules plus développées que ces parties ne le sont chez leurs femelles respectives ; car les éleveurs n’ont pas soumis à la sélection un sexe plutôt que l’autre, et n’ont jamais eu le désir que ces caractères fussent plus prononcés chez le mâle que chez la femelle ; c’est cependant ce qui est arrivé chez ces deux races.
Il faudrait suivre le même procédé et surmonter les mêmes difficultés pour arriver à créer une race où les femelles seules présenteraient une nouvelle couleur.
Enfin, l’éleveur pourrait vouloir créer une race chez laquelle les deux sexes différeraient l’un de l’autre, et tous deux de l’espèce parente. Dans ce cas la difficulté serait extrême, à moins que les variations successives ne fussent dès l’abord sexuellement limitées des deux côtés. Les races gallines nous fournissent un exemple de ce fait ; ainsi, les deux sexes de la race pointillée de Hambourg diffèrent beaucoup l’un de l’autre, outre qu’ils diffèrent considérablement aussi des deux sexes de l’espèce originelle, le gallus bankiva ; une sélection continue permet actuellement de conserver chez chacun d’eux le nouveau type parfait, ce qui serait impossible si la transmission de leurs caractères distinctifs ne se trouvait pas limitée. La race espagnole offre un exemple plus curieux encore ; le mâle porte une énorme crête, mais il paraît que quelques-unes des variations successives, dont elle représente l’accumulation totale, ont été transmises aux femelles qui sont pourvues d’une crête beaucoup plus considérable que celle de la poule de l’espèce parente. Or la crête de la femelle diffère de celle du mâle en ce qu’elle est sujette à s’incliner ; la fantaisie des éleveurs ayant récemment exigé qu’il en fût désormais ainsi, on a promptement obtenu ce résultat. Cette inclinaison particulière de la crête doit être sexuellement limitée dans sa transmission, car, autrement, elle serait un obstacle à ce que celle du mâle restât parfaitement droite, ce qui, pour les éleveurs, constitue la suprême élégance du coq espagnol. D’autre part, il faut que la rectitude de la crête chez le mâle soit aussi un caractère limité à ce sexe, car autrement il s’opposerait à ce qu’elle s’inclinât chez la poule.
Les exemples précédents nous prouvent que, en admettant qu’on puisse disposer d’un temps presque infini, il serait extrêmement difficile, peut-être même impossible, de transformer, au moyen de la sélection, une forme de transmission en une autre. Par conséquent, sans preuves absolues dans chaque cas, je serais peu disposé à admettre que ce changement ait été réalisé chez les espèces naturelles. D’autre part, à l’aide de variations successives, dont la transmission serait limitée dès le principe par le sexe, on amènerait facilement un oiseau mâle à différer complètement de la femelle au point de vue de la couleur ou de tout autre caractère ; la femelle, au contraire, resterait intacte ou ne subirait que quelques modifications insignifiantes, ou enfin se modifierait spécialement en vue de sa propre protection.
Les vives couleurs sont utiles aux mâles constamment rivaux ; elles deviennent donc l’objet d’une sélection, qu’elles se transmettent ou non exclusivement au même sexe. Il est, par conséquent, tout naturel que les femelles participent souvent, dans une mesure plus ou moins grande, à l’éclat des mâles ; c’est ce qu’on peut observer chez une foule d’espèces. Si toutes les variations successives se transmettaient également aux deux sexes, on ne pourrait pas distinguer les femelles des mâles ; c’est aussi ce qu’on observe chez beaucoup d’oiseaux. Toutefois, si les couleurs sombres avaient une grande importance pour la sécurité de la femelle pendant l’incubation, comme chez plusieurs espèces terrestres, les femelles exposées à des variations qui tendraient à augmenter leur éclat, ou qui seraient trop aptes à recevoir du mâle, par hérédité, des couleurs beaucoup plus brillantes, disparaîtraient tôt ou tard. Une modification de la forme de l’hérédité devrait donc éliminer, chez les mâles, la tendance à transmettre indéfiniment leur propre éclat à leur descendance femelle ; ce qui, comme le prouvent les exemples que nous venons de citer, est extrêmement difficile. Il est donc probable que la destruction longtemps continuée des femelles plus brillamment colorées, en supposant l’existence d’une égale transmission des caractères, amènerait l’amoindrissement ou l’annulation des teintes brillantes chez les mâles, par suite de leurs croisements perpétuels avec des femelles plus sombres. Il serait superflu de chercher à déduire tous les autres résultats possibles ; mais je crois devoir rappeler au lecteur que, si des variations tendant à un plus grand éclat et limitées sexuellement se présentaient chez les femelles, en admettant même que ces variations ne leur fussent pas nuisibles, et ne fussent par conséquent pas éliminées, la sélection cependant n’interviendrait pas pour perpétuer ces variations, car le mâle accepte ordinairement la première femelle venue, sans s’inquiéter de choisir la plus attrayante. Par conséquent, ces variations tendraient à disparaître et n’auraient pas beaucoup d’influence sur le caractère de la race ; ceci contribue à expliquer pourquoi les femelles ont généralement des couleurs moins brillantes que les mâles.
Nous avons, dans le huitième chapitre, cité de nombreux exemples auxquels nous aurions pu en ajouter beaucoup d’autres, relativement à des variations survenant à divers âges et héréditaires à l’âge correspondant. Nous avons aussi démontré que les variations qui surgissent à une époque tardive de la vie se transmettent ordinairement aux individus appartenant au même sexe que ceux chez lesquels ces variations ont primitivement apparu ; les variations à un âge précoce sont, au contraire, transmissibles aux deux sexes, sans cependant qu’on puisse ainsi expliquer tous les cas de transmission limitée sexuellement. Nous avons démontré, en outre, que si un oiseau mâle venait à varier dans le sens d’un plus grand éclat pendant sa jeunesse, cette variation ne constituerait pour lui aucun avantage avant qu’il ait atteint l’âge de puberté, et qu’il ait à lutter avec les autres mâles ses rivaux. Mais, quand il s’agit d’oiseaux vivant sur le sol, et qui ont ordinairement besoin de la protection que leur assurent les couleurs sombres, des teintes brillantes constitueraient un danger bien plus grand pour les jeunes inexpérimentés que pour les mâles adultes. En conséquence, les mâles qui varieraient de façon à revêtir des couleurs plus brillantes pendant la première jeunesse, courraient le risque d’être détruits en nombre considérable, et la sélection naturelle se chargerait de les éliminer ; les mâles, au contraire, qui varieraient dans le même sens, mais au moment de la maturité, pourraient survivre, bien que toujours exposés à quelques dangers additionnels, et, favorisés par la sélection sexuelle, ils tendraient à propager leur type. Il existe souvent un rapport entre la période de la variation et la forme de la transmission ; il en résulte donc que, si les jeunes mâles brillants étaient éliminés et les mâles adultes brillants préférés par les femelles, les mâles seuls pourraient acquérir des couleurs éclatantes et les transmettre exclusivement à leurs descendants mâles. Je ne prétends toutefois pas affirmer que l’influence de l’âge sur la forme de la transmission soit la seule cause de la grande différence d’éclat qui existe entre les mâles et les femelles chez beaucoup d’oiseaux.
Il est intéressant de déterminer, quand on se trouve en présence d’une espèce où les mâles et les femelles diffèrent au point de vue de la couleur, si la sélection sexuelle a modifié les mâles seuls, sans que ce mode d’action ait produit beaucoup d’effet sur les femelles, ou si la sélection naturelle a spécialement modifié les femelles dans un but de sécurité individuelle. Je discuterai donc cette question plus longuement peut-être que ne le comporte sa valeur intrinsèque ; cette discussion nous permettra d’ailleurs d’examiner quelques points collatéraux curieux.
Avant d’aborder le sujet de la coloration, plus particulièrement au point de vue des conclusions de M. Wallace, il peut être utile de discuter au même point de vue quelques autres différences entre les sexes. On a constaté autrefois en Allemagne[6] l’existence d’une race de volailles dont les poules étaient munies d’ergots ; ces poules étaient bonnes pondeuses, mais elles bouleversaient tellement leurs nids avec ces appendices, qu’on était obligé de leur interdire l’incubation de leurs propres œufs. J’en conclus tout d’abord que la sélection naturelle a arrêté le développement des ergots chez les femelles des gallinacés sauvages, en conséquence des dommages qu’ils faisaient subir au nid. Cela me paraissait d’autant plus probable, que les ergots des ailes, qui ne peuvent nuire pendant l’incubation, sont souvent aussi bien développés chez la femelle que chez le mâle, quoiqu’ils soient généralement un peu plus forts chez ce dernier. Lorsque le mâle porte des ergots aux pattes, la femelle en présente presque toujours des traces rudimentaires qui peuvent quelquefois ne consister qu’en une simple écaille, comme chez les espèces de Gallus. On pourrait conclure de ces faits que les femelles ont été primitivement armées d’ergots bien développés, et qu’elles les ont ultérieurement perdus par défaut d’usage ou par suite de l’intervention de la sélection naturelle. Mais, si on admet cette hypothèse, il devient nécessaire de l’appliquer à une foule d’autres cas, et elle implique que les ancêtres femelles des espèces actuellement armées d’ergots étaient autrefois embarrassés d’un appendice nuisible.
Les femelles de quelques genres et de quelques espèces, comme le Galloperdix, l’Acomus et la paon de Java (P. muticus), possèdent, comme les mâles, des ergots bien développés. Devons-nous conclure de là que, contrairement à leurs alliés les plus proches, les femelles appartenant à ces espèces construisent des nids d’un genre différent et de nature telle qu’ils ne puissent être endommagés par les ergots, de telle sorte que la suppression de ceux-ci soit devenue inutile ? Ou devons-nous supposer que ces femelles ont spécialement besoin d’ergots pour se défendre ? Il me semble plus probable que la présence ou l’absence d’ergots chez les femelles résulte de ce que différentes lois d’hérédité ont prévalu, indépendamment de l’intervention de la sélection naturelle. Chez les nombreuses femelles où les ergots existent à l’état rudimentaire, nous devons conclure que quelques-unes seulement des variations successives, qui ont amené leur développement chez les mâles, se sont produites à un âge peu avancé, et ont, en conséquence, été transmises aux femelles. Dans les autres cas beaucoup plus rares où les femelles possèdent des ergots bien développée, nous pouvons conclure que toutes les variations successives leur ont été transmises, et qu’elles ont graduellement acquis l’habitude héréditaire de ne pas endommager leurs nids.
Les organes vocaux et les plumes diversement modifiées dans le but de produire des sons, ainsi que l’instinct de s’en servir, diffèrent souvent chez les deux sexes, mais quelquefois aussi ils sont semblables. Peut-on expliquer ces différences par le fait que les mâles ont acquis ces organes et ces instincts, tandis que les femelles n’en ont pas hérité à cause des dangers auxquels elles se seraient exposées en attirant sur elles l’attention des animaux féroces et des oiseaux de proie ? Ceci me paraît peu probable, si nous songeons à la foule d’oiseaux qui, pendant le printemps[7], font avec impunité retentir l’air de leurs voix joyeuses et bruyantes. On pourrait conclure avec plus de certitude que les organes vocaux et instrumentaux n’ont d’utilité spéciale que pour les mâles pendant la saison des amours, et que, par conséquent, la sélection sexuelle et l’usage continu les ont développés chez ce sexe seul, — la transmission des variations successives et des effets de l’usage se trouvant, dans ce cas, plus ou moins limitée dès le principe à la seule descendance mâle.
On pourrait signaler de nombreux cas analogues ; ainsi, les plumes de la tête, généralement plus longues chez le mâle que chez la femelle, ou qui sont quelquefois égales chez les deux sexes, ou qui font absolument défaut chez les femelles, — ces divers états se rencontrent parfois dans un même groupe d’oiseaux. Il serait difficile, pour expliquer une différence de cette nature entre les mâles et les femelles, d’invoquer le principe d’un avantage résultant pour la femelle de la possession d’une crête plus petite que celle du mâle et de soutenir qu’en conséquence la sélection naturelle a déterminé chez elle la réduction ou la suppression complète de la crête. Mais examinons un autre cas : la longueur de la queue. L’allongement que présente cet appendice chez le paon mâle eût non seulement gêné la femelle pendant l’incubation et lorsqu’elle accompagne ses petits, mais eût encore constitué un danger pour elle. Il n’y a donc pas, à priori, la moindre improbabilité que la sélection naturelle soit intervenue pour arrêter chez elle le développement de sa queue. Mais plusieurs faisans femelles, qui, dans leurs nids ouverts, courent au moins autant de dangers que la paonne, ont une queue qui atteint une longueur considérable. Les femelles aussi bien que les mâles du Menura superba ont une longue queue ; elles construisent un nid à dôme, ce qui est une anomalie pour un aussi grand oiseau. Les naturalistes se sont demandé avec étonnement comment la Menura femelle pouvait couver avec sa queue ; mais on sait maintenant[8] « qu’elle pénètre dans son nid la tête la première, puisqu’elle se retourne en relevant quelquefois sa queue sur son dos, mais le plus souvent en la courbant sur le côté. Aussi avec le temps la queue devient tout à fait oblique et le degré d’obliquité indique assez approximativement le temps pendant lequel l’oiseau a couvé. » Les deux sexes d’un martin-pêcheur australien (Tanysiptera sylvia) ont les rectrices médianes très-allongées ; la femelle fait son nid dans un trou : aussi, ces plumes, d’après M. W. B. Sharpe, sont-elles toutes froissées pendant l’incubation.
Dans ces deux cas, la grande longueur des rectrices doit, dans une certaine mesure, gêner la femelle ; chez les deux espèces, il est vrai, elles sont, chez la femelle, un peu plus courtes que chez le mâle ; on pourrait donc en conclure que l’intervention de la sélection naturelle a empêché leur complet développement. Mais, si le développement de la queue de la paonne n’avait été arrêté qu’au moment où sa longueur devenait encombrante ou dangereuse, elle serait bien plus allongée qu’elle ne l’est réellement, car elle est loin d’avoir, relativement à la grosseur du corps de l’oiseau, la longueur qu’elle atteint chez beaucoup de faisanes, et elle n’est pas plus longue que celle de la dinde. En outre, il faut se rappeler que, si l’on admet que le développement de la queue de la paonne, devenue dangereusement longue, a été arrêté par l’intervention de la sélection naturelle, il faut admettre aussi que la même cause aurait constamment réagi sur sa descendance mâle et empêché le paon d’acquérir l’ornement splendide qu’il possède actuellement. Nous pouvons donc conclure que la longueur de la queue du paon et son peu de développement chez la femelle proviennent de ce que les variations qui ont amené le développement de cet appendice chez le mâle ont été, dès l’origine, transmises à la seule descendance mâle.
Nous sommes amenés à conclure de façon à peu près analogue, quand il s’agit de la longueur de la queue chez les diverses espèces de faisans. Chez une d’elles (Crossoptilon auritum), la queue atteint la même longueur chez les deux sexes, soit quarante ou quarante-deux centimètres ; chez le faisan commun, elle atteint une longueur de cinquante centimètres chez le mâle et de trente centimètres chez la femelle ; chez le faisan de Sœmmerring, elle a quatre-vingt-deux centimètres chez le mâle, et vingt centimètres seulement chez la femelle ; enfin, chez le faisan Reeve, elle atteint quelquefois lm,80 chez le mâle, et quarante centimètres chez la femelle. Ainsi, chez ces différentes espèces, la queue de la femelle varie beaucoup en longueur, indépendamment de celle du mâle ; or, il me semble que ces différences peuvent s’expliquer, avec beaucoup plus de probabilité, par les lois de l’hérédité, c’est-à-dire par le fait que, dès l’origine, les variations successives ont été plus ou moins étroitement limitées dans leur transmission au sexe mâle, que par l’action de la sélection naturelle, qui serait intervenue parce qu’une longue queue aurait été plus ou moins nuisible aux femelles des diverses espèces.
Nous pouvons maintenant aborder l’examen des arguments de M. Wallace relativement à la coloration sexuelle des oiseaux. M. Wallace croit que les brillantes couleurs des mâles, originellement acquises grâce à l’intervention de la sélection sexuelle, se seraient transmises dans tous ou dans presque tous les cas aux femelles, si la sélection naturelle n’était intervenue pour s’opposer à cette transmission. Je dois rappeler au lecteur que nous avons déjà signalé divers faits contraires à cette hypothèse, en étudiant les reptiles, les amphibies, les poissons et les lépidoptères. M. Wallace fait reposer sa théorie principalement, mais non pas exclusivement, comme nous le verrons dans le prochain chapitre, sur le fait suivant[9] : lorsque les deux sexes affectent des couleurs très-vives et très-voyantes, le nid est conformé de façon à dissimuler l’oiseau pendant l’incubation ; au contraire, lorsqu’il existe un contraste marqué entre les mâles et les femelles, c’est-à-dire que le mâle est brillant et que la femelle est de couleur terne, le nid est ouvert et permet de voir la couveuse. Cette coïncidence confirme certainement, dans une certaine mesure, l’hypothèse en vertu de laquelle les femelles qui couvent à découvert ont été spécialement modifiées en vue de leur sécurité. Mais nous allons voir tout à l’heure qu’on peut invoquer une autre explication beaucoup plus probable, c’est-à-dire que les femelles voyantes ont acquis l’instinct de construire des nids à dôme beaucoup plus souvent que les femelles affectant des teintes sombres. M. Wallace admet que, comme on pouvait s’y attendre, ces deux règles souffrent quelques exceptions ; mais ces exceptions sont-elles assez nombreuses pour infirmer sérieusement les règles ? Telle est la question.
Tout d’abord le duc d’Argyll fait remarquer avec beaucoup de raison qu’un ennemi[10] surtout quand cet ennemi est un animal carnassier qui hante les arbres, doit apercevoir plus facilement un grand nid surmonté d’un dôme qu’un nid plus petit et découvert. Nous ne devons pas oublier non plus que, chez beaucoup d’oiseaux qui construisent des nids ouverts, les mâles comme les femelles couvent les œufs à tour de rôle et contribuent à la nourriture des jeunes ; le Pyranga æstiva[11], par exemple, un des oiseaux les plus splendides des États-Unis ; le mâle est couleur vermillon et la femelle d’un vert clair légèrement brunâtre. Or, si les couleurs vives avaient constitué un grand danger pour les oiseaux posés sur un nid découvert, les mâles auraient eu, dans ces cas, beaucoup à souffrir. Il pourrait se faire cependant qu’il fût d’une importance telle pour le mâle d’être brillamment orné afin de pouvoir vaincre ses rivaux, que cette circonstance fût plus que suffisante pour compenser le danger additionnel auquel l’expose sa plus grande beauté.
M. Wallace admet que les dicrurus, les orioles et les pittidés femelles, bien que colorées d’une manière voyante, construisent des nids découverts ; mais il insiste sur ce fait que les oiseaux du premier groupe sont très-belliqueux et capables de se défendre ; que ceux du second groupe prennent grand soin de dissimuler leurs nids ouverts, mais ceci n’est pas toujours exact[12] ; enfin, que, chez ceux du troisième groupe, les couleurs vives des femelles se trouvent à la partie inférieure de leur corps. Outre ces cas, on doit signaler la grande famille des pigeons, souvent colorés très-brillamment et presque toujours d’une manière très-voyante, et qui sont, on le sait, très-exposés aux attaques des oiseaux de proie ; or, les pigeons constituent une exception sérieuse à la règle, car ils construisent presque toujours des nids ouverts et exposés. En outre, les oiseaux-mouches appartenant à toutes les espèces construisent des nids découverts, bien que, chez quelques-unes des espèces les plus splendides, les mâles et les femelles soient semblables, et que, dans la grande majorité des cas, quoique moins brillantes que les mâles, les femelles n’en sont pas moins très-vivement colorées. On ne saurait non plus prétendre que tous les oiseaux-mouches femelles affectant de vives couleurs échappent à la vue de leurs ennemis parce qu’elles ont des teintes vertes, car il y en a plusieurs qui ont la partie supérieure du plumage rouge, bleu et d’autres couleurs[13].
M. Wallace fait observer avec beaucoup de raison que la construction des nids dans des cavités ou sous forme de dôme offre aux oiseaux, outre l’avantage de les cacher aux regards, plusieurs autres commodités, telles qu’un abri contre la pluie ou contre le froid, et, dans les pays tropicaux, une protection contre les rayons du soleil[14] ; en conséquence, on ne peut guère objecter à l’hypothèse qu’il soutient que beaucoup d’espèces où les individus des deux sexes ne portent que des teintes obscures construisent des nids cachés[15]. Les calaos femelles (Buceros) de l’Inde et de l’Afrique se protègent avec le plus grand soin pendant l’incubation, car elles cimentent avec leurs excréments l’ouverture extérieure de la cavité où la femelle repose sur ses œufs, en n’y ménageant qu’un petit orifice par lequel le mâle lui passe des aliments ; elle reste donc captive pendant toute la durée de l’incubation[16] ; et, cependant, les calaos femelles n’affectent pas des couleurs plus voyantes que beaucoup d’autres oiseaux de la même taille dont les nids sont à découvert. On peut faire à M. Wallace une objection plus sérieuse, qu’il admet d’ailleurs lui-même : dans quelques groupes où les mâles affectent des couleurs brillantes et les femelles des teintes sombres, ces dernières couvent cependant dans des nids à dôme ; ainsi, par exemple, les grallines d’Australie, les superbes malurides du même pays, les nectarinées et plusieurs méliphagides australiens[17].
Si nous considérons les oiseaux de l’Angleterre, nous voyons qu’il n’existe aucune relation intime et générale entre les couleurs de la femelle et le genre de nid qu’elle construit. Il y en a environ une quarantaine (à part les grandes espèces capables de se défendre) qui nichent dans les cavités des terrasses, des rochers, des arbres, ou qui construisent des nids à dôme. Si nous prenons comme types du degré d’apparence qui n’expose pas trop la femelle quand elle couve, les couleurs des femelles du chardonneret, du bouvreuil ou du merle, sur les quarante oiseaux dont nous avons parlé, il n’y en a que douze à peine qu’on puisse considérer comme apparents à un degré dangereux, les vingt-huit autres le sont peu[18]. Il n’existe pas non plus de rapport intime entre une différence bien marquée de couleur, entre les mâles et les femelles et le genre de nid construit. Ainsi le moineau ordinaire mâle (Passer domesticus) diffère beaucoup de la femelle ; le moineau mâle des arbres (P. montanus) en diffère à peine, et cependant tous deux construisent des nids bien cachés. Les deux sexes du gobe-mouche commun (Muscicapa griseola) peuvent à peine se distinguer l’un de l’autre, tandis que ceux du M. luctuosa différent beaucoup ; or tous deux font leur nid dans des trous ou le dissimulent avec soin, La femelle du merle (Turdus merula) diffère beaucoup, celle du merle à plastron (T. torquatus) moins, et la femelle de la grive commune (T. musicus) presque pas de leurs mâles respectifs, et toutes construisent des nids ouverts. D’autre part, le merle d’eau (Cinclus aquaticus), qui se rapproche de ces espèces, construit un nid à dôme, les sexes différant à peu près autant que dans le T. torquatus. Le grouse noir et le grouse rouge (Tetrao tetrix et T. scoticus) construisent des nids ouverts sur des points également bien cachés, mais les sexes diffèrent beaucoup chez une espèce et très-peu chez l’autre.
Malgré les considérations qui précèdent, la lecture du savant mémoire de M. Wallace entraîne la conviction que, si on considère l’ensemble des oiseaux du monde, la grande majorité des espèces dont les femelles affectent des couleurs brillantes, et dans ce cas les mâles sont, à peu d’exceptions près, également brillants, construisent des nids cachés pour plus de sécurité. M. Wallace cite[19] une longue liste des groupes où cette règle s’applique ; il nous suffira de citer ici les groupes suivants qui nous sont les plus familiers ; les martins-pêcheurs, les toucans, les trogons, les capitonides, les musophages, les pies et les perroquets. M. Wallace croit que les mâles de ces divers groupes ont graduellement acquis leurs vives couleurs grâce à l’intervention de la sélection sexuelle et les ont transmises aux femelles ; la sélection naturelle ne les a pas éliminées chez ces dernières, par suite de la sécurité que leur assurait déjà le mode de nidification. En vertu de cette théorie, les femelles avaient, avant de revêtir de vives couleurs, adopté un mode particulier pour la construction de leur nid. Il me semble plus probable que, dans la plupart des cas, les femelles, à mesure qu’elles devenaient plus brillantes en revêtant graduellement les belles couleurs du mâle, ont dû peu à peu modifier leurs instincts (en supposant qu’elles aient primitivement construit des nids ouverts) et chercher à se protéger davantage en recouvrant leurs nids au moyen d’un dôme ou en les dissimulant avec soin. Quiconque a lu attentivement, par exemple, les remarques que fait Audubon sur les différences que présentent les nids d’une même espèce, selon que cette espèce habite le nord ou le sud des États-Unis[20], ne peut éprouver aucune difficulté à admettre que les oiseaux ont pu être facilement amenés à modifier la construction de leurs nids, soit par un changement de leurs habitudes dans le sens rigoureux du mot, soit par la sélection naturelle des prétendues variations spontanées de l’instinct.
Cette hypothèse sur les rapports qui existent entre la coloration brillante des oiseaux femelles et le mode de nidification, se trouve confirmée par certains cas analogues qu’on observe dans le désert du Sahara. Là, comme dans la plupart des déserts, la coloration des oiseaux et de beaucoup d’autres animaux s’adapte admirablement aux teintes de la surface environnante. On remarque cependant, d’après le Rév. Tristram, quelques curieuses exceptions à la règle ; ainsi le Monticola cyanea mâle affecte une vive coloration bleue, et la femelle, au plumage pommelé de brun et de blanc, est presque aussi remarquable que lui ; les mâles et les femelles de deux espèces de Dromolæa sont noir brillant. La coloration de ces trois espèces d’oiseaux ne constitue assurément pas une protection ; ils survivent cependant parce qu’ils ont l’habitude, en présence du moindre danger, de se réfugier dans des trous ou dans des crevasses de rochers.
Quant aux groupes d’oiseaux dont nous venons de parler, groupes chez lesquels les femelles affectent de brillantes couleurs et construisent des nids cachés, il n’est pas nécessaire de supposer que l’instinct nidificateur de chaque espèce distincte ait été spécialement modifié ; il suffit d’admettre que les premiers ancêtres de chaque groupe ont été peu à peu conduits à construire des nids cachés ou abrités par un dôme, et ont ensuite transmis cet instinct à leurs descendants modifiés en même temps qu’ils leur transmettaient leurs vives couleurs. Cette conclusion, autant toutefois qu’on peut s’y fier, présente un vif intérêt, car elle tend à prouver que la sélection sexuelle, jointe à une hérédité égale ou presque égale chez les deux sexes, a indirectement déterminé le mode de nidification de groupes entiers d’oiseaux.
Chez les groupes même où, d’après M. Wallace, la sélection naturelle n’a pas éliminé les vives couleurs des femelles, parce qu’elles étaient protégées pendant l’incubation, on remarque souvent des différences légères entre les mâles et les femelles, et il arrive parfois que ces différences prennent une importance considérable. Ce fait est significatif, car nous ne pouvons attribuer ces différences de couleur qu’au principe en vertu duquel quelques-unes des variations des mâles ont été, dès l’abord, limitées dans leur transmission à ce sexe ; car on ne pourrait affirmer que ces différences, surtout lorsqu’elles sont légères, puissent constituer une protection pour les femelles. Ainsi toutes les espèces du groupe splendide des trogons construisent leurs nids dans des trous ; or, si nous examinons, dans l’ouvrage de M. Gould[21], les figures représentant les individus des deux sexes des vingt-cinq espèces de ce groupe, nous verrons que, sauf une exception, la coloration chez les deux sexes diffère quelquefois un peu, quelquefois beaucoup, et que les mâles sont toujours plus brillants que les femelles, bien que ces dernières soient déjà fort belles. Toutes les espèces de martins-pêcheurs construisent leurs nids dans des trous, et, chez la plupart des espèces, les mâles et les femelles sont également beaux, ce qui s’accorde avec la règle de M. Wallace ; mais chez quelques espèces d’Australie, les couleurs des femelles sont un peu moins vives que celles des mâles, et, chez une espèce à magnifiques couleurs, les mâles diffèrent des femelles au point qu’on les a d’abord regardés comme spécifiquement distincts[22]. M. H. B. Sharp, qui a étudié ce groupe avec une attention toute particulière, m’a montré quelques espèces américaines (Ceryle) chez lesquelles la poitrine du mâle est rayée de noir. Chez les Carcineutes, la différence entre les sexes est remarquable ; le mâle a la surface supérieure du corps bleu terne rayé de noir, la surface inférieure en partie couleur fauve, il porte en outre beaucoup de rouge sur la tête ; la femelle a la surface supérieure du corps brun rougeâtre rayé de noir, et la surface inférieure blanche avec des marques noires. Nous devons signaler la coloration de trois espèces de Dacelo, car elle nous offre la preuve que le même type de coloration sexuelle caractérise souvent des formes voisines ; chez ces espèces, le mâle ne diffère de la femelle que par sa queue bleu terne, rayée de noir, tandis que celle de la femelle est brune avec des barres noirâtres ; de sorte que, dans ce cas, la couleur de la queue diffère chez les mâles et les femelles de la même manière que la surface supérieure entière du corps chez les Carcineutes.
On peut observer des cas analogues chez les perroquets, qui construisent également leurs nids dans des trous ; les mâles et les femelles de la plupart des espèces affectent des couleurs très-brillantes, et il est impossible de les distinguer l’un de l’autre ; mais chez un certain nombre d’espèces les mâles affectent des tons plus vifs que les femelles et sont même autrement colorés qu’elles. Ainsi, outre d’autres différences très-fortement accusées, toute la partie inférieure du corps de l’Aprosmictus scapulatus mâle est écarlate, tandis que la gorge et le poitrail de la femelle sont verts, teintés de rouge ; chez l’Euphema splendida, on observe une différence analogue : la face et les rémiges tectrices de la femelle sont, en outre, bleu plus clair que chez le mâle[23]. Dans la famille des mésanges (Parinæ), qui construisent des nids cachés, la femelle de notre espèce bleue commune (Parus ceruleus) est « beaucoup moins vivement colorée que le mâle, » et on observe une différence encore plus considérable chez la superbe mésange jaune de l’Inde[24].
Dans le groupe des pics[25], les individus des deux sexes se rassemblent généralement beaucoup ; mais, chez le Megapicus validus, toutes les parties de la tête, du cou et du poitrail, qui sont cramoisies chez le mâle, sont brun pâle chez la femelle. La tête des mâles chez plusieurs pics affecte une teinte écarlate brillant, tandis que celle de la femelle reste terne ; cette différence m’a conduit à penser que cette couleur si voyante devait constituer un grand danger pour la femelle quand elle mettait la tête hors du trou renfermant son nid, et qu’en conséquence, conformément à l’opinion de M. Wallace, elle avait été éliminée chez elle. Les observations de Malherbe sur l’Indopicus carlotta confirment cette opinion ; selon lui, les jeunes femelles ont, comme les jeunes mâles, des parties écarlates sur la tête, mais cette couleur disparaît chez la femelle adulte, tandis qu’elle augmente chez le mâle à mesure qu’il vieillit. Les considérations suivantes rendent cependant cette explication très-douteuse : le mâle prend une grande part à l’incubation[26], il serait donc, dans ce cas, aussi exposé au danger que la femelle ; les individus des deux sexes, chez beaucoup d’espèces, ont la tête colorée également d’un vif écarlate : chez d’autres, la différence de nuance entre les mâles et les femelles est tellement insensible, qu’il n’en peut résulter aucune différence appréciable quant au danger couru ; et enfin la coloration de la tête chez les individus des deux sexes diffère souvent un peu sous d’autres rapports.
Les exemples que nous avons cités relativement aux différences légères et graduelles de coloration que l’on observe entre les mâles et les femelles de groupes chez lesquels, en règle générale, les sexes se ressemblent, se rapportent tous à des espèces qui construisent des nids cachés ou recouverts d’un dôme. On peut toutefois observer des gradations semblables dans des groupes où, d’ordinaire, les sexes se ressemblent, mais qui construisent des nids ouverts. De même que j’ai cité ci-dessus les perroquets australiens, je peux signaler, sans entrer dans aucun détail, les pigeons australiens[27]. Il faut noter avec soin que, dans tous ces cas, les légères différences que présente le plumage des mâles et des femelles affectent la même nature générale que celles qui sont accidentellement plus tranchées. Les martins-pêcheurs chez lesquels la queue seule, ou toute la surface supérieure du plumage, diffère de la même manière chez les individus des deux sexes, nous offrent un excellent exemple de ce fait. On observe des cas semblables chez les perroquets et chez les pigeons. Les différences entre la coloration du mâle et de la femelle d’une même espèce affectent aussi la même nature générale que les différences de couleur existant entre les espèces distinctes du même groupe. En effet, lorsque dans un groupe, où les sexes se ressemblent ordinairement, le mâle diffère beaucoup de la femelle, son type de coloration n’est pas entièrement nouveau. Nous pouvons donc en conclure que, dans un même groupe, les couleurs spéciales des individus des deux sexes, quand elles sont semblables, ainsi que celles du mâle, quand il diffère peu ou beaucoup de la femelle, ont été, dans la plupart des cas, déterminées par une même cause générale : la sélection sexuelle.
Ainsi que nous l’avons déjà fait remarquer, il n’est guère probable que de légères différences de coloration entre les individus des deux sexes puissent avoir aucune utilité comme moyen de sécurité pour la femelle. Admettons toutefois qu’elles en aient une, on pourrait les regarder alors comme des cas de transition ; mais nous n’avons aucune raison de croire qu’un grand nombre d’espèces soient, à un moment quelconque, en voie de changement. Nous ne pouvons donc guère admettre que les nombreuses femelles qui, au point de vue de la coloration, diffèrent très-peu du mâle, soient actuellement toutes en voie de devenir plus sombres pour s’assurer une plus grande sécurité. Si nous considérons même des différences sexuelles un peu plus prononcées, est-il probable, par exemple, que la lente action de la sélection naturelle ait agi sur la tête du pinson femelle, du poitrail écarlate du bouvreuil femelle, sur la coloration verte du verdier femelle, sur la huppe du roitelet huppé femelle, afin de rendre ces parties moins brillantes pour assurer à l’oiseau une plus grande sécurité ? Je ne puis le croire, et je l’admets encore moins pour les légères différences existant entre les mâles et les femelles des oiseaux qui construisent des nids cachés. D’autre part, les différences de coloration entre les individus des deux sexes, qu’elles soient grandes ou petites, peuvent s’expliquer dans une large mesure, par le principe que des variations successives, provoquées chez les mâles par la sélection sexuelle, ont été, dès l’origine, plus ou moins limitées dans leur transmission aux femelles. Quiconque a étudié les lois de l’hérédité, ne doit pas s’étonner de voir le degré de limitation différer dans les diverses espèces d’un même groupe, car ces lois ont une complexité telle que, dans notre ignorance, elles nous paraissent capricieuses dans leurs manifestations[28].
Autant que j’ai pu m’en assurer, il existe très-peu de groupes d’oiseaux, contenant un nombre considérable d’espèces, chez lesquels les individus mâles et femelles de toutes les espèces affectent des couleurs brillantes et se ressemblent absolument ; cependant M. Sclater affirme que les musophages semblent être dans ce cas. Je ne crois pas non plus qu’il existe aucun groupe considérable chez lequel les mâles et les femelles de toutes les espèces diffèrent beaucoup au point de vue de la coloration : M. Wallace affirme que les Cotingidés de l’Amérique du Sud en offrent un des meilleurs exemples ; cependant, chez quelques espèces où le mâle a la gorge rouge vif, celle de la femelle présente aussi un peu de rouge, et les femelles des autres espèces portent des traces du vert et des autres couleurs particulières aux mâles. Néanmoins nous trouvons dans divers groupes un rapprochement vers une similitude ou une dissemblance sexuelle presque absolue, ce qui est un peu étonnant d’après ce que nous venons de dire sur la nature variable de l’hérédité. Mais il n’y a rien de surprenant à ce que les mêmes lois puissent largement prévaloir chez des animaux voisins. La volaille domestique a produit de nombreuses races et sous-races, où le plumage des individus mâles et femelles diffère si généralement, qu’on a regardé comme un fait remarquable les cas où, chez certaines sous-races, il est semblable chez les deux sexes. D’autre part, le pigeon domestique a aussi produit un nombre très-considérable de races et de sous-races, mais chez lesquelles, à de rares exceptions près, les deux sexes sont identiquement semblables. En conséquence, si on venait à réduire à l’état domestique et à faire varier d’autres espèces de Gallus et de Colomba, il ne serait pas téméraire de prédire que les mêmes règles générales de similitude et de dissemblance sexuelles, dépendant de la forme de la transmission, se représenteraient dans les deux cas. De même, une forme quelconque de transmission a généralement prévalu à l’état de nature dans les mêmes groupes, bien qu’on rencontre des exceptions bien marquées à cette règle. Dans une même famille, ou dans un même genre, les individus des deux sexes peuvent se ressembler absolument ou être différents sous le rapport de la couleur. Nous avons déjà cité des exemples se rapportant aux mêmes genres, tels que les moineaux, les gobe-mouches, les grives et les tétras. Dans la famille des faisans, les mâles et les femelles de presque toutes les espèces sont étonnamment dissemblables, mais ils se ressemblent absolument chez le Crossoptilon auritum. Chez deux espèces de Chloephaga, un genre d’oies, les mâles ne peuvent se distinguer des femelles que par leur taille ; tandis que, chez deux autres, les individus des deux sexes sont assez dissemblables pour être facilement pris pour des espèces distinctes[29].
Les lois de l’hérédité peuvent seules expliquer les cas suivants, dans lesquels la femelle acquiert, à un âge avancé, certains caractères qui sont propres au mâle, et arrive ultérieurement à lui ressembler d’une manière plus ou moins complète. Ici, on ne peut guère admettre qu’une nécessité de protection ait joué un rôle. Le plumage des femelles de l’Oriolus melanocephalus et de quelques espèces voisines, arrivées à l’âge de la reproduction, diffère beaucoup, d’après M. Blyth, de celui des mâles adultes ; mais ces différences, après la seconde ou la troisième mue, se réduisent à une légère teinte verdâtre du bec. Chez les butors nains (Ardetta), d’après la même autorité, « le mâle revêt sa livrée définitive à la première mue, la femelle à la troisième ou à la quatrième seulement ; elle a, dans l’intervalle, un plumage intermédiaire qu’elle échange ultérieurement pour le plumage du mâle. » Ainsi encore le Falco peregrinus femelle revêt son plumage bleu plus lentement que le mâle. M. Swinhoe assure que chez une espèce de Drongo (Dicrurus macrocerrus) le mâle, au sortir du nid, perd son plumage brun moelleux et devient d’un noir verdâtre uniformément lustré ; tandis que la femelle conserve pendant longtemps encore les taches et les stries blanches de ses plumes axillaires et ne revêt complètement la couleur noire et uniforme du mâle qu’au bout de trois ans. Le même observateur fait remarquer que la spatule (Platalea) femelle de la Chine ressemble, au printemps de sa seconde année, au mâle de la première, et qu’elle paraît ne revêtir qu’au troisième printemps le plumage adulte que le mâle possède déjà à un âge beaucoup plus précoce. La femelle du Bombycilla carolinensis diffère très-peu du mâle, mais les appendices qui ornent ses rémiges et qui ressemblent à des boules de cire à cacheter rouge[30] ne se développent pas aussi précocement que chez le mâle. La partie supérieure du bec d’un perroquet indien mâle (Palæornis Javanicus) est, dès sa première jeunesse, rouge corail ; mais, chez la femelle, ainsi que M. Blyth l’a observé chez des oiseaux sauvages et en captivité, elle est d’abord noire, et ne devient rouge qu’au bout d’un an, âge auquel les mâles et les femelles se ressemblent sous tous les rapports. Chez le dindon sauvage, les individus des deux sexes finissent par porter une touffe de soies sur la poitrine, qui, chez les mâles âgés de deux ans, a déjà une longueur d’environ dix centimètres, et se voit à peine chez la femelle ; mais elle se développe chez cette dernière et atteint dix ou douze centimètres de longueur, lorsqu’elle entre dans sa quatrième année[31].
Il ne faut pas confondre ces cas avec ceux où des femelles malades ou vieillies révèlent des caractères masculins, ou avec ceux où des femelles, parfaitement fécondes d’ailleurs, acquièrent pendant leur jeunesse, par variation ou par quelque cause inconnue, les caractères propres au mâle[32]. Mais tous ces cas ont ceci de commun qu’ils dépendent, dans l’hypothèse de la pangenèse, de gemmules dérivées de toutes les parties du mâle, gemmules présentes, bien qu’à l’état latent, chez la femelle, et qui ne se développent chez elle que par suite de quelque léger changement apporté aux affinités électives de ses tissus constituants.
Ajoutons quelques mots sur les rapports qui existent entre la saison de l’année et les modifications de plumage. Les raisons que nous avons déjà indiquées nous permettent de conclure que les plumes élégantes, les pennes longues et pendantes, les huppes et les aigrettes des hérons et de beaucoup d’autres oiseaux, qui se développent et se conservent seulement pendant l’été, ne servent exclusivement qu’à des usages décoratifs et nuptiaux, bien que communs aux deux sexes. La femelle devient ainsi, pendant la période de l’incubation, plus voyante qu’elle ne l’est pendant l’hiver ; mais des oiseaux comme les hérons sont à même de se défendre. Toutefois, comme ces plumes deviennent probablement gênantes et certainement inutiles pendant l’hiver, il est possible que la sélection naturelle ait provoqué une mue bisannuelle dans le but de débarrasser ces oiseaux d’ornements incommodes pendant la mauvaise saison. Mais cette hypothèse ne peut s’étendre aux nombreux échassiers chez lesquels les plumages d’été et d’hiver diffèrent très-peu au point de vue de la coloration. Chez les espèces sans défense, espèces chez lesquelles les individus des deux sexes, ou les mâles seuls, deviennent très-brillants pendant la saison des amours, — ou lorsque les mâles acquièrent à cette occasion des rectrices ou des rémiges de nature, par leur longueur, à empêcher ou à retarder leur vol, comme chez les Cosmetorus et chez les Vidua, — il paraît, au premier abord, très-probable que la seconde mue a été acquise dans le but spécial de dépouiller ces ornements. Nous devons toutefois rappeler que beaucoup d’oiseaux, tels que les oiseaux de paradis, le faisan argus et le paon, ne dépouillent pas leurs plumes ornementales pendant l’hiver ; or, il n’est guère possible d’admettre qu’il y ait dans la constitution de ces oiseaux, au moins chez les gallinacés, quelque chose qui rende une double mue impossible, car le ptarmigan en subit trois pendant l’année[33]. Nous devons donc considérer comme douteuse la question de savoir si les espèces nombreuses qui perdent en muant leurs plumes d’ornement et leurs belles couleurs, pendant l’hiver, ont acquis cette habitude en raison de l’incommodité ou du danger qui aurait pu autrement en résulter pour elles.
Je conclus, par conséquent, que l’habitude de la mue bisannuelle a été d’abord acquise, dans la plupart des cas ou dans tous, dans un but déterminé, peut-être pour revêtir une toison d’hiver plus chaude ; et que les variations survenant pendant l’été, accumulées par la sélection sexuelle, ont été transmises à la descendance à la même époque de l’année. Les individus des deux sexes ou les mâles seuls ont hérité de ces variations, suivant la forme de l’hérédité prépondérante chez chaque espèce particulière. Cette hypothèse me semble très-probable ; il est difficile de croire en effet que les espèces aient primitivement eu une tendance à conserver pendant l’hiver leur brillant plumage, et que la sélection naturelle soit intervenue pour les en débarrasser à cause des dangers et des inconvénients que pourrait amener la conservation de ce plumage.
J’ai cherché à démontrer dans ce chapitre qu’on ne peut guère se fier aux arguments avancés en faveur de la théorie qui veut que les armes, les couleurs éclatantes et les ornements de divers genres, appartiennent actuellement aux mâles seuls, parce que la sélection naturelle est intervenue pour convertir une tendance à l’égale transmission des caractères aux deux sexes, en une tendance à la transmission limitée au sexe mâle seul. Il est douteux aussi que la coloration de beaucoup d’oiseaux femelles soit due à la conservation, comme moyen de sécurité, de variations limitées, dès l’abord, dans leur transmission aux individus de ce sexe. Je crois qu’il convient, cependant, de renvoyer toute discussion ultérieure sur ce sujet, jusqu’à ce que j’aie traité, dans le chapitre suivant, des différences qui existent entre le plumage des jeunes oiseaux et celui des oiseaux adultes.
- ↑ Quatrième édition, 1865, p. 241.
- ↑ Westmimter Review, juillet 1867. Journal of Travel, vol. I, 1868, p. 73.
- ↑ Temminck (planches coloriées, vol. V, 1838, p. 487-88) dit que la queue du Phasianus Sœmmerringii femelle n’a que quinze centimètres de longueur : c’est à M. Sclater que je dois les mesures que j’ai précédemment indiquées. Voir, sur le faisan commun, Macgillivray, Hist. Brit. Birds, I, 118-121.
- ↑ Docteur Chapuis, le Pigeon voyageur belge, 1865, p. 87.
- ↑ The Field, sept. 1873.
- ↑ Bechstein, Naturg. Deutschlands, vol. III, 1793, p. 339.
- ↑ Daines Barrington pense, cependant, qu’il est probable (Philos. Transactions, 1773, p. 171) que peu d’oiseaux femelles chantent parce que ce talent aurait été dangereux pour elles pendant l’incubation. Il ajoute que la même cause peut expliquer l’infériorité dans laquelle se trouve le plumage de la femelle comparé à celui du mâle.
- ↑ M. Ramsay, Proc. Zool Soc., 1868, p. 56.
- ↑ Journal of Travel, vol. I, 1868, p. 78.
- ↑ Journal of Travel, vol. I, 1868, p. 281.
- ↑ Audubon, Ornith. Biography, vol. I, p. 233.
- ↑ Jerdon, Birds of India, vol. II, p. 108 ; Gould, Handbook of Birds of Australia, vol. I, p. 463.
- ↑ Comme exemples, l’Eupetomena macroura femelle a la tête et la queue d’un bleu foncé, avec les reins rougeâtres ; la femelle du Lampornis porphyrurus est d’un vert noirâtre en dessus, avec les côtés de la gorge écarlates ; L’Eulampis jugularis femelle a le sommet de la tête et du dos verts, avec les reins et la queue cramoisis. On pourrait encore citer beaucoup d’exemples de femelles très-apparentes par leur coloration ; voir le magnifique ouvrage de M. Gould sur cette famille.
- ↑ Au Guatemala, M. Salvin (Ibis), 1864, p. 373, a remarqué que les oiseaux-mouches quittaient beaucoup moins volontiers leur nid pendant un temps très-chaud, sous un soleil ardent, que pendant un temps frais, nuageux ou pluvieux.
- ↑ J’indiquerai, comme exemples d’oiseaux de couleurs sombres construisant des nids dissimulés, les espèces appartenant à huit genres australiens décrites par Gould, dans Handbook of Birds of Australia, vol. I, p. 340, 362, 365, 383, 387, 389, 391, 414.
- ↑ M. C. Hornes, Proc. Zool. Soc., 1869, p. 243.
- ↑ Voir sur la nidification et les couleurs de ces dernières espèces, Gould, Handbook, etc., p. 504, 527.
- ↑ J’ai consulté sur ce sujet l’ouvrage de Macgillivray, British Birds, et bien qu’on puisse, dans quelques cas, élever des doutes sur les rapports existant entre le degré de la dissimulation du nid et celui de l’apparence de la femelle cependant des oiseaux suivants, pondant tous leurs œufs dans des cavités ou dans des nids couverts, ne peuvent guère passer pour apparents d’après le type précité : ce sont, deux espèces de Passer ; le Sturnus dont la femelle est considérablement moins brillante que le mâle ; le Cincle ; le Motacilla boarula (?) ; l’Erythacus (?) ; le Fruticola, deux espèces ; le Saxicola ; le Mecistura ; l’Anorthura ; le Certhia ; le Sitta, le Yunx, le Muscicapa, deux espèces ; l’Hirundo, trois espèces ; et le Cypselus. Les femelles des douze oiseaux suivants peuvent être aussi considérées comme apparentes : Pastor, Moacilla alba, Parus major et P. cæruleus ; Upupa, Picus, quatre espèces de Coracias, Alcedo et Merops.
- ↑ Journal of Travel, vol. I, p. 78.
- ↑ Voy. des faits nombreux dans l’Ornithol. Biography. Voir aussi quelques observations curieuses sur les nids des oiseaux italiens, par Eug. Bettoni, dans Atti della Società italiana, vol. XI, 1869, p. 487.
- ↑ Monograph of Trogonidæ, 1e édition.
- ↑ À savoir le Cyanalcyon, Gould, Handbook, etc., vol. I, pp. 130, 133, 136.
- ↑ On peut suivre chez les perroquets d’Australie tous les degrés de différences entre les sexes. Gould, o. c., vol. II, p. 14-102.
- ↑ Macgillivray, Brit. Birds, vol. II, p. 433 ; Jerdon, Birds of India, vol. II, p. 282.
- ↑ Tous les faits suivants sont empruntés à la belle Monographie des Picidées, 1861, de M. Malherbe.
- ↑ Audubon, Ornith. Biogr., vol. II, p. 75. Voir l’Ibis, vol. I. p. 268.
- ↑ Gould, Handb. Birds of Australia, vol. II, p. 109-149.
- ↑ Voir les remarques dans mon ouvrage de la Variation des Animaux, etc., vol. II, chap. xii.
- ↑ Ibis, vol. VI, 1861, p. 122.
- ↑ Quand le mâle courtise la femelle, il fait vibrer ces ornements et les étale avec soin sur ses ailes déployées. Voir à ce sujet A. Leith Adams, Field and forest Rambles, 1873, p. 153.
- ↑ Sur l’Ardetta, traduction anglaise de M. Blyth, du Règne animal, de Cuvier, p. 159, note. Sur le Faucon pèlerin, M. Blyth dans Charlesworht Mag. of Nat. Hist., vol. I, 1837, p. 304. Sur le Dicrurus, Ibis, p. 44, 1863. Sur le Platalea, Ibis, vol. VI, 1864, p. 366. Sur le Bombycilla, Audubon, Ornith. Biogr., vol. I, p. 229. Sur le Palæornis, Jerdon, Birds of India, vol. I, p. 263. Sur le Dindon sauvage, Audubon, o. c., vol. I, p. 15. Judge-Caton m’apprend que la femelle acquiert rarement une houppe dans l’Illinois. M. R.-F. Sharp a cité, Proc. Zool. Soc., 1872, p. 496, des faits analogues relatifs à la femelle du Petrocossyphur.
- ↑ M. Blyth (traduction du Règne animal de Cuvier, en anglais, p. 158) rapporte divers exemples chez les Lanius, Ruticilla, Linaria. Audubon cite aussi un cas semblable (Ornith. Biogr., vol. V, p. 519) relatif à un Pirangua æstiva.
- ↑ Gould, Birds of Great Britain.