L’amour saphique à travers les âges et les êtres/18

(auteur prétendu)
Chez les marchands de nouveautés (Paris) (p. 149-153).

L’Amour saphique, Bandeau de début de chapitre
L’Amour saphique, Bandeau de début de chapitre

XVIII

LES ABERRATIONS DU GOÛT


Les habitudes saphiques familiarisent celles qui s’y livrent au goût caractéristique de la sécrétion particulière au vagin lorsque la femme est soumise aux sensations voluptueuses accompagnant l’orgasme vénérien.

Différente du sperme masculin, non seulement par le fait qu’elle ne contient aucune cellule germinative, mais par son caractère de plus grande fluidité, cette sécrétion possède néanmoins une saveur et une odeur spéciales, plus ou moins prononcées suivant la femme et le tempérament de celle qui les émet.

Les sécrétions des brunes sont plus fortes que celles des blondes, celles des rousses plus âcres. Celles des négresses rappellent l’odeur de l’urine de rat et celles de la race jaune un mélange de tilleul et d’iode.

Ces odeurs et saveurs naturelles sont, comme il est facile de l’imaginer, augmentées et viciées par les habitudes de propreté des individus et surtout par leur état de santé.

Lorsque la femme est d’une propreté scrupuleuse et que sa santé est rigoureusement bonne, ses sécrétions sont normales et n’exhalent que leur parfum caractéristique. Celui-ci, qui peut rester indifférent ou même être désagréable à une personne froide, devient, pour la passionnelle, un puissant moyen d’excitation.

Toutes les odeurs influent différemment sur les sens ; tandis que les unes produisent une impression désagréable ou pénible, d’autres sont agréables, d’autres irritantes ; il n’y a donc rien de surprenant à ce qu’une odeur sexuelle soit de nature à provoquer une sensation voluptueuse.

Chez les nymphomanes, plus ou moins accentuées, la passion de la sécrétion d’une femme en état d’amour prend des proportions parfois exagérées, et l’orgasme est provoqué, chez elle, rien que par le goût de ce liquide que leur bouche happe avidement.

C’est le même sentiment qui fait apprécier, à certaines femmes, la sève masculine.

Ceci n’est, en somme, qu’un instinct naturel poussé à l’excès ; mais, où cela devient de la perversion pathologique, c’est quand le goût de la sécrétion passionnelle se double du goût de l’urine de l’individu aimé.

Ces aberrations, si elles ne sont pas fréquentes, ne sont cependant pas fort rares.

Les ferventes de l’urine se divisent en deux groupes. Les premières sont des nymphomanes enragées qui adorent tout ce qui provient de l’être qui les affole.

Lorsqu’elles sont atteintes du délire passionnel, tout leur être, tous leurs nerfs tendus vers la seule vibration sensuelle les anesthésient pour toutes les autres sensations. Rien ne peut les dégoûter ni les révolter ; leur être normal a sombré, est momentanément remplacé par une sorte de créature démente suprêmement.

Les secondes sont des « masochistes », c’est-à-dire sont atteintes de cette manie spéciale qui fait goûter du plaisir dans l’humiliation, la honte et la souffrance.

Chez celles-ci, boire l’urine de leur amante n’est pas un acte de délire passionnel, mais un acte d’humilité qui, indirectement, provoque, en elles, le plaisir vénérien.

En général, les buveuses d’urine passionnelles sont des hermaphrodites ou des femmes-mâles, les autres sont des passives déséquilibrées.

Nombre de femmes hystériques, à un degré quelconque, ont des goûts bizarres momentanément ou de façon constante, croquent de la craie, de la terre, mâchent du papier, mangent des pommes de terre crues, etc. Il est bien rare que ces goûts anormaux n’aient pas une cause passionnelle qui, parfois, reste obscure pour le sujet lui-même.

Il est universellement reconnu que les femmes enceintes ont souvent des appétits anormaux. Il faut nettement écarter d’abord les menteuses et les simulatrices qui sont nombreuses et ne se prétendent des « envies » que pour se rendre intéressantes ; puis celles qui subissent une autosuggestion. Persuadées qu’elles auront des goûts pervers, elles s’en cherchent et s’en forgent.

Restent celles qui, sincèrement, sont brusquement saisies d’appétits contraires à toutes les habitudes naturelles alimentaires. Celles-là subissent le contre-coup d’une irritation sensuelle née, en général, par les habitudes voluptueuses qui leur sont familières et dont leur état de grossesse les éloigne.

Les lesbiennes par goût, et qui se livrent quand même à un époux ou un amant, par suite de considérations quelconques, sont particulièrement sujettes à ces aberrations du goût pendant leur grossesse, lorsque celle-ci éloigne d’elles leur amante répugnée.

Les vierges, tourmentées par leur sexe et demeurant chastes, sont fréquemment hantées par des désirs d’aliments singuliers.

Mlle Henriette V… qui, à dix-sept ans, n’était pas encore formée, bien qu’elle se livrât à de fréquentes masturbations, adorait mordre dans les fruits verts, au goût aigre, âpre ou amer, qui les aurait fait rejeter avec horreur par tout humain normal. Et, tandis qu’elle savourait une prunelle ou une graine de sorbier non mûre, son sexe était voluptueusement chatouillé. Un cornichon vert dévoré lui procurait immanquablement l’orgasme vénérien sans l’aide d’aucun attouchement, sans imagination érotique ou sentimentale d’aucune sorte.

Du reste, l’état pathologique de cette jeune fille n’était qu’accidentel et, ses règles apparues, elle cessa de rechercher les aliments bizarres. Néanmoins, elle fut toute sa vie une passionnelle aux goûts aberrés et se découvrit très vite une prédisposition au saphisme actif.


L’Amour saphique, Vignette de fin de chapitre
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