La Cité de Dieu (Augustin)/Livre I/Chapitre II
On a écrit l’histoire d’un grand nombre de guerres qui se sont faites avant la fondation de Rome et depuis son origine et ses conquêtes ; eh bien ! qu’on en trouve une seule où les ennemis, après la prise d’une ville, aient épargné ceux qui avaient cherché un refuge dans le temple de leurs dieux[1] ! qu’on cite un seul chef des barbares qui ait ordonné à ses soldats de ne frapper aucun homme réfugié dans tel ou tel lieu sacré ! Énée ne vit-il pas Priam traîné au pied des autels et
« Souillant de son sang les autels et les feux qu’il avait lui-même consacrés[2] ? »
Est-ce que Diomède et Ulysse, après avoir massacré les gardiens de la citadelle, n’osèrent pas
« Saisir l’effigie sacrée de Pallas, et de leurs mains ensanglantées profaner les bandelettes virginales de la déesse ? »
Ce qu’ajoute Virgile n’est pas vrai :
« Dès ce moment disparut sans retour l’espérance des Grecs[3]. »
- ↑ Les bénédictins citent deux exemples qui atténuent, sans la contredire, la remarque de saint Augustin : l’exemple d’Agésilas, après la victoire de Coronée, et celui d’Alexandre, qui, à la prise de Tyr, fit grâce à tous ceux qui s’étaient réfugiés dans le temple d’Hercule. Voyez Plutarque, Vie d’Agésilas, ch. 19 ; et Arrien, De reb. gest. Alex., lib. ii, cap. 21.
- ↑ Énéide, liv. ii, vers 501, 502.
- ↑ Énéide, liv. ii, vers 166-170.