L’Hermaphrodite (Le Nismois)/Tome 2/04

(alias Alphonse Momas)
[s.n.] (Tome 2p. 37-49).
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IV


Leur douce intimité fut troublée par l’entrée subite d’Antioche, qui s’écria en les voyant s’essayer au plaisir.

— Eh bien, eh bien, déjà en train, mes poulettes ! Elles vont bien les jeunesses de notre temps.

— Comme les sœurs des Bleuets, répondit Marthe sèchement, ennuyée d’être dérangée. Avec Josépha, il est défendu de pénétrer ici, dans ma pièce, sans que j’appelle ou sans frapper.

— Je croyais, ma petite chérie, dit Antioche avec une voix plus caressante, que j’étais pour ton cœur un peu plus que tout le monde.

— Hier, possible ! Aujourd’hui, je n’en sais rien.

Prêt à s’irriter de la boutade, Antioche considéra avec plus d’attention la fillette, et fronça les sourcils devant l’air décidé qu’accusait son visage.

Patelin, redoutant que l’auxiliaire dont il avait le plus besoin pour le moment, ne lui manquât, il se glissa près des deux fillettes enlacées et les jambes à demi-collées, les pelota en disant :

— Pourquoi me rudoyer, ma petite adorée, parce que je t’ai aimée et que je ne te l’ai pas prouvé aujourd’hui ? Ne fallait-il pas que je m’occupe de te préparer de belles distractions pour la soirée !

— De belles distractions !

— Sans doute ! Puis, on n’est pas égoïste aux Bleuets, le plaisir de l’un augmente le plaisir de l’autre, et tu es un morceau si rare, que te garder pour soi seul serait commettre un crime aussi bien à ton égard qu’envers nos frères et nos sœurs, désireux de te fêter.

— Tu penses très juste, Antioche, dit Marthe quittant sa position au-dessous de Raymonde pour s’asseoir à son côté et faire face au moine.

Antioche, agenouillé devant les fillettes, les pelotait, Raymonde se laissant entraîner par l’exemple de son amie et ne protestant pas davantage ; il se releva et reprit :

— Je pensais bien que j’aurais ton approbation, et en attendant les fêtes de la soirée qui, j’en suis certain, te charmeront, si tu consentais à venir te montrer à quelques-uns de nos moines, réunis ici tout près pour veiller sur ta sécurité et t’éviter des ennuis, tu jugerais encore mieux qu’Antioche, malgré l’amour qu’il t’a voué, ne demande qu’à passer au second plan pour te favoriser dans tes joies.

— Me montrer à des moines, Antioche, es-tu fou !

— Ignores-tu que presque toutes les fêtes des Bleuets se célèbrent dans l’état de nudité pour les deux sexes, et que pour s’y accoutumer, les sœurs novices recherchent les moindres occasions de marcher devant les moines, sans aucun voile sur le corps ! Ne mérites-tu pas l’admiration des hommes ?

— Si tous me touchent, ils me brutaliseront.

— Je serais là pour arrêter ceux qui dépasseraient les bornes ; d’ailleurs, ton amie Raymonde peut t’accompagner, et certainement des sœurs se joindront à nous pour attirer les plus entreprenants.

— Je ne voudrais pas non plus qu’ils n’osassent rien.

— Allons, venez, on s’amusera.

Raymonde affichait moins de résolution que Marthe, elle ne recula néanmoins pas, et on se rendit à l’Économat où s’étaient enfermés les cinq moines menés par Antioche, des hommes carrés des épaules, aux visages gais et émerillonnés par la bonne vie, ayant devant eux, sur une table, des carafes d’un vin doré qu’ils consommaient avec forces délectations.

À l’apparition des fillettes, ils se dressèrent tous les cinq d’un même mouvement, croisèrent les bras sur leur poitrine, s’inclinèrent et dirent :

Gloria Domine, les chérubins nous visitent !

— Et viennent trinquer à votre concupiscence, fratres mei, répondit Antioche.

Ostende culum tuum, dit le plus près à Marthe, et Dominus erit in nobis.

— Dans son patois de latin, le frère Lupinius te demande de lui montrer ton cul, pour que le Seigneur soit parmi nous.

Marthe pouffa de rire et cria :

— Si je ne le montre pas, il n’y sera donc pas ?

— N’est-il pas en toi pour te former une digne et belle fille ! Et toi, n’es-tu pas ici pour la joie de nos yeux, de nos mains, de nos pines !

— Il faut le montrer, Antioche ?

— Puisqu’il te le demande.

Marthe se troussa sans plus d’embarras, et présenta la vue de son cul aux cinq moines qui, toujours mûs de la même impulsion, tombèrent à genoux, levèrent les mains en l’air et dirent :

Benedie nos, Domine.

Une main agrippa les mollets de la fillette, l’attira contre un visage, et un gros baiser se plaqua sur ses fesses. Elle vit une queue devant elle, qui, sortie de dessous la robe d’un moine, paraissait la magnétiser ; elle aperçut Raymonde assise sur les genoux d’un moine. Une main lui tendit un verre de vin, elle but et murmura d’une voix émue :

— Ouf, il commence à faire chaud par ici !

La langue de Lupinius lui farfouillait à grandes léchées tout le cul, la secouant de ses chatouilles ; elle porta la main sur la queue qu’on lui approchait, elle ne refusa pas de sucer Antioche, assis sur le dossier d’une chaise, pour avoir les cuisses à portée de son visage.

Raymonde, sur les genoux d’un moine réjoui, le frère Constantin, se voyait avec un peu d’effroi trousser par devant, et sentait un audacieux index lui grattouiller le bouton.

Elle gigottait, essayait de se défendre du moine en forçant des bras sur sa poitrine ; Constantin riait, accentuait son pelotage, s’emparait des mains de la fillette, lui baisait tous les doigts et disait :

— Tourterelle, ne fais pas la cruelle ; tu es dépucelée, donc tu es mûre.

Les mains jointes sur l’estomac, un autre moine regardait, le rire épanoui sur des lèvres lippues, suivait avec attention cette scène et criait :

— Sois sage, ma belle, ou on fessera ton petit cul.

— Tu entends, dit Constantin, on me conseille de te fesser.

Marthe, se détachant du trio auquel elle tenait tête, intervint avec ces mots :

— Si on la touche, si on la frappe, je m’en vais et je l’emmène.

Antioche lui appliqua le bout de la queue sur les lèvres, lui colla la tête sur ses cuisses en disant :

— Tais-toi et laisse faire.

Tout en grattant le clitoris de Raymonde, Constantin la maintenait troussée ; un autre moine, le dernier, ayant posé son verre, parce qu’il continuait à boire durant ces préliminaires de plaisir, s’abattit entre les cuisses de la fillette et se lança dans les minettes.

La scène s’amplifiait : trois moines par fille s’accordaient à merveille pour se faciliter dans leurs ivresses sensuelles.

Lupinius ne léchait plus le cul de Marthe, mais lui faisait minettes, ayant passé par devant entre ses jambes. Le moine qui montrait la queue, était venu derrière elle et remplaçait les feuilles de roses par de légers coups de queue, flagellant doucement le cul, avec promenades de plus en plus longues dans la raie, le gland se hasardant à coqueter avec l’anus qui ne le repoussait pas.

Marthe s’échauffait et ne s’effrayait pas ; elle se troussait elle-même pour mieux s’offrir à Lupinius dans ses minettes ; elle arrondissait le cul pour répondre à la fantaisie de celui qui s’apprêtait à l’enculer.

Raymonde tressaillait sous les larges sucées du frère Ovide, et apprenait l’art de la masturbation par celui qui menaça de la fesser, le frère Nestorien.

Marthe poussa un cri et échappa par une violente secousse à son trio de moines ; le frère Babylas ayant appuyé son gland sur le trou du cul, essayant de le franchir, et cette pression n’avait pas été heureuse. Le cul, un peu resserré de la fillette, pas assez préparé pour l’acte sodomite, se refusait à sa tentative.

Le cri de Marthe arracha Raymonde à l’engourdissement voluptueux qui la gagnait, elle se précipita vers son amie, et toutes les deux, face aux moines dont les yeux s’allumaient de lueurs luxurieuses, résolues à se disputer, les menacèrent du poing, criant :

— Non, non, plus rien, vous êtes trop nombreux.

— Les sales garces, dit Babylas, il faut qu’elles y passent toutes les deux ; on risque gros jeu pour l’hermaphrodite, il faut qu’elle soit raisonnable, n’est-ce pas, Antioche ?

— Bah, les frères, c’est trop jeunet pour de vaillantes pines comme les vôtres ! Ne les tourmentez pas et buvons ensemble, on fera la paix et on recommencera la manœuvre, quand on sera mieux disposé.

— Il y en a assez comme ça, dit Marthe, je retourne dans mon salon, avec Raymonde.

— Ton salon ! cria Constantin. Elle est à se tordre, cette poule, on va t’y mener à ton salon !

Antioche se plaça devant lui comme il se dirigeait sur Marthe, et voulant l’arrêter, lui dit :

— Ne fais donc pas l’animal, Constantin, on prépare les petits oiseaux avant de les croquer.

— Il ne nous croquera pas, et toi, tu ne me croqueras plus, répliqua Marthe. C’est une indignité de nous avoir conduites ici, Raymonde et moi ! Tu n’es pas amoureux de moi comme tu le prétendais !

Constantin avait repoussé Antioche qui, du reste, ne s’opposa plus à sa marche en avant. Marthe entraînant Raymonde, elles se réfugièrent derrière une table.

Ce fut un gros accès d’hilarité chez tous les moines, qui, se tapant sur les genoux et le ventre, crièrent :

— Ah, bonus Deus, qu’on va rire ! Les tourterelles qui se défendent ! Santa Maria, videte.

Antioche, se tenant à l’écart, les cinq moines entourèrent la table, Ovide parlementa :

— Cochonnettes de mon cœur, pas de sotte bégueulerie, on ne vous veut pas de mal, on ne vous veut que du bien ! De la complaisance comme tantôt, mes poulettes, tout se passera en douceur, ou sinon, foi de ma pine, de cette jolie pine que vous voyez, nous vous enculons toutes les deux et passons tous dans votre cul.

— Essaye, sale bête, répliqua Marthe saisissant un couteau qui se trouvait sur la table.

Qu’allait-il arriver ? Une lutte où les deux enfants eussent fini par succomber. Une porte s’ouvrit et Suzanne apparut.

Stupéfaite, elle dit :

— Que signifie ce désordre ?

Il y eut du désarroi chez les moines ; ils reprirent instantanément une attitude convenable, et Antioche répondit :

— Rien, on plaisantait avec Marthe et son amie.

— En se menaçant ! Explique-moi. pourquoi nos frères sont ici, sans que j’en ai été informée.

— Espérandie les a requis pour un travail urgent.

— Ce n’est pas dans les usages du Couvent.

— J’en avais été moi-même avisé par notre mère avant son départ, et mon titre joint à l’autorité de la sœur couvrant Marthe, suffit pour justifier cette exception aux règlements. Le cas n’est pas unique.

— Je veux bien l’admettre, mais la complaisance, que nous témoignons en toute occasion à nos frères, méritait la courtoisie de ne pas oublier les égards qui sont dus à la fonction que j’occupe.

— Je t’en aurais prévenue dès ce matin, Suzanne, si la fête de cette nuit ne nous eut pas éparpillés un peu partout.

— Le travail urgent, Antioche, n’est pas dans la violence qu’on s’apprêtait à commettre sur ces enfants.

— On riait et on plaisantait, il n’y aurait pas eu de mal.

— Est-ce bien vrai, Marthe, et consens-tu à rester avec nos frères ?

— C’est vrai, ma sœur, mais je tiens à me retirer.

Suzanne jeta un regard ironique sur les moines et dit :

— Travaillez, mes frères, je ramène les deux fillettes.

Ils n’osèrent pas s’opposer à leur départ, et le calme, un calme apparent, succéda au commencement d’orage qui avait grondé dans cette partie du Couvent.