L’Encyclopédie/1re édition/SILLON

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SILLON, s. m. (Agriculture.) c’est une longue raie qu’on fait sur la terre, quand on la laboure avec la charrue. La figure que le laboureur donne à son champ en le façonnant, doit être réglée suivant ce qui est plus avantageux pour la terre, & pour les bêtes qui labourent.

On ne doit jamais faire de sillons trop longs, parce que les bêtes ont trop à tirer tout d’une traite ; les raies n’en sont pas si étroites, & la terre n’en est pas si bien mêlée, ni figurée agréablement ; c’est pourquoi les curieux veulent qu’on sépare leurs terres par quartiers, chacun de quarante perches de long tout au plus.

Quand on laboure sur une colline, pour soulager les bêtes, & faire sa besogne plus aisément, il faut travailler en travers horisontalement à la colline, & non pas de haut-en-bas.

On laboure à plat uniment & également les terres, qui comme dans l’île de France, ont besoin de l’arrosement des pluies. Au contraire on laboure en talus & en dos d’âne à sillons hauts & élevés, les terres argilleuses, les terres humides, & généralement toutes celles qui n’ont pas besoin d’eau, ou qui sont difficiles à se dessécher. Ainsi dans la Brie & dans la petite Beausse, on laboure par planches, & on laisse d’espace en espace, un large sillon en talus pour recevoir les eaux, & les porter dans des fossés qui sont pour cet effet aux deux côtés des terres.

Au surplus, on fait les sillons plus ou moins larges, plus ou moins élevés, & les raies plus ou moins serrées dans certains pays que dans d’autres. On les fait pourtant en général beaucoup plus élevés, moins larges, & moins unis dans les terres humides & grasses, que dans les terroirs secs ; & cela pour faciliter l’écoulement des eaux qui pénetrent difficilement dans ces terres, & pour empêcher qu’elles n’y croupissent.

Il y a des laboureurs qui ne font leurs sillons que de quatorze à quinze pouces de largeur, sur treize ou quatorze de hauteur ; quand on fait de ces sillons étroits, il est bon de labourer du midi au nord, pour qu’ils ayent le soleil de deux côtés, & que les grains y mûrissent également ; sinon ceux du côté du midi mûriroient huit à dix jours avant les autres. Il n’est pas nécessaire d’avoir cette attention quand les sillons sont plats, larges, spacieux de huit, dix à douze piés, parce qu’ils ont le soleil de tous leurs côtés. Les terres fortes, qui boivent l’eau assez aisément, peuvent être labourées en planches, larges de huit à dix piés, dont le milieu sera pourtant un peu plus élevé que les deux extrémités, afin de faciliter l’écoulement des eaux les plus abondantes, parce que les blés, principalement le seigle, les craignent beaucoup ; elles battent la terre, & la font durcir, surtout quand elles sont suivies de sécheresse ; mais quand elles tombent doucement, elles fertilisent beaucoup le terrein.

Il y en a une espece de terre si seche, que l’eau s’y imbibe aussi-tôt qu’elle tombe : il lui faut de l’eau presque tous les huit jours en été, pour qu’elle fasse de belles productions. Quand on laboure de ces sortes de terres, on n’y fait ni sillons ni planches ; mais on met ces terres à uni à tous les remuemens qu’on y fait, & même après que le grain y est semé. Ce que les Laboureurs appellent labourer à uni, c’est relever avec l’oreille de la charrue toutes les raies de la terre d’un même côté ; de maniere que lorsqu’on a achevé de labourer le champ, il ne paroît aucun sillon, ni aucune enrue qui est un sillon fort large, & composé de plusieurs raies élevées par la charrue ; on se sert d’une charrue à tourne-oreille pour cette maniere de labourer, & on laboure ainsi principalement les terres pierreuses, où on ne met souvent que de menus grains.

Il est assez d’usage de donner le troisieme labour aux terres, différemment des deux précédens, c’est-à-dire, en traversant les premieres façons ; & ce labour est le meilleur qu’on puisse donner, parce qu’il ne laisse aucune ordure, & que toute la terre est également remuée. Cependant, il n’est bon que pour les pays secs, où l’eau s’imbibe promptement, & il ne vaut rien pour les terres qui sont trop humides, ou qui retiennent long-tems de l’eau, à-moins que l’année ne soit extremement seche ; autrement les eaux qui surviendroient, & qui n’auroient aucun écoulement de dessus cette terre ainsi traversée, l’humecteroient si fort, qu’on n’en pourroit tirer aucun bon parti dans la suite. Liger. (D. J.)

Sillon, (Conchyl.) les Conchyliologistes appellent sillon une cavité formée par l’élévation de deux stries, ou de deux côtés.

Sillon, en Anatomie, petite trace sur les os formée par le battement des arteres lorsqu’ils sont encore mols ; on observe plusieurs de ces sillons dans la face interne des os pariétaux. Voyez Pariétal.

Sillon, en Fortification, est une espece de petit terreplein qu’on forme dans le milieu d’un fossé extrèmement large, pour en diminuer la largeur ; il est couvert d’un parapet & comme la tenaille. Voyez Fossé.

Sillon, (Géog. mod.) lac d’Irlande, dans l’Ultonie ; il sépare la frontiere méridionale du comté de Cavan, de celle du comté de West-Méath.

Le sillon se nomme plus ordinairement enveloppe. Voyez Enveloppe. (Q)

Sillons, (Filage.) ce sont les diverses élévations que forme le fil sur la bobine du rouet en passant par les différentes distances de l’épinglier. Les sillons des fileuses ne doivent point être trop élevés, de peur que le fil ne s’éboule. Savary. (D. J.)