L’Italie d’hier/Uffizi. — Filippo Lippi

Charpentier & Fasquelle (p. 87-89).

UFFIZI

Filippo Lippi. — Dans Filippo Lippi, ce peintre à la vie pleine d’aventures d’amour, un sentiment d’élégance qui va jusqu’au maniérisme, à la mignardise du type, en un dessin, cependant brisé et ressautant d’un goût gothique.

Ce sont des fronts énormément bombés, aux tons de la nacre, des cheveux légers comme une poussière, des paupières relevées sur un regard interrogateur, sur un chaste étonnement de l’œil, des nez, avec un petit méplat au bout, des bouches où la lèvre supérieure avance un peu, ainsi que dans une grave bouderie, des mentons pointus, et ce sont sur les blanches et transparentes chairs, des robes d’un vert ou d’un rouge passé de vieilles tapisseries, avec des flots de plis sur la poitrine.

Et ses têtes de vierge, Lippi ne les enveloppe plus de lourdes étoffes, mais de gazes tortillées, tuyautées, envolées, qui mettent de l’air autour des figures, et où la rougeur d’une petite oreille perce la transparence de ce voile à jour, descendant dans un arrangement coquet le long du col.

De Lippi, il faut encore voir à l’Académie des Beaux-Arts, cette tête de femme aux cheveux du blond pâle du chanvre, avec dedans des reflets violacés de la gorge de tourterelle, et tortillés et relevés, ces cheveux au-dessus des oreilles, dégageant les sveltes et élancées lignes du cou : cette femme aux carnations légèrement liliacées, et qui, dans ce doux effacement de la couleur réelle, dans cette espèce de dématérialisation spirituelle, n’a plus de la créature vivante que la vie du regard et le rouge amoureux de la bouche.