L’Encyclopédie/1re édition/SUREAU
SUREAU, s. m. (Hist. nat. Bot.) sambucus, genre de plante à fleur monopétale, en forme de roue, & profondement découpée ; le milieu de cette fleur est percé par la pointe du calice, comme par un clou : le calice devient dans la suite une baie pleine de suc, qui renferme des semences oblongues. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.
Tournefort établit sous ce genre de plante 7 especes de sureau, & met à leur tête le sureau commun à fruit noir, sambucus fructu in umbellâ nigro, I. R. H. 606. en anglois, the common elder Wilth black berries.
C’est tantôt un arbre de moyenne hauteur qui répand ses rameaux au large ; tantôt un arbrisseau dont les branches sont longues, rondes, remplies de beaucoup de moëlle blanche, ayant le bois peu épais, vertes d’abord, & puis grisâtres ; son tronc est couvert d’une écorce rude, crevassée & cendrée ; sur cette écorce extérieure il s’en trouve une seconde qui est verte, & d’usage en médecine ; son bois est assez solide, jaunâtre, mais facile à couper ; ses rameaux sont garnis de nœuds par intervalles ; ses feuilles sont attachées cinq ou six le long d’une côte, comme celles du noyer ; mais plus petites, dentelées en leurs bords, & d’une odeur forte.
Ses fleurs naissent aux sommités des branches en ombelles ou parasols, amples, larges, formées en bassinets ou rosettes en cinq quartiers, blanches, petites, fort odorantes avec cinq étamines à sommets arrondies. Après que les fleurs sont tombées, il leur succede des baies grosses comme celles du génévrier, rondes, vertes d’abord, noires dans leur maturité, pleines d’un suc rouge foncé ; elles contiennent ordinairement dans une seule loge trois semences menues, convexes d’un côté, & de l’autre anguleuses. Ses baies s’appellent dans les boutiques, grana actes.
Cet arbre croît presque par-tout, dans les haies, dans les fosses des villes, dans les vallées, aux lieux ombrageux & humides ; il pousse de très-bonne heure, & fleurit en Mai & Juin : ses baies sont mûres en automne. Si on le cultive dans les jardins, il forme un arbre assez gros, élevé, & de longue vie. Il est rare en Italie, & dans les pays chauds, parce qu’il aime les terres grasses. (D. J.)
Sureau, (Mat. méd.) ou grand sureau ; l’usage du sureau est très-ancien dans la médecine ; on y emploie son écorce moyenne, ses feuilles, ses fleurs & ses baies, qui sont connues dans la pharmacie sous le nom de grana actes. Les anciens ont employé la décoction des feuilles & des tendrons de sureau, aussi bien que la décoction des racines dans le vin pour vuider les eaux des hydropiques par les selles & par les urines. Les fleurs fraîches sont aussi laxatives, mais l’écorce moyenne est celle des parties du sureau, qui est regardée comme possédant la vertu purgative au plus haut degré. Aussi n’est-ce que cette partie que les modernes emploient à titre de purgatifs. Ils en donnent la décoction, le suc ou l’extrait. Ces remedes sont véritablement hydragogues, & ils agissent assez communement par haut & par bas, font ordinairement assez bien dans les hydropisies, & agissent sans violence & sans accident.
La dose du suc est d’une once ; celle de l’écorce, employée à l’infusion de demi-once ; & celle de l’extrait depuis demi-gros jusqu’à un gros. Les remedes analogues tirés du petit sureau ou yeble, sont beaucoup plus forts. Voyez Yeble.
Les fleurs seches de sureau qu’on n’emploie gueres que dans cet état, passent pour diaphorétiques & pour carminatives. On les fait entrer quelquefois à ce dernier titre dans les lavemens. Ses fleurs sont un remede assez peu usité & assez foible. Leur principal usage est diétetique. On en prépare par infusion pour l’usage de la table un vinaigre appellé communément vinaigre surat, qui est fort agréable, & qui vraissemblablement n’emprunte aucune autre qualité, soit bonne, soit mauvaise, de l’infusion de ces fleurs ; quoique quelques pharmacologistes n’aient pas manqué de dire qu’il étoit moins contraire à l’estomac & plus sain que le vinaigre pur & commun ; & que quelques personnes trouvent peut-être avec plus de fondement que ce vinaigre à une odeur nauséeuse, & portant à la tête.
L’eau distillée des fleurs de sureau est regardée comme céphalique, cordiale, diaphorétique, &c. mais elle est si foible, chargée d’un parfum si leger, qu’on ne peut guere compter sur un pareil remede.
On prépare avec le suc des baies de sureau & la farine de seigle des rotules ou trochisques qu’on fait cuire au four, & qui sont connus dans les pharmacies sous le nom de trochisci granorum actes, qui sont recommandés pour les dissenteries, à la dose de deux gros jusqu’à demi-once ; c’est un remede peu usité & peu éprouvé.
On prépare aussi avec le même suc & une quantité convenable de sucre (demi-livre, par exemple, sur une livre de suc), un rob qui est plus usité que le remede précédent contre la même maladie. Ce rob est mis aussi au rang des bons diurétiques & des sudorifiques legers.
Les usages extérieurs du sureau sont les suivans : ses feuilles, qu’on a fait échauffer & ressuer sur le feu, étant appliquées sur les enflures, sur les plaies, sur les vieux ulceres, & sur les brûlures, sont regardées comme produisant de très-bons effets. Ces feuilles sont aussi un ingrédient très-efficace des vins aromatiques.
L’écorce moyenne pilée passe aussi pour un excellent remede contre la brûlure. On en compose encore contre ce mal plusieurs onguens, qui sont tous, sans en excepter celui de Mathiole, des remedes assez mal-entendus, ou au-moins à la vertu desquels l’écorce de sureau ne contribue en rien.
On prépare avec les fleurs de sureau une huile par infusion, qui est adoucissante comme huile d’olive, & peut-être un peu résolutive. On fait aussi imbiber ces fleurs dans de l’eau, dans du vin, ou dans l’eau distillée des mêmes fleurs, & on les applique sur les érésipeles, les dartres, &c. à titre de remedes anodins, adoucissans, légerement résolutifs. On peut assurer qu’il est au-moins assez innocent.
Les fleurs de sureau entrent dans l’eau vulnéraire & le baume tranquille ; les feuilles dans l’onguent martiatum, & l’onguent pour la brûlure ; les baies dans l’eau hystérique ; l’écorce dans l’onguent pour la brûlure. (b)