La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition critique/Laisse 258
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CCLVIII | |||
Mult ben i fièrent Franceis e Arrabit ; | Français et Arabes frappent à qui mieux mieux ; | ||
Fruissent cez hanstes e cez espiez furbiz. | Le bois et l’acier fourbi des lances sont mis en pièces. | ||
Ki dunc veïst cez escuz si malmis, | Ah ! celui qui eût vu tant d’écus en cet état, | ||
Cez blancs osbercs ki dunc oïst fremir, | Celui qui eût entendu le bruit de ces blancs hauberts que l’on heurte,
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3485 | E cez escuz sur cez helmes cruisir ; | Et de ces heaumes qui grincent contre les boucliers ; | |
Cez chevalers ki dunc veïst caïr, | Celui qui eût alors vu tomber tous ces chevaliers, | ||
E humes braire, cuntre tere murir, | Et les hommes pousser des hurlements de douleur et mourir à terre,
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De grant dulur li poüst suvenir. | Celui-là saurait ce que c’est qu’une grande douleur ! | ||
Ceste bataille est mult forz à suffrir. | La bataille est rude à supporter, | ||
3490 | Li Amiralz recleimet Apollin | Et l’Émir invoque Apollon, | |
E Tervagan e Mahum altresi : | Tervagan et Mahomet : | ||
« Mi damne deu, jo vus ai mult servit ; | « Je vous ai bien servis, seigneurs mes dieux ! | ||
« Tutes voz ymagenes vus referai d’or fin : | « Eh bien ! je veux faire plus, je vous élèverai d’autres statues, tout en or fin,
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« Cuntre Carlun deignez me guarantir. » | « Si vous me secourez contre Charles. » | ||
3495 | As li devant un soen drut, Gemalfin, | En ce moment Gémalfin, un ami de l’Émir, se présente à ses yeux ;
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Males nuveles li aportet e dit : | Il lui apporte de mauvaises nouvelles, et lui dit : | ||
« Baliganz, Sire, mal estes hoi bailliz, | « La journée est mauvaise pour vous, sire Baligant ! | ||
« Perdut avez Malprime vostre fil, | « Vous avez perdu Malprime, votre fils, | ||
« E Canabeus vostre frere est ocis. | « Et l’on vous a tué Canabeus, votre frère. | ||
3500 | « A dous Franceis belement en avint ; | « Deux Français ont eu l’heur de les vaincre ; | |
« Li Emperere en est l’uns, ço m’est vis, | « L’un d’eux, je pense, est l’Empereur : | ||
« Grant ad le cors, ben resenblet marchis, | « Il a le corps énorme et tout l’air d’un marquis. | ||
« Blanche ad la barbe cume flurs en avril. » | « Sa barbe est blanche comme fleur en avril. » | ||
Li Amiralz en ad le helme enclin, | L’Émir alors baisse son heaume, | ||
3505 | E enaprès si ’n enbrunket sun vis, | Et laisse tomber sa tête sur sa poitrine ; | |
Si grant doel ad sempres quiat murir : | Sa douleur est si grande, qu’il pense mourir sur l’heure... | ||
Si ’n apelat Jangleu l’ultre-marin. | Aoi. | Il appelle Jangleu d’outre-mer. |
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Vers 3481. — Lire bien.
Vers 3482. — Fruissent. Ce verbe est tantôt actif, tantôt neutre. Ici, il nous paraît actif, et c’est pourquoi il faut, au cas régime, ces espiez furbiz (au lieu de : cil espiez furbit. O.).
Vers 3483. — Dulor. O. V. la note du vers 489.
Vers 3486. — Lire chevaliers.
Vers 3489. — Fort. O. Pour le cas sujet, forz.
Vers 3491. — Mahumet altresi. O. Erreur évidente, contraire à la mesure du vers.
Vers 3492. — Vos. O.
Vers 3493. — Tutes vos ymagenes ferai d’or fin. O. La correction est de Mu., d’après Venise IV. (Nefaro d’or fi.) Pour avoir un décasyllabe, il faudrait peut-être : Jà voz imagenes vus referai d’or fin. — Le scribe a écrit à tort un Aoi à la suite de ce vers.
Vers 3494. — Ce vers n’est pas dans le manuscrit. Tous les autres textes nous le donnent. Mu. a choisi la version de Venise IV.
Vers 3497. — Baliganz. O. Lire Baligant. (V. la note du vers 15.) ═ Este. O. Erreur évidente. ═ Oi. O. V. la note du vers 1210. ═ Baillit. O. Pour le cas sujet, il faut bailliz.
Vers 3498. — Malpramis. O. V. la note du vers 3176. ═ Filz. O. Au cas régime, fil.
Vers 3501. — Empereres. O. ═ Au vers suivant, lire bien.
Vers 3503. — Blanc ad la barbe. O. Erreur manifeste. ═ Flur. O. V. la note du vers 611.
Vers 3506. — Quiad. O. V. la note du vers 2.
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