L’amour saphique à travers les âges et les êtres/16

(auteur prétendu)
Chez les marchands de nouveautés (Paris) (p. 135-137).

L’Amour saphique, Bandeau de début de chapitre
L’Amour saphique, Bandeau de début de chapitre

XVI

LES ABERRATIONS SAPHIQUES


Au mot « aberration » nous trouvons dans le dictionnaire cette définition :

« Écart d’imagination, erreur de jugement, anomalie dans la conformation des organes ou dans l’exercice de leurs fonctions. »

Nous lui donnons toutes ces acceptions et encore un sens plus large, car nous enfermerons dans les chapitres qui suivent toutes les observations que nous avons pu réunir, depuis les faits les plus simples jusqu’aux monomanies, aux cas tenant plus de la folie que du rêve désordonné passager d’un esprit exalté.

Tout amour comporte de l’aberration à un degré quelconque, léger ou plus ou moins prononcé. L’amour lesbien en est une, par son essence même. Et toutes ses manifestations en accusent de plus ou moins profondes, étranges, extraordinaires.

Mais, ainsi que l’ont dit maints philosophes, qu’est-ce qui, étant donné notre état de civilisation est véritablement normal en amour aujourd’hui ?

Et nous pourrions étendre cette question à tous les phénomènes de la vie humaine.

Qu’est-ce qui est normal dans notre existence de civilisés ?…

Le sommeil, la nourriture, ces nécessités de notre vie, ne sont-ils pas soumis à des lois humaines qui dérogent aux exigences de la nature.

Éclairer les rues et les appartements pendant la nuit, mener une existence active durant ces heures nocturnes qui devraient être consacrées au repos, à la léthargie réparatrice, n’est-ce pas là des habitudes anormales ?

Consommer des viandes cuites, des aliments épicés, des boissons alcooliques, des fermentations abondant en microbes dangereux, n’est-ce pas sortir de la vie naturelle normale de l’homme primitif ?

Nous nous arrêtons, mais tout dans le monde et la vie offre un exemple de la violation perpétuelle des lois naturelles par suite des lois et des habitudes que nous a apportées le fait de vivre en société.

L’amour, comme tout dans notre vie sociale, a dévié de son but primitif ; d’un besoin instinctif qu’il était à l’aube des sociétés, il est devenu un moyen d’obtenir du plaisir, des sensations violentes ou délicieuses. Il était indiqué que ces déviations se multiplieraient et dégénéreraient en excès chez certains êtres dont l’équilibre n’est pas absolument parfait.

Dans l’histoire des aberrations saphiques que nous allons essayer de conter, quelques-unes paraîtront fort ordinaires et fait normal pour beaucoup, d’autres seront taxées de pure démence ; la plupart sont communes à toutes les amours et pourraient se présenter aussi bien entre amants de sexe différent. Et entre elles, la ligne de démarcation entre la fantaisie et la pathologie est si difficile à tracer que nous ne le tenterons pas toujours, laissant souvent au lecteur le soin de la placer où il voudra.



L’Amour saphique, Vignette de fin de chapitre
L’Amour saphique, Vignette de fin de chapitre