L’Encyclopédie/1re édition/SOMPTUAIRES, lois

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SOMPTUAIRES, lois, (Jurisprud.) ce sont des lois faites pour restraindre le luxe dans les habits, les équipages, la table, &c. Voyez Loi.

La plûpart des nations ont eu dans différens tems leurs lois somptuaires : & il y en a qui sont encore en vigueur, comme chez les Vénitiens, les François ; &c. Mais on remarque qu’il n’y a point de lois plus mal observées que les lois somptuaires.

Les lois somptuaires de Zaleucus, cet ancien législateur des Locriens, sont fameuses. Elles ordonnoient qu’une femme ne se feroit point accompagner dans les rues de plus d’un domestique, à-moins qu’elle ne fut ivre ; qu’elle ne pourroit point sortir de la ville pendant la nuit, à-moins que ce ne fut pour commettre la fornication ; qu’elle ne porteroit point d’or, ni de broderie sur ses habits, à-moins qu’elle ne se proposât d’être courtisane publique : que les hommes ne porteroient point de franges ni de galons, excepté quand ils iroient dans de mauvais lieux, &c.

Les Anglois ont eu aussi leurs lois somptuaires, mais elles ont toutes été revoquées par le statut premier de Jacques I. ou sont tombées en désuétude.

Sous le regne de Charles IV. Cambden dit qu’on avoit porté si loin le luxe dans les chaussures, qu’on fut obligé de défendre aux hommes de porter des souliers de plus de six pouces de largeur du côté des doigts ; les autres habillemens étoient si courts, qu’il fut ordonné par le statut 25 d’Edouard IV. que toutes personnes d’une condition inférieure à celle des lords, porteroient des robes ou habits de telle longueur qu’elles pussent, quand la personne est debout, lui couvrir les fesses.

Chez les Romains il y avoit quantité de lois somptuaires. La loi Orchia limitoit le nombre des convives dans les fêtes, sans limiter la dépense. La loi Fannia, qui fut faite 32 ans après, ordonnoit que dans une fête ordinaire on ne pourroit pas dépenser plus de 10 as, & plus de 100 as dans les fêtes solemnelles, comme les saturnales, &c. & Gellius nous apprend que 10 as étoient le prix d’un mouton, & 100 celui d’un bœuf.

La loi Didia qui fut faite 18 ans après, ordonna que les premieres lois somptuaires seroient exécutées non-seulement à Rome, mais même par toute l’Italie ; & qu’en cas de transgression, non-seulement le maître de la fête, mais aussi les convives seroient sujets à l’amende. Voyez l’article Loi.