L’Encyclopédie/1re édition/POUSSE-PIÉ

POUSSE-PIÉ, terme de Pêche, usité dans le ressort de l’amirauté de Bourdeaux ; c’est le petit bateau qu’on appelle acon.

Pousse-pié, Tosses ou l’Acon, est composé seulement de trois planches, longues de 6 à 7 piés, & large de deux environ ; quarrées par un bout, & un peu relevées par l’autre. Le pêcheur se met sur le côté ou sur le bout de l’arçon, d’où agitant son pié en le poussant sur les vases, il coule dessus & se transporte où il lui plaît : sans cette espece de bateau les pêcheurs ne pourroient aborder leurs pêcheries, où l’on ne peut aller que dans les marées des vives eaux ; aux autres tems elles sont inutiles, la marée n’y montant que très-peu, ou même point du tout.

Les pêcheurs du port des Barques, dans le ressort de l’amirauté de Marennes, ont, outre les deux especes de bateaux pêcheurs, traversier & filadieres, une espece de petit canot particulier qu’ils nomment acon, bien différent pour sa construction de celui dont nous avons parlé ci-dessus, & dont nous ferons mention ci-après : le plan représente un ancien écu d’arme ; les côtés sont formés de trois planches posées à clin ; le fond ou la semele est aussi formée de planches plates, sur lesquelles il y en a trois autres, une aux deux côtés, & une troisieme au milieu pour renforcer le fond, qui est aussi tout plat, & le faire mieux couler sur ces vases où l’on le pousse lorsque la mer est basse, les bords de la Charante, depuis le port des Barques jusqu’au-dessus de Tonnay-Charante, étant bordée de vase & de bourbe, les bateaux pêcheurs n’en peuvent point approcher.

Ces acons vont aussi à la rame ; l’arriere n’a point d’étambot étant coupé tout à plat, & de la largeur de l’acon, il peut avoir au plus un pié de queste par l’estrave ; les acons n’ont que trois varangues toutes plates, & autant de genoux, dont le bout déborde pour servir de toles à rames ; ces petits acons peuvent cependant porter jusqu’à trois quarts de tonneau ayant 3 piés de bordée, 5 piés de largeur, & environ 15 piés de long.

Les acons ne peuvent soutenir la vague dans les gros tems ; elle les combleroit d’abord ; ce sont cependant les plus grands de ces sortes de petits bateaux. Cette sorte d’acon, & la manœuvre de la conduire, est représentée dans la figure 3. Pl. II. de Pêche.

Les pêcheurs du port des Barques se servent de leurs acons pour porter à bord des traversieres les pêcheurs qui n’y pourroient aborder autrement, & à en débarquer leur poisson & leurs filets, les bateaux traversiers étant obligé de rester toujours à l’ancre, & mouillés dans la Charante.

Il y a encore des acons dans la paroisse de Souvas, dans le ressort de l’amirauté de la Rochelle. Les acons que les pêcheurs nomment pousse-pié, de l’action avec laquelle ils les manœuvrent, sont bien plus étroits que ceux des pêcheurs saintongeois, & ils les poussent aussi d’une autre maniere sur les vases où ils les font glisser. Ceux des ports des Barques & du Lupin les poussent par l’arriere, les pêcheurs se mettent à cet effet dans la vase.

Les acons de Fouras ont 6 à 7 piés de long, ils sont coupés par l’arriere, où est leur plus grande largeur, qui peut encore avoir 14 à 15 pouces au plus vers l’arriere, à environ 2 piés allant dans le milieu ; la hauteur du fond au haut du bord est d’environ 12 pouces ; le bout de l’acon est pointu, & formé à-peu-près comme une navette de tisserand émoussée : le pêcheur pour la gouverner a un genoux sur la traverse qui est à l’arriere, & qui est taillée commodément pour faire sa manœuvre ; il place ses deux mains sur le bordage de l’acon à bas bord & à stribord, en s’abaissant de maniere qu’avec l’autre pié, qu’il a libre, il pousse sur les vases son acon où il veut le conduire ; ces petits engins servent aux pêcheurs à aller tendre des courtines volantes & des rets sédentaires sur des fonds où les vases qui bordent la côte ne leur permettoient pas de pouvoir aborder autrement.

Pousse-piés, voyez Bernacles & Coquilles.