L’instruction primaire en Écosse
Revue pédagogique, premier semestre 18817 (p. 82-92).

L’INSTRUCTION PRIMAIRE EN ÉCOSSE
(Suite)[1].


Organisation de l’enseignement. — Écoles élémentaires, écoles supérieures et écoles normales. — Dépenses d’installation et d’entretien des écoles. — Subsides du gouvernement. — Personnel enseignant. — Pensions des instituteurs.

Dispositions générales. — Chaque année, des crédits sont volés par le Parlement pour subvenir aux dépenses d’établissement et d’entretien des écoles élémentaires et des écoles normales primaires ; la répartition de ces crédits est laissée aux soins du Département d’éducation, et l’emploi des subventions est confié aux comités scolaires des bourgs et des paroisses.

Toute école est admise à participer aux subventions du gouvernement, si elle satisfait aux prescriptions suivantes : l’école sera ouverte à tous les enfants, à quelque communion qu’ils appartiennent ; l’enseignement religieux sera donné à des heures autres que celles qui sont consacrées aux cours élémentaires, et à ces heures les parents auront la faculté de retirer leurs enfants de l’école ; l’enseignement comprendra les matières élémentaires, c’est-à-dire la lecture, l’écriture, le calcul et la géographie ; la somme à verser pour chaque élève n’excédera pas neuf pences (18 sous) par semaine. — Les écoles supérieures, ayant leurs ressources propres, ne reçoivent pas de subvention.

Des officiers et agents sont chargés de s’assurer que ces conditions sont rigoureusement remplies, ils recueillent les informations et font connaître au Département d’éducation le résultat de leurs enquêtes. Ces agents sont les inspecteurs et toutes personnes spécialement désignées par le Département suivant les circonstances, les assistants des inspecteurs ou les auditeurs des comptes.

Dès le jour où une école est inscrite sur la liste des établissements subventionnés, cette école reçoit chaque année la visite des inspecteurs, et le Département d’éducation fixe une fois pour toutes le mois pendant lequel l’inspection devra être faite. Il ne peut être alloué à chaque école qu’une subvention dans l’année.

Les administrateurs de chaque école désignent un représentant ou secrétaire pour les rapports et communications à adresser au département d’éducation. Les instituteurs ne peuvent être ni administrateurs, ni correspondants des écoles auxquelles ils sont attachés, ils ne peuvent davantage être reconnus par le Département d’éducation comme secrétaires ou trésoriers de comités scolaires, sauf dans des circonstances exceptionnelles et pour des motifs déterminés.

Subventions pour l’installation des écoles. — L’article 67 de l’acte de 1872 porte que des subventions pourront être attribuées aux comités scolaires pour l’installation des écoles : ces subventions ne sont accordées qu’après examen et approbation par le Département d’éducation des plans et devis et de l’emplacement choisi pour la construction de l’école ; le terrain devra être salubre et exempt de toute servitude et de tout voisinage bruyant ; il sera toujours à portée de la demeure des enfants et aura une superficie de 1,200 yards au moins. Les salles de classe seront suffisamment éclairées, ventilées, chauffées et pourvues du mobilier nécessaire ; elles auront chacune une étendue de 80 pieds cubes au moins, et seront disposées de manière à assurer à chaque élève un espace de 8 pieds carrés.

Le montant de la subvention est versé sur la production d’un certificat délivré par le comité scolaire, constatant que les travaux de construction et d’aménagement sont achevés, et que les ressources locales augmentées de la subvention suffiront pour couvrir la dépense. Les comités scolaires ont un délai de neuf mois pour faire emploi des subventions au-dessous de 1,250 francs et un délai de dix-huit mois pour les subventions au-dessus de cette somme. Un temps plus long est accordé lorsque la subvention excède 25,000 francs, et si les motifs de l’ajournement sont reconnus plausibles par le Département d’éducation.

Subventions pour l’entretien des écoles. — Des subsides sont également alloués pour dépenses d’entretien aux écoles qui sont établies d’après les principes énoncés dans l’acte de 1872, et dont l’installation est conforme aux prescriptions réglementaires. Le directeur ou maître principal doit avoir le brevet, et jamais il ne lui est permis d’exercer des fonctions étrangères à celles de son emploi ou qui prendraient une partie quelconque du temps dû à l’instruction des enfants ou des élèves-maîtres. Le certificat n’est pas exigé, pour les classes du soir, des élèves-maîtres qui ont satisfait à l’examen prescrit en l’article 60, ou qui, ayant plus de 18 ans d’âge, ont été déclarés par l’inspecteur aptes à exercer. Lorsque des changements sont opérés dans la direction ou dans le personnel de l’école, avis en est immédiatement donné au Département d’éducation. Les jeunes filles sont exercées aux travaux à l’aiguille et à la coupe des vêtements, ces travaux rentrant dans le cours d’études ordinaire. Un registre d’inscription et de présence des élèves est tenu par le directeur de l’école ou par un des assistants, sous son contrôle. Les comptes en recettes et en dépenses sont rendus avec soin chaque année par les administrateurs. En aucun cas, les revenus de l’école ne peuvent être appliqués à d’autres dépenses que celles de l’enseignement. La subvention peut être retirée, à la suite de rapports adressés au Département d’éducation par deux inspecteurs, qui font valoir séparément les motifs de leur opposition. La quotité de la subvention est déterminée par le nombre de présences constatées dans l’année précédente, suivant l’âge et le degré d’instruction des élèves.

Personnel enseignant. — Le personnel enseignant comprend trois classes d’instituteurs : les maîtres pourvus du brevet, les élèves-maîtres, les maîtres assistants. Les laïques seuls peuvent exercer des fonctions d’instituteur public, sauf les directeurs d’école qui étaient en exercice lors de la promulgation de l’acte de 1872. L’examen pour l’obtention du brevet est passé en décembre, dans chacune des sept écoles normales. Sont admis à subir l’examen les élèves des écoles normales qui ont passé une année au moins dans l’un de ces établissements, les candidats qui, ayant plus de 21 ans d’âge, ont ou accompli d’une manière satisfaisante leur engagement comme élèves-maîtres, ou obtenu un rapport favorable de l’inspecteur, ou qui ont servi comme assistants pendant six mois au moins dans les écoles dirigées par des instituteurs brevetés ; les candidats pourvus d’un grade de l’ordre des arts et des sciences dans l’une des universités du royaume et qui, après avoir fait pendant trois mois au moins un cours de pédagogie dans une école subventionnée, ont donné des preuves d’aptitude aux fonctions de l’enseignement. Les candidats, après avoir passé l’examen, sont classés par ordre de mérite sur une liste comprenant quatre divisions pour la première année et trois divisions pour la deuxième année.

Les certificats sont de quatre classes. Les candidats placés après examen dans la première division de la deuxième année et les candidats en possession d’un grade universitaire reçoivent le certificat de la seconde classe seulement ; ils ne peuvent obtenir le certificat du degré supérieur qu’après l’avoir mérité par de bons services. Les certificats sont valables pendant dix ans ; au delà de ce terme ils peuvent être revisés et élevés à une classe supérieure, d’après les rapports dont les titulaires ont été l’objet de la part des inspecteurs. Les candidats placés dans la deuxième ou la troisième division de la deuxième année, ou dans l’une des trois premières divisions de la première année, reçoivent le certificat de la troisième, classe, lequel peut être porté à la classe au-dessus à la suite de bons services. Les candidats placés dans la quatrième division reçoivent le certificat de la quatrième classe ; ce certificat ne permet pas aux titulaires d’avoir des élèves-maîtres et il ne peut être élevé à un degré supérieur qu’après un nouvel examen. Jusqu’au 31 décembre 1879, le certificat de la quatrième classe peut être conféré sans examen, sur un rapport d’inspecteur, aux maîtres en exercice qui, ayant plus de 25 ans d’âge, ont été employés comme élèves-maîtres pendant cinq ans au moins et ont obtenu des témoignages satisfaisants de la part des administrateurs de leurs écoles. L’inspecteur doit déclarer en outre qu’ils ont l’aptitude professionnelle, que parmi les enfants dont ils ont eu la direction pendant les six mois précédents, 20 au moins ont été examinés et 15 ont passé l’examen du deuxième ou du premier degré en lecture, écriture et calcul. Si, dans son rapport, l’inspecteur déclare que le résultat de l’examen a été satisfaisant, le certificat de la troisième classe pourra être délivré ; mais il pourra aussi être retiré ou abaissé à la classe inférieure, si l’enseignement donné par le maître laisse à désirer.

L’obligation du certificat dont il vient d’être question n’est pas imposée pour la direction des salles d’asile ou pour les écoles dont la population est au-dessous de cent enfants. Dans ces deux derniers cas, un certificat est délivré aux femmes seulement, et celles-ci ne peuvent s’en prévaloir pour diriger une école plus importante. Les candidats pourvus d’un grade universitaire pourront exercer à titre provisoire jusqu’au 31 décembre 1879, sous la condition de passer l’examen pour le certificat de la 3e classe. Les élèves-maîtres qui ont accompli leur engagement d’une manière satisfaisante et qui, à la fin de l’engagement, ont passé l’examen avec succès, peuvent, sur le rapport favorable de l’inspecteur, obtenir à titre provisoire le certificat de la 4e classe, lequel devra être échangé contre un certificat définitif dès que le maître aura atteint sa vingt-cinquième année d’âge.

Les administrateurs sont tenus de faire connaître tous les ans si, par son caractère, par sa conduite et par son zèle, l’instituteur a bien mérité ; l’inspecteur, de son côté, doit dire si l’école qu’il a visitée est convenablement tenue au triple point de vue de l’organisation, de l’instruction et de la discipline. En tout temps le certificat peut être abaissé d’une classe, retiré temporairement ou à toujours à la suite d’un rapport défavorable de l’inspecteur ; mais la mesure n’est définitive qu’après que le maître qui en est l’objet a été entendu par le Département d’éducation

Élèves-maîtres. — Le titre d’élève-maître et d’élève-maîtresse est donné à de jeunes garçons et à de jeunes filles employés dans les écoles de jour ; mais il faut que l’école dans laquelle ils servent soit dirigée par un instituteur breveté, qu’elle soit convenablement installée, pourvue de l’ameublement et du matériel classique nécessaires, qu’elle soit dirigée avec intelligence, et de manière à en assurer le maintien pendant la durée de l’engagement des élèves.

Les élèves-maîtres et les élèves-maîtresses doivent, au moment où ils contractent l’engagement, avoir accompli leur quatorzième année ; les garçons ne peuvent servir que sous la direction d’un instituteur, et les filles sous la direction d’une institutrice. Dans les écoles mixtes, les jeunes filles peuvent recevoir l’instruction d’un instituteur, à la condition qu’une femme dont le choix aura l’approbation des administrateurs, sera toujours présente aux heures où l’enseignement est donné. Ils sont tenus les uns et les autres de passer les examens et de produire les certificats aux époques déterminées par les instituteurs. Le nombre maximum des élèves-maîtres ou élèves-maîtresses qui peuvent être engagés dans une école, est fixé à trois pour chaque instituteur ou institutrice en possession du brevet. Lorsqu’une vacance vient à se produire dans les emplois d’élèves-maîtres, il est pourvu provisoirement par des élèves moniteurs dont la nomination est temporaire.

À l’expiration de leur engagement, les élèves-maîtres sont absolument libres dans le choix d’une profession. Ils peuvent, s’ils désirent persévérer dans l’enseignement, obtenir un emploi de maître assistant dans les écoles ; ils peuvent également se présenter à l’examen pour l’admission dans une école normale, ou bien encore obtenir le certificat provisoire pour la direction d’une école peu importante.

Maîtres assistants. — Les élèves-maîtres qui ont accompli leur engagement d’une manière satisfaisante et les candidats qui ont passé avec succès l’examen pour le titre de maître assistant, peuvent être appelés à un emploi de cet ordre dans les écoles. Les maîtres assistants ne sont plus, comme les élèves-maîtres, astreints à l’examen de fin d’année ; mais ils sont tenus de produire le certificat de bonne conduite et d’aptitude professionnelle, lequel leur est délivré par les administrateurs et le directeur de l’école à laquelle ils appartiennent. Au cas d’une vacance dans le personnel des maîtres assistants, il y est pourvu par un autre assistant, et à défaut par un moniteur à titre provisoire. Les assistants font partie du personnel enseignant de l’école : ils traitent directement avec les administrateurs des conditions de temps et de traitement, et avis de leur nomination est donné au Département d’éducation, qui refuse ou approuve.

Écoles normales. — Les établissements dans lesquels les jeunes gens se préparent aux fonctions d’instituteur comprennent l’école normale proprement dite, l’école d’application où les élèves s’exercent à la pratique de l’enseignement et quelquefois aussi un bâtiment qui sert de logement aux élèves pensionnaires. Il n’est accordé de subsides qu’aux écoles normales dont l’installation a été reconnue suffisante et a été approuvée par le Département d’éducation. Des subventions pour dépenses d’entretien sont allouées chaque année aux écoles d’application dans les mêmes conditions qu’aux autres écoles.

Indépendamment des subventions pour les dépenses ordinaires, il est inscrit à l’actif de toute école normale un somme de 2,500 francs pour chaque maître et une somme de 1,750 francs pour chaque maîtresse qui, ayant reçu l’instruction dans cet établissement, a obtenu le certificat réglementaire pour les fonctions d’instituteur ou d’institutrice dans une école subventionnée, et qui en outre a été signalé comme ayant rendu des services dans l’armée ou dans la marine royale, dans les écoles des enfants pauvres, dans les écoles élémentaires et les écoles industrielles certifiées. La moitié seulement de la subvention est acquise aux écoles normales pour chaque maîtresse qui, après un an de séjour à l’école, a été appelée régulièrement à des fonctions d’institutrice dans une salle d’asile.

L’examen pour l’admission des candidats dans les écoles normales a lieu une fois par an, en juillet ; cet examen porte sur toutes les matières comprises dans le cours d’études des élèves-maîtres. La liste des candidats admis à passer l’examen est dressée par les administrateurs de l’école, sous leur propre responsabilité ; ceux-ci ont seulement à faire connaître au Département d’éducation que les candidats ont manifesté de bonne foi l’intention d’adopter et de suivre la carrière de l’enseignement, qu’ils ont été élèves-maîtres et ont accompli avec succès leur engagement, que les candidats qui n’ont pas été élèves-maîtres auront plus de 18 ans d’âge le 1er janvier qui suit l’époque de l’examen.

Les candidats qui ont passé avec succès l’examen sont classés par ordre de mérite. Les candidats de la troisième catégorie peuvent prétendre à un emploi de maître assistant ; ils ne peuvent ni être admis à l’école, ni obtenir le certificat provisoire. Les administrateurs peuvent proposer au Département d’éducation tout candidat déclaré admissible. Les candidats une fois admis prennent le titre d’élèves boursiers royaux (Queen’s scholars) ; mais avant leur admission ils sont soumis, à l’examen du médecin de l’école et doivent signer l’engagement professionnel. Au cas de non-accomplissement de l’engagement qu’ils ont souscrit, les candidats ne peuvent obtenir ni le brevet d’instituteur, ni l’approbation des inspecteurs exigée pour le brevet. Des examens ont lieu pour les élèves boursiers de l’école à la fin de la première et de la deuxième année du cours d’études ; pendant la session d’hiver, et avec le consentement des administrateurs, ils peuvent suivre les cours de l’une des universités d’Écosse et être dispensés aussi longtemps qu’il est jugé nécessaire d’assister aux leçons faites à l’école. L’examen portant sur les matières qui font l’objet de ces cours, est passé devant une commission composée d’inspecteurs des écoles et de professeurs appartenant aux universités. Sur la liste de classement des candidats il est fait spécialement mention de ceux d’entre eux qui ont été interrogés sur les matières facultatives, et les droits universitaires de ces élèves devenus boursiers royaux sont laissés à la charge de l’école. Le cours de la première année, dans les écoles normales d’institutrices, comprend certaines matières spéciales aux directrices d’asile, et un diplôme spécial est délivré aux élèves qui ont satisfait à cette partie de l’examen.

Pensions aux instituteurs et institutrices. — Des pensions peuvent être accordées aux instituteurs et aux institutrices qui sont hors d’état de continuer leur service et qui étaient déjà en fonctions au 9 mai 1862. Dans les conditions ordinaires, la limite d’âge est 60 ans pour les instituteurs et 55 ans pour les institutrices. Le candidat, à l’appui de sa demande de pension, doit produire les pièces établissant : 1° qu’il a exercé comme instituteur breveté soit dans une école publique ou subventionnée, soit dans une école normale ; 2° que l’âge ou les infirmités ne lui permettent plus de continuer le service ; 3° que, depuis le 9 mai 1862, il a été employé sans interruption en qualité d’instituteur ou de maître assistant dans les écoles élémentaires ou dans les écoles normales ; il doit en outre être recommandé par l’inspecteur et par les administrateurs des écoles dans lesquelles il a servi. Le taux de la pension varie entre 750 et 500 francs.

  1. Voir le numéro d’octobre 1879.