L. Hachette et Cie (p. 103-104).

XXXII

JACOB LUTTE CONTRE L’ANGE DU SEIGNEUR

(1729 ans avant J.-C.)



Il resta seul dans le camp, et il vit devant lui un homme inconnu qui commença à lutter contre lui. Ils luttèrent ainsi pendant toute la nuit ; l’homme, voyant qu’il ne pouvait vaincre Jacob, lui toucha le nerf de la cuisse, qui se dessécha aussitôt ; mais, Jacob le tenant toujours, il lui dit : « Laissez-moi, car voici le jour qui va paraître. » Jacob lui répondit : « Je ne vous laisserai pas aller que vous ne m’ayez béni. » Le lutteur mystérieux le bénit et lui dit : « À l’avenir, on ne te nommera plus Jacob, mais Israël, ce qui veut dire : Fort contre Dieu. »

Armand. Qui était cet homme ? Pourquoi a-t-il lutté contre Jacob ?

Grand’mère. La sainte Bible ne dit pas qui était cet homme, mais d’après le récit qu’elle fait de sa lutte contre Jacob et d’après l’opinion des auteurs sacrés, c’était Dieu lui-même qui avait pris ainsi l’apparence de la forme humaine.

Valentine. Mais pourquoi cela ? Qu’est-ce que cela figurait ?

Grand’mère. D’après les mêmes auteurs, cette lutte figurait la lutte que devait soutenir plus tard Notre-Seigneur Jésus-Christ contre le peuple d’Israël, lutte dans laquelle l’ingratitude et la méchanceté des Juifs l’a emporté sur la puissance et la bonté de Dieu.

Louis. Mais pourquoi Dieu dessèche-t-il la cuisse de ce pauvre Jacob ? Je trouve que ce n’était pas bien de punir Jacob, qui se défendait honnêtement contre un homme qui l’avait attaqué et qui ne voulait pas le laisser passer.

Grand’mère. Le Seigneur blesse Jacob, qui représentait le peuple juif, pour montrer que ce peuple, qui a osé lutter contre Dieu même, serait puni, et qu’après la défaite volontaire de Dieu, ce peuple ne conserverait plus sa force et l’union de tous ses membres. En effet, après la mort de Notre-Seigneur, le peuple juif perdit sa puissance, sa pairie, sa capitale, tous les dons de Dieu, et fut dispersé par la terre, ne formant plus une nation ; maintenant encore, il se trouve partout persécuté, chassé, méprisé et détesté. C’est l’explication que donnent les auteurs sacrés de cette lutte singulière dans laquelle l’homme céleste est vaincu par Jacob.

Jacques. C’est tout de même très-bizarre ; ne trouvez-vous pas, Grand’mère ?

Grand’mère. Tu as raison, mon enfant. Mais la sainte Bible est remplie de faits qui nous semblent bizarres et qui se rapportent à la venue de Notre-Seigneur Jésus-Christ et à sa vie.

Aussitôt que l’homme eut disparu, Jacob vit que le soleil se levait ; il s’aperçut alors qu’il était boiteux, mais il passa tout de même le gué de la rivière et il alla rejoindre ses femmes et ses serviteurs.

Gaston. Grand’mère, qu’est-ce que le gué de la rivière ?

Grand’mère. Un gué est un endroit où il y a si peu d’eau, qu’on peut passer la rivière à pied, sans aucun danger de se noyer, ni même de trop se mouiller.