CXIV

DAVID SE RÉFUGIE CHEZ ACHIS
SAMUEL APPARAIT À SAÜL

(955 ans avant J.-C.)



David, ne sachant où se réfugier, demanda asile à Achis, roi de Geth, du pays des Philistins, car il craignait de tomber enfin entre les mains de Saül avec ses six cents hommes, qui périraient victimes de leur dévouement à sa personne.

Achis le reçut très-bien, et lui donna la ville de Siceleg pour y demeurer avec ses femmes, Achinoam et Abigaïl, et ses six cents hommes, qui avaient aussi leurs femmes et leurs enfants.

David demeura quatre mois chez les Philistins ; il faisait, accompagné de ses soldats, la guerre à leurs ennemis, qu’il exterminait partout où il les rencontrait, et livrait à Achis une partie des troupeaux et du butin qu’il rapportait. Achis se réjouissait d’avoir près de lui un homme vaillant comme David, et il lui dit : « Soyez sûr que je vous mènerai partout où je ferai la guerre, vous et vos gens, et je vous confierai la garde de ma personne. »

Après la mort de Samuel, Saül chassa tous les devins et magiciens hors du royaume. Les Philistins profitèrent du mécontentement que causa cette mesure dans le peuple d’Israël pour faire la guerre à Saül. Ils rassemblèrent une grande armée. Saül en fut effrayé ; il consulta le Seigneur, mais il n’en obtint aucune réponse, ni en songe, ni par les prêtres, ni par les prophètes.

Alors Saül dit à ses officiers : « Cherchez-moi une femme qui ait l’esprit de Python. »

Paul. Qu’est-ce que c’était, l’esprit de Python ?

Grand’mère. C’était l’esprit d’un démon puissant qu’on appelait Python, et qui faisait voir l’avenir aux gens abominables qui s’alliaient à lui pour faire du mal aux hommes.

Les officiers dirent à Saül : « Il y a dans la ville d’Endor, près d’ici, une femme qui a l’esprit de Python. » Saül voulut la consulter lui-même. Il se déguisa en homme du peuple.

Armand. Pourquoi cela ?

Grand’mère. Parce qu’il ne voulait pas être reconnu par la devineresse, qui n’aurait pas osé lui prédire des malheurs, de peur qu’il ne la perçât de sa lance.

Saül arriva donc la nuit, déguisé, chez la pythonisse : « Découvrez-moi l’avenir, dit-il, et faites-moi apparaître celui que je vous nommerai.

— Vous savez, répondit la femme, que le roi Saül a chassé les devins ; s’il vient à savoir que je suis une devineresse, il me fera du mal.

— Non, dit Saül, je vous jure que par moi il ne vous arrivera aucun mal.

— Qui voulez-vous que je vous fasse venir de l’autre monde ? dit-elle.

— Faites-moi venir Samuel, » répondit Saül. La femme, ou plutôt le démon qui l’assistait, fit apparaître l’ombre de Samuel ; aussitôt qu’elle l’eut regardé, elle poussa un grand cri et dit au roi : « Pourquoi m’avez-vous trompée ? Vous êtes Saül.

— Ne crains rien, dit le roi ; qu’as-tu vu ?

— J’ai vu un dieu qui sortait de la terre.

— Comment est-il fait ? demanda le roi.

— C’est un vieillard couvert d’un manteau. »

Saül reconnut Samuel ; il lui fit un profond salut. Samuel lui dit : « Pourquoi as-tu troublé mon repos ? Pourquoi t’adresses-tu à moi, puisque le Seigneur t’a abandonné ? Il te traitera comme je te l’ai dit de sa part. Il déchirera ton royaume et l’arrachera d’entre tes mains pour le donner à David, ton gendre, parce que tu n’as pas exécuté les ordres du Seigneur, et parce que tu as versé cruellement et injustement le sang des prêtres de Dieu. Demain tu ne seras plus de ce monde ; tes fils périront avec toi, et le Seigneur livrera aux Philistins le camp même d’Israël. »

Louis. Était-ce vraiment Samuel qui avait apparu ?

Grand’mère. Il paraît que oui, puisque cette ombre parla à Saül de la part de Dieu, et lui prédit sa mort.

Saül entendant ces paroles, tomba et resta étendu sans connaissance sur la terre. Samuel disparut, et la magicienne eut peur ; elle offrit au roi du pain et du vin pour l’aider à prendre des forces ; elle alla tuer un veau gras, le fit cuire et le servit à Saül et à ses gens. Après qu’ils eurent mangé, ils s’en allèrent, et marchèrent toute la nuit.