L. Hachette et Cie (p. 146-149).

L

LE BUISSON ARDENT

(1400 ans avant J.-C.)



Moïse resta pendant quarante ans chez son beau-père Jéthro ; il faisait paître ses troupeaux ; il eut deux fils de Séphora.

Un jour, il avait mené ses troupeaux près de la montagne d’Horeb, qui est un des sommets du Mont Sinaï ; il vit au bas de cette montagne un buisson entouré d’une grande flamme qui ne se consumait pas. Moïse, ayant regardé quelque temps, fut surpris que cette grande flamme ne brûlât pas le bois qu’elle enveloppait.

« Il faut, dit-il, que j’aille voir cette merveille et comment il se fait que le feu ne consume pas ce qu’il touche. »

Le Seigneur, qui était dans le buisson, le voyant venir, l’appela : « Moïse !

— Me voici, répondit-il.

— N’approche pas, lui dit le Seigneur. Ôte les souliers de tes pieds, parce que tu marches sur une terre sainte. Je suis le Dieu de tes pères, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. »

Moïse, ayant ôté ses souliers, se cacha le visage avec ses mains, n’osant regarder le Seigneur.

« J’ai vu l’affliction de mon peuple, lui dit le Seigneur ; j’ai entendu ses prières, je veux le délivrer des mains des Égyptiens. Je t’enverrai vers Pharaon, afin que tu fasses sortir mon peuple qui est le peuple d’Israël.

— Que suis-je, moi, Seigneur, répondit humblement Moïse, pour aller paraître devant Pharaon, et pour tirer mes frères de l’esclavage ? »

Le Seigneur lui dit : « Je serai avec toi, et, lorsque tu auras délivré mon peuple, tu m’offriras un sacrifice sur cette montagne.

— Seigneur, reprit Moïse, quand j’irai vers les enfants d’Israël et que je leur dirai : Le Dieu de mes pères m’a envoyé vers vous, ils me diront : Quel est son nom ? Que leur répondrai-je ? »

Dieu lui dit : « Je suis celui qui est : Tu diras aux enfants d’Israël : Celui qui est m’a envoyé vers vous. »

Le Seigneur lui parla longtemps encore, lui enseignant ce qu’il devait dire.

« Ils ne me croiront pas, Seigneur, répondit Moïse, et ils me traiteront d’imposteur.

— Que tiens-tu dans ta main ? lui dit alors le Seigneur.

— Une verge, répondit Moïse.

— Jette-la par terre. »

Moïse la jeta ; elle fut immédiatement changée en serpent. Moïse eut peur et s’enfuit.

Gaston. Comment ! une verge, pour fouetter ?

Grand’mère. Non, mon enfant ; une verge veut dire aussi un bâton ou une baguette. Moïse s’en servait comme d’une houlette pour conduire ses troupeaux.

Jacques. Ce pauvre Moïse est un peu poltron, ce me semble. Comment ne comprenait-il pas que, si près de Dieu, il n’avait rien à craindre ?

Grand’mère. Il aurait dû le comprendre ; mais il était très-humble, et il ne pouvait croire que le Seigneur l’eût choisi pour une si grande œuvre ; il crut que le Seigneur voulait seulement l’éprouver.

La voix de Dieu rappela Moïse et lui dit : « Prends ce serpent par la queue. » Moïse le prit, et le serpent redevint une verge.

« Mets ta main dans ton sein, » lui dit encore le Seigneur. Moïse obéit et la retira couverte de lèpre.

Françoise. Qu’est-ce que c’est que la lèpre ?

Grand’mère. C’est une horrible maladie qui était très-commune chez les Juifs et qui couvrait le corps de plaies saignantes et de croûtes blanches et infectes, qui causaient une vive douleur et une démangeaison insupportable.

« Remets ta main dans ton sein, » lui dit le Seigneur. Il la remit et la retira parfaitement guérie.

« Tu feras ces miracles devant eux, dit-il à Moïse, et ils te croiront.

— Seigneur, dit encore Moïse, comment pourrai-je parler à Pharaon, moi qui ai toujours parlé difficilement ? Et même depuis que je vous ai parlé, je sens qu’il m’est plus difficile de prononcer. »

Armand. Est-ce que c’était vrai, Grand’mère ?

Grand’mère. Oui, Moïse disait vrai ; il bégayait, il avait de la difficulté à prononcer les mots.

« N’est-ce pas moi, répondit le Seigneur, qui fais les sourds, les muets, les bègues, les aveugles ? Va, je serai dans ta bouche, et je t’apprendrai ce que tu devras dire.

— Je vous en prie, Seigneur, envoyez à Pharaon un homme plus habile que je ne le suis. »

Le Seigneur reprocha à Moïse son humilité exagérée. Il lui ordonna de partir ; seulement il lui permit, pour lui enlever toute inquiétude, d’emmener avec lui son frère Aaron, qui parlait très-bien, « Prends la verge que tu tiens à la main ; c’est avec elle que tu feras des miracles. »

Moïse s’en alla donc ; il retourna chez son beau-père Jéthro ; il lui raconta l’aventure miraculeuse du buisson ardent, et les paroles du Seigneur. Jéthro, comprenant la volonté de Dieu, dit à Moïse : « Va en paix. » Moïse fit ses préparatifs de départ, et le Seigneur lui dit : « Ceux qui voulaient te faire du mal en Égypte sont morts. Pharaon est mort, un autre Pharaon lui a succédé ; va donc sans plus attendre et ne crains rien. Tu rencontreras en route ton frère Aaron, auquel j’ai commandé d’aller au-devant de toi, afin de t’accompagner chez le nouveau roi d’Égypte. »

Moïse se mit donc en route avec sa femme et ses fils ; il rencontra son frère Aaron, comme le lui avait annoncé le Seigneur, et tous deux se présentèrent devant Pharaon, après avoir parlé au peuple juif, et avoir fait, en présence de leurs frères les Israélites, plusieurs miracles qui prouvèrent qu’ils étaient réellement les envoyés de Dieu.