La Comédie de la Mort (1838)/Le Pot de fleurs

La Comédie de la MortDesessart éditeur (p. 199-200).


LE POT DE FLEURS.


Parfois un enfant trouve une petite graine,
Et tout d’abord, charmé de ses vives couleurs,
Pour la planter il prend un pot de porcelaine,
Orné de dragons bleus et de bizarres fleurs.


Il s’en va. La racine en couleuvres s’allonge,
Sort de terre, fleurit et devient arbrisseau ;
Chaque jour, plus avant, son pied chevelu plonge
Tant qu’il fasse éclater le ventre du vaisseau.

L’enfant revient ; surpris, il voit la plante grasse,
Sur les débris du pot brandir ses verts poignards,
Il la veut arracher, mais la tige est tenace ;
Il s’obstine, et ses doigts s’ensanglantent aux dards.

Ainsi germa l’amour dans mon âme surprise ;
Je croyais ne semer qu’une fleur de printemps :
C’est un grand aloës dont la racine brise
Le pot de porcelaine aux dessins éclatants.