La Chasse (Gaston Phœbus)/Chapitre LXI

, Joseph Lavallée
La Chasse (1854)
Texte établi par Léon Bertrand, Maison Lefaucheux (p. 244-245).
LXI. Ci devise comment on puet chassier sengliers et autres bestes aux fousses

Chapitre soixante-unième.
Ci devise comment on puet chassier sengliers et autres bêtes aux fousses.


Aussi prent on cerf ou senglier, ours et lous et autres bestes ès fousses. On fet une grant fousse de trois toises de parfond, plus grande au fons que à l’entrée, affin que la beste ne s’en puisse saillir, et la cuevre len de menues busches et d’herbes, et fet on èles[1] dessà et de là tout einsi que on fet aux perdrix quant on chasse à la tonne. Et quant on chasse doit avoir trois hommes, l’un à l’un bout des èles et l’autre à l’autre ; et l’autre au milieu bien couvert. Et quant il sera entre la fousse et eulz, ilz le doivent acuillir einsi que j’ay dit de la haye et le fere bouter dedens la fousse, car il ne s’i prendra garde et cuydera que tout soit plain pays ; et doivent estre estroites les èles derrière du large de la fosse et non plus ouvert par de là la fousse affin qu’il cuyde bien passer oultre et ou plus seront longues les èles et larges tant vaudra mieulx. Et doyvent estre regardés les acours et fuytes du bois ou l’en voudra chassier. Et pour les bêtes mordans la fosse doit estre au couvert et pour les doulces bêtes en cler pays. Et qui feroit la fousse en mi le milieu et par toutes parts èles et devant et derrière et ou milieu estroite selon la fosse encores vaut ce mieulz ; quar c’est pour chassier et d’une part et d’autre. Assez en ay dit ; quar c’est chasse de villains et de communs et de païsans.

Séparateur

  1. Èles. Ailes. Les ailes dont Gaston parle ici sont des haies sèches ou des claies. Elles forment entre elles un angle assez ouvert, au sommet duquel est creusée la fosse. Quelquefois, au lieu de deux ailes, on en met quatre, qui partent des quatre coins de la fosse et se dirigent vers des points de l’horizon diamétralement opposés. De cette manière, de quelque côté que vienne le gibier, dès qu’il s’est engagé entre les ailes, il faut nécessairement qu’il arrive à l’endroit où est le piège.