La Bible d’une grand’mère/163
CLXIII
ÉLISÉE MULTIPLIE L’HUILE D’UNE PAUVRE VEUVE
RESSUSCITE UN ENFANT, MULTIPLIE DES PAINS,
ADOUCIT DES HERBES AMÈRES
Alors, la femme de l’un des prophètes vint dire à Élisée : « Seigneur, mon mari, qui était un fidèle serviteur du Dieu d’Israël, est mort ; il devait de l’argent, et voilà que ces gens auxquels il devait, veulent m’enlever mes deux fils pour en faire leurs esclaves. »
Élisée lui dit : « Qu’avez-vous dans votre maison ? — Rien qu’un peu d’huile, » répondit-elle. — Élisée lui dit : « Allez, empruntez à vos voisines un grand nombre de vases et de cruches vides. Quand vous en aurez beaucoup, enfermez-vous dans votre maison avec vos (ils, et versez dans tous ces vases l’huile qui vous reste. Quand tous les vases seront pleins, vous les vendrez, vous payerez à vos créanciers ce que leur devait votre mari, et le reste vous servira pour vivre avec vos fils. » Et tout cela arriva comme l’avait dit le saint prophète.
Une autre fois, Élisée passait par Sunam ; une femme riche de la ville, lui voyant l’air très-fatigué, le retint presque de force pour le faire manger. Il passait souvent par Sunam, et chaque fois cette femme le retenait pour manger et pour coucher.
Un jour, cette femme dit à son mari : « Je vois que cet homme, qui passe souvent par ici, est un homme de Dieu, un saint. Faisons-lui donc faire une petite chambre ; mettons-y un lit, une table, un siège et un chandelier, afin qu’il demeure là quand il viendra nous voir. » Le mari y consentit.
Un jour donc, Élisée étant venu à Sunam, il logea dans cette chambre, et y reposa. Le lendemain, il voulut récompenser cette femme de sa charité envers lui ; il savait qu’elle n’avait jamais eu d’enfants, et qu’elle en était malheureuse. Il la fit venir et lui dit : « Dans un an, en ce même jour et à la même heure, si Dieu vous conserve la vie, vous aurez un fils qui naîtra de vous. » Elle lui répondit : « Non, mon seigneur, non, homme de Dieu, ne me trompez pas, je vous prie. » Élisée l’assura qu’il disait la vérité ; et cette femme en fut si contente, qu’elle n’osait y croire.
L’année d’après, au même jour et à la même heure, comme l’avait dit Élisée, elle, accoucha d’un fils. L’enfant grandit, et, quand il fut assez fort pour accompagner son père dans les champs, il lui dit en gémissant : « La tête me fait mal ; la tête me fait mal. » Le père, qui ne pensait pas que cela fût grave, dit à un serviteur : « Prenez l’enfant, et portez-le à sa mère. » La mère le prit sur ses genoux, le garda jusqu’à midi, et l’enfant mourut.
Jeanne. Oh ! le pauvre petit ! Qu’est-ce qu’il avait donc ?
Grand’mère. Probablement un coup de soleil sur la tête. Quoi qu’il en soit, il mourut à midi.
La mère, qui avait toute confiance dans Élisée, ne se laissa pas abattre par le désespoir ; elle prit l’enfant, le porta dans la petite chambre d’Élisée, le posa sur le lit, ferma la porte, et alla précipitamment faire seller une ânesse ; elle prit avec elle un serviteur, et tous deux galopèrent jusqu’au mont Carmel où était Élisée.
Quand elle l’aperçut, elle courut à lui, et se prosterna, « Seigneur, lui dit-elle, vous ai-je demandé un fils ? c’est vous qui me l’avez offert. »
Élisée, devinant tout, appela Giézi, son serviteur, et lui dit : « Ceins tes reins, prends mon bâton à la main, et va vite à Sunam. Ne t’arrête pas, ne parle à personne, arrive jusqu’à l’enfant, et mets mon bâton sur son visage. » Giézi partit, mais la femme Sunamite dit à Élisée : « Je ne vous quitterai pas que vous ne m’ayez rendu mon fils. Venez avec moi. » Élisée, ayant pitié de cette mère, la suivit ; ils rencontrèrent Giézi qui revenait : « L’enfant n’est pas ressuscité, dit-il ; je lui ai mis votre bâton sur le visage. »
Élisée continua son chemin ; il entra dans la maison, et il trouva l’enfant mort couché sur le lit de sa petite chambre. Il resta seul avec lui, et ferma la porte. Alors il pria le Seigneur, et il se coucha sur l’enfant comme l’avait fait Élie ; et la chair de l’enfant commença à se réchauffer. Élisée se coucha une seconde fois sur le petit corps de l’enfant. Alors l’enfant bailla et ouvrit les yeux.
Élisée fit entrer la mère ; elle vit son fils vivant, et, se jetant aux pieds d’Élisée la face contre terre, elle adora le Seigneur.
Henriette. Grand’mère, je trouve qu’Élisée de même qu’Élie étaient aussi puissants que Dieu lui-même, puisqu’ils pouvaient ressusciter les morts.
Grand’mère. Chère petite, il y avait une grande différence ; c’est qu’Élisée comme Élie tenaient leur puissance de Dieu, qui pouvait la leur retirer quand il le voudrait, tandis que le Seigneur ne tient sa puissance que de lui-même, et ne peut la perdre. Les prophètes invoquaient Dieu avant de faire un miracle, tandis que Dieu n’a besoin que de vouloir. Tu vois que c’est bien différent.
Élisée s’en alla ensuite à Galgala, où régnait une grande famine. Les enfants des prophètes demeuraient chez Élisée. Il dit à un de ses serviteurs : « Prenez un grand pot, et préparez à manger aux enfants. »
Le serviteur alla dehors pour chercher quelque chose. Il vit une plante avec des fruits, qui avait l’air d’une vigne et qui avait bon goût. Il en cueillit une grande quantité, et la mit dans son manteau. Étant revenu, il les coupa en morceaux, les mit dans le grand pot avec du sel et de l’huile, et les fit cuire.
Il les servit ensuite aux enfants des prophètes, qui, en ayant goûté, s’écrièrent : « Homme de Dieu, il y a un poison mortel dans ces herbes ; nous ne pouvons en manger. »
Élisée leur dit : « Apportez-moi de la farine. » Élisée en mit dans le pot ; puis il dit : « Mangez maintenant ; cette nourriture est agréable, et ne vous fera pas de mal. » Tout le monde en mangea, et personne ne fut malade.
Peu de jours après, il vint un homme qui apportait à l’homme de Dieu vingt petits pains d’orge, quelques pains de froment et du blé nouveau. Élisée lui dit : « Donnez ces pains à manger au peuple. » Car il y avait plus de cent personnes rassemblées devant sa demeure.
« Qu’est-ce que cela pour servir à plus de cent personnes ? dit un serviteur. — Donnez ces pains à manger au peuple, répéta le prophète ; car le Seigneur a dit : « Ils mangeront, et il y en aura de reste. »
On servit donc les pains à tout le peuple ; ils en mangèrent tous, et il y en eut de reste.