L’Encyclopédie/1re édition/RECUL
RECUL, s. m. (Fortificat.) est le mouvement en arriere de quelque corps que ce soit, mais singulierement d’une arme à feu. Voyez Canon, Mortier, &c.
Plus la charge est forte, cæteris paribus, plus le recul est considérable.
Par une expérience faite en présence de la société royale de Londres, & rapportée dans les Transactions philosophiques, on a trouvé que des canons avec une certaine charge, envoient le boulet à gauche de leur direction naturelle, & que le recul au contraire se faisoit en tirant sur la droite.
Quelques membres de l’académie royale des Sciences doutant de la justesse de l’observation, M. Cassini le jeune entreprit de répeter l’expérience ; ce qu’il fit avec une machine aussi semblable qu’il put à celle dont on s’étoit servi en Angleterre, & réitéra l’opération quantité de fois.
Le résultat de cette expérience fut que le boulet, quand le canon avoit la liberté du recul, s’écartoit en effet à droite de la ligne qu’il auroit suivie si le canon eût été arrêté de maniere à ne point pouvoir reculer ; mais on ne trouva point ces deux directions contraires entre le boulet & le recul qu’on avoit trouvées en Angleterre. Voyez l’histoire de l’academie royale des Sciences, année 1703, p. 120. &c. Chambers.
Le recul est causé par l’action de la poudre, qui en s’enflammant agit d’abord également sur toutes les parties intérieures de la chambre, ce qu’elle ne peut faire sans donner un petit mouvement à la piece de tout sens ; mais comme la résistance des côtés dirige l’action de la poudre, selon la direction de l’ame du canon, lorsqu’elle agit sur le boulet pour le pousser ou chasser en avant, elle agit aussi vers la partie de l’ame opposée à l’ouverture de la piece, c’est-à-dire vers la culasse, à laquelle elle donne ce mouvement en arriere qu’on appelle recul. Le recul diminue une partie de l’action de la poudre sur le boulet, mais on ne peut éviter cet inconvenient. Si l’on vouloit empêcher l’affut de s’y prêter, l’action de la poudre le briseroit en très-peu de tems. (Q)
Recul, (Horlogerie.) c’est dans l’échapement dit à recul, l’excès de la force motrice transmise sur le régulateur, qui par son mouvement acquis fait retrograder la roue de rencontre.
Dans l’échappement à recul & à palette, l’on sait que l’axe de la roue de rencontre est perpendiculaire sur celui du balancier, & que la roue poussant par une de ses dents la palette du balancier, lui communique le mouvement en lui faisant décrire un arc appellé arc de levée ; & après cette levée le balancier ayant reçu du mouvement, continue l’arc qui devient cinq ou six fois plus grand. Pendant ce tems la dent diametralement opposée, qui est la suivante, pour pousser l’autre palette se trouve en action sur elle, & tend par son mouvement propre à retenir la vibration. Mais comme le balancier a acquis de la force pour continuer l’arc commencé, il arrive que la palette opposée qui doit succéder, a obligé la roue de rencontre de retrograder ; c’est ce qui forme le recul.
Ce recul est en raison composée de la directe des arcs que le balancier décrit après la levée, & de l’inverse du nombre des dents de la roue. Le balancier ayant fini sa vibration, se trouve ramené par le concours de la roue de rencontre qui reprend son mouvement direct & de la réaction de son ressort spiral.
Dans cet échappement, la vibration du balancier est gênée par l’extrémité de la palette opposée à celle qui vient de décrire l’arc de levée ; d’où il faut remarquer que le levier de résistance est plus court que la palette, puisqu’il n’est à cause de l’obliquité, que le sinus de l’angle qu’elle forme sur le plan de la roue ; de sorte que ce levier étant très-court & très-puissant pour faire retrograder la roue de rencontre, & celle-ci au contraire n’ayant que peu de force à l’extrémité de son rayon pour gêner la vibration, cet échappement est celui qui permet le plus puissant régulateur. M. Romilly.