L’Encyclopédie/1re édition/VACHE

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VACHE, s. f. (Hist. nat.) vacca, c’est la femelle d’un taureau. Voyez Taureau.

Vache, (Diete & Mat. méd) il n’y a que les paysans & les gens du peuple qui mangent la chair de la vache au-lieu de celle du bœuf : la premiere est communément plus dure, plus maigre, & par conséquent plus seche ; cependant les bouchers en vendent quelquefois pour du bœuf, même à Paris ; & comme ils ont soin de choisir des vaches jeunes & grasses, peu de personnes s’apperçoivent de la fraude qui dès-lors devient indifférente. Voyez Bœuf.

La vache est proprement un objet médecinal en ce qu’elle fournit un aliment médicamenteux qui tient un rang distingué parmi les secours médecinaux ; savoir, son lait qui a aussi mérité à ce titre un article particulier. Voyez Lait, Chimie, Diete & Mat. méd. Secondement, par un remede assez bisarre qu’on retire de sa fiente en la distillant au bain-marie, & qui est connu sous le nom d’eau de mille fleurs, qui passe dans l’usage intérieur pour un antipleurétique excellent, & pour un bon diurétique, & même litontriptique, & dans l’usage extérieur pour un excellent cosmétique : au reste, c’est-là un remede fort propre & fort élégant en comparaison du suc même de la fiente de vache récente, que les paysans avalent dans quelques contrées pour se guerir des fievres, & qu’Ettmuller recommande non-seulement pour cet usage, mais même contre la pleurésie, appliquée extérieurement en guise de cataplasme : elle passe pour un très-bon remede contre les brûlures, contre les douleurs des membres, les tumeurs œdémateuses, &c.

L’urine de vache récente & fournie surtout par une vache noire, a été aussi un remede interne contre l’hydropisie, la goutte & la paralysie, qui a été connue aussi sous le nom d’eau de mille fleurs ; Jean Becler observe dans sa continuation de la cynosure d’Herman, que la manie pour ce remede ridicule qu’il avoit vu très en vogue dans son pays, ne dura pas long-tems, parce que ce remede purgeoit jusqu’au sang, & abattoit considérablement les forces, ce que la plupart des sujets ne pouvoient supporter. (b)

Vache rousse, (Critiq. sacrée.) la vache rousse, ou la genisse rousse, étoit la victime d’expiation pour les impuretés que les Juifs contractoient par la présence ou l’attouchement d’un mort. On prenoit une génisse sans défaut, & qui n’avoit point porté le joug. On la livroit au grand-prêtre, qui l’immoloit hors du camp en présence de tout le peuple. Il trempoit son doigt dans le sang de l’animal, & en faisoit sept fois l’aspersion contre le devant du tabernacle ; ensuite on brûloit la génisse toute entiere. Le grand-prêtre jettoit dans le feu du bois de cedre, de l’hyssope, & de l’écarlate teinte deux fois. Un homme recueilloit les cendres de la génisse, & les portoit dans un lieu pur hors du camp ; ensuite on les mettoit en réserve pour l’assemblée des enfans d’Israël, afin qu’ils en fissent de l’eau d’expiation pour se purifier des impuretés légales : tout cela fut ordonné par Moïse, & est détaillé dans le livre des nombres, xix. vers. 2. 6. & 9.

Il n’y avoit que le grand-prêtre qui eût droit d’offrir le sacrifice de la vache rousse ; mais tout israëlite, pourvu qu’il fût pur, pouvoit faire les aspersions de la cendre mêlée avec de l’eau, parce qu’il auroit été trop incommode de venir au temple, pour expier une impureté que la mort des proches pouvoit rendre très-fréquente. (D. J.)

Vache, (Corroyeur.) de tous les animaux qui sont sur la terre, il n’y en a guere dont les hommes tirent plus d’utilité que de la vache ; car indépendamment des veaux qu’elle produit, sa chair, son lait, ses cornes, ses os, sa graisse, son poil & sa peau, sont d’usage soit pour la nourriture de l’homme, soit pour le commerce.

Les peaux de vache qu’on appelle cuirs, se vendent en poil, vertes, salées ou seches, & sans poil, tannées, passées en coudrement ou en croutes, courroyées ou apprêtées de diverses façons qu’on trouvera expliquées dans les article Cuir, Peau, Tanner & Courroyeur.

Le long poil de la queue des vaches fournit aux selliers une partie du crin qu’ils emploient, & le poil court dont toute la peau de la vache est couverte, sert à rembourer les selles des chevaux, les bâts des mulets, &c.

Vache-dure, (Corroyerie.) c’est une peau de vache où le corroyeur n’a mis du suif que du côté de la fleur, & n’a mis ni suif, ni huile du côté de la chair. (D. J.)

Vache de Russie, (Corroyerie.) sorte de cuir, ou peau de vache qui vient toute aprêtée de Moscovie, où elle se prépare d’une maniere toute particuliere, qui n’est guere connue que de ceux qui s’en mêlent dans le pays. Savary.

Vache en grain, (Tannerie.) peau ou cuir de vache, dont la superficie est devenue grenue par les différens apprêts qu’on lui a donnés, & dont on fait les empeignes des souliers. (D. J.)

Vache de sel, (Saline.) on appelle vache de sel en Poitou, ces monceaux de plusieurs milliers de muids de sel, qu’on éleve en forme de meule de foin, pour achever de le sécher, en attendant la vente.

Vaches, terme d’Imprimerie ; ce sont les cordes qui tiennent au berceau & au train de derriere d’une presse : elles assurent l’endroit jusqu’où doit aller le coffre sur le derriere, & empêchent qu’il ne recule plus qu’il ne faut. Voyez les Pl. & les fig. de l’Imprimerie.

Vache artificielle, (Chasse.) c’est la toile faite en forme de vache, dont on se sert pour approcher les canards, & dont se servent aussi ceux qui chassent à la tonnelle.

Vache de Barbarie, (Hist. nat. Ichthiolog.) on a donné ce nom dans les mémoires pour servir à l’hist. nat. des anim. dressés par M. Perrault, à un animal à-peu-près de la grandeur d’une vache, & d’un poil roux, un peu plus court que celui des vaches, presqu’aussi gros vers la pointe que vers la racine, & de couleur plus foncée vers la racine que vers la pointe. Cette vache de Barbarie ressemble plus au cerf qu’à la vache par l’habitude du corps, par les jambes & par l’encolure. Les cornes sont de même nature que celles de la vache, mais elles en different par plusieurs caracteres ; elles prennent leur naissance fort près l’une de l’autre ; elles sont longues d’un pié, fort grosses, recourbées en arriere, noires & torses, comme une vis. La queue est courte & terminée par un bouquet de crins longs de trois pouces ; les yeux sont placés si près des cornes, que la tête paroît n’avoir presque point de front. Cet animal n’a que deux mamellons. Les épaules sont fort élevées, & forment une bosse entre l’extrémité du col & le commencement du dos : il y a une callosité au bas du sternum. On a présumé que cette vache de Barbarie a plus de rapport au bubale des anciens, qu’au petit bœuf d’Afrique. Mémoires pour servir à l’histoire naturelle des animaux.

Vache marine ou Bête a la grand-dent, odobenus, animal amphibie qui a beaucoup de rapport au lamantin & au veau-de-mer, sur-tout pour la forme du corps & des piés, &c. Voyez Lamantin. La vache-marine a la tête grosse & écrasée sur le devant, le museau entouré de gros poils, & la peau épaisse de près d’un pouce, & couverte d’un poil court, ferme, & de couleur brune-jaunâtre. Les oreilles ne sont apparentes à l’extérieur que par un orifice qui se trouve de chaque côté de la tête. Il y a huit dents molaires à chaque mâchoire, & deux grandes dents canines à la mâchoire supérieure, recourbées en-bas, & longues de deux piés : l’animal s’en sert pour sa défense, & pour traîner différentes choses sur la glace & sur les rivages, car il ne peut pas rester long-tems dans l’eau. La vache-marine est un animal du Nord, elle a jusqu’à seize piés de longueur, & huit piés de circonférence. Voyez Brisson, reg. anim. p. 48.