L’Encyclopédie/1re édition/QUATRE-TEMS

QUATRE-TEMS, s. m. pl. (Hist. ecclés) jeûnes de l’Eglise dans les quatre saisons de l’année pendant trois jours d’une semaine en chaque saison, savoir le mercredi, le vendredi & le samedi. Voyez Saison & Jour.

Quelques-uns ont attribué l’institution au-moins de trois jeûnes par an aux apôtres, d’autres au pape Calliste, mais cette opinion n’est fondée que sur une fausse decrétale de ce pontife. Il est certain que le jeûne des quatre-tems étoit établi dans l’Eglise romaine dès le tems de S. Léon, qui distingue nettement dans ses sermons les jeûnes qui se pratiquoient aux quatre saisons de l’année, dans lesquels on jeûnoit le mercredi, le vendredi & le samedi ; savoir celui du printems, dans le carême ; celui de l’été, avant la Pentecôte ; celui d’automne, au septieme mois ; & celui de l’hiver, au dixieme. On ne trouve point cet usage établi dans l’église greque, on lit seulement dans les constitutions apostoliques qu’il y avoit une semaine de jeûne après la Pentecôte. L’observation du jeûne des quatre-tems a passé de l’Eglise romaine dans les autres églises d’Occident, mais elle n’y a pas été tout-à-fait uniforme pour ce qui regarde le tems & les jours de ce jeûne. Le jeûne des quatre-tems du printems s’observoit d’abord en la premiere semaine du mois de Mars ; celui de l’été, dans la seconde semaine du mois de Juin ; celui de l’automne, dans la troisieme semaine du mois de Septembre ; & celui de l’hiver, en la quatrieme semaine du mois de Décembre. Mais le pape Gregoire VII. vers la fin du xj. siecle, ordonna que le jeûne de Mars seroit observé en la premiere semaine de carême, & celui de Juin dans l’octave de la Pentecôte, ceux de Septembre & de Décembre demeurant aux jours où ils se faisoient auparavant. Il semble que dans le vij. siecle où vivoit S. Isidore, on ne connoissoit en Espagne que deux de ces jeûnes, celui d’après la Pentecôte & celui du mois de Septembre. Le concile de Mayence, que Charlemagne fit assembler en 813, parle des quatre-tems comme d’un établissement nouveau qui se faisoit en France à l’imitation de l’église de Rome. Les jeûnes des quatre-tems n’ont pas été institués seulement pour consacrer à Dieu les quatre parties de l’année par la mortification & la pénitence, comme dit S. Léon, & pour obtenir sa bénédiction sur les fruits de la terre, mais aussi pour implorer la grace du S. Esprit dans les ordinations des prêtres & des diacres qui se faisoient le samedi de ces quatre-tems, comme on le voit dans l’épître IX. du pape Gélase vers la fin du v. siecle. Thomassin, traité historique & dogmatique des jeûnes de l’Eglise.

M. Chambers observe que dans les lois du roi Alfred & dans celles du roi Canut les jours de jeûnes des quatre-tems sont appellés ymbren, c’est-à-dire jours circulaires, d’où l’on a fait par corruption en anglois ember-days. Leurs canonistes appellent ces semaines quatuor anni tempora, les quatre saisons cardinales sur lesquelles se fait la révolution de l’année. C’est pourquoi Henshaw pense que ce mot ymbren a été formé par corruption de tember, qui vient de tempora.

Somner croit qu’originairement c’étoient des fêtes instituées pour implorer la bénédiction de Dieu sur les fruits de la terre ; &, suivant cette idée, Skinner pense que le mot ember vient des cendres que l’on répandoit alors sur la tête des fideles en signe de pénitence. Les Anglicans ont aussi destiné ces jours à l’ordination des prêtres & des diacres, suivant leur rit. Chamb. Diction. lettre Q, au mot Quatre-tems.