L. Hachette et Cie (p. 461-463).

CLXXXIV

HOLOPHERNE ASSIÈGE BÉTHULIE

(699 ans avant J.-C.)



Judith vivait dans le même temps que Tobie et que Nabuchodonosor, roi des Assyriens, qui avait détruit le royaume de Juda. Elle habitait la ville de Béthulie, de la tribu de Zabulon, et proche du lac de Génésareth, dont on parle dans la vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Judith était une jeune veuve d’une beauté remarquable ; elle menait une sainte vie ; tout le peuple la respectait. Son histoire est célèbre par un acte de courage et de dévouement que je vais vous raconter.

Vous savez que l’orgueilleux Nabuchodonosor faisait une guerre acharnée au peuple juif. Il avait nommé général de son armée, Holopherne, homme impie et cruel, célèbre par sa grande valeur. Holopherne faisait donc la guerre à la portion des Israélites qui se défendaient encore. Il apprit que la ville de Béthulie avait fermé ses portes, que les Juifs avaient coupé les chemins, et gardaient tous les passages qui traversaient les montagnes, et qui arrivaient à Jérusalem.

Holopherne, surpris et irrité qu’une ville comme Béthulie crût pouvoir lui résister, jura, dans sa colère, qu’il les exterminerait tous. Il rassembla toute son armée, qui était de cent vingt mille hommes de pied et vingt-deux mille cavaliers, et vint assiéger Béthulie.

Les Israélites, voyant cette multitude innombrable entourer leur ville, se prosternèrent devant le Seigneur, se couvrirent la tête de cendre et supplièrent le Dieu d’Israël de venir à leur secours.

Ils avaient un aqueduc…

Gaston. Qu’est-ce que c’est, un aqueduc ?

Grand’mère. Un aqueduc est un conduit en pierre qui amène l’eau d’un endroit à un autre ; du latin aqua, eau, ductus, qui mène.

Les Israélites avaient donc un aqueduc qui leur amenait de l’eau des montagnes jusque dans la ville. Holopherne, ayant découvert cet aqueduc, le fit couper, de sorte qu’il ne pouvait plus donner d’eau à Béthulie. Mais, au bout de quelque temps, on vint lui dire que les Juifs s’approvisionnaient d’eau dans des fontaines qui se trouvaient en dehors, tout près des murailles ; ils venaient la nuit puiser l’eau nécessaire pour remplir les bassins et les réservoirs de la ville.

Holopherne établit alors, auprès de chaque fontaine, des gardes qui tuaient ceux qui venaient la nuit chercher de l’eau. Au bout de vingt jours, il n’y eut presque plus d’eau dans la ville ; on la distribuait aux habitants en petite quantité ; il n’en restait plus que pour peu de jours, et tout le monde devait ensuite mourir de soif. Alors le peuple s’effraya ; les hommes, les femmes, les enfants s’assemblèrent en foule autour d’Ozias, prince de Juda, qui commandait dans la ville, et lui dirent : « Que Dieu soit juge contre nous. Vous avez refusé de livrer la ville aux Assyriens : ils sont venus nous assiéger, et voilà que nous demeurons sans secours, et que la soif nous fait périr cruellement sous vos yeux. C’est pourquoi, assemblez au plus tôt tous ceux qui restent dans la ville, afin que nous nous rendions volontairement à Holopherne ; car il vaut mieux que nous vivions captifs, en bénissant le Seigneur, que de voir nos femmes et nos enfants mourir de soif et de périr ensuite nous-mêmes. »

Après qu’ils eurent parlé de la sorte, ils jetèrent de grands cris, se lamentèrent pendant plusieurs heures en demandant grâce au Seigneur, et en avouant leurs iniquités. Quand ils furent fatigués de crier et de pleurer, ils se turent.

Ozias, qui priait et pleurait avec eux, se leva et leur dit : « Ayez bon courage, mes frères ; attendez encore cinq jours en implorant la miséricorde du Seigneur. Peut-être que nos prières l’apaiseront et qu’il nous délivrera de la mort et de nos ennemis. Si dans cinq jours nous ne sommes pas secourus, nous nous rendrons aux Assyriens. »