L’Encyclopédie/1re édition/PLATINE

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PLATINE, ou OR BLANC, s. f. (Hist. nat. Minéralogie & Métallurgie.) en espagnol platina, platina di pinto, ou juan blanco. Ce nom a été donné à une substance métallique blanche comme de l’argent ; autant & même plus pesante que l’or, très-fixe au feu ; qui ne souffre aucune altération ni à l’air, ni à l’eau ; assez peu ductile, & qui seule est absolument infusible au degré de feu le plus violent, mais qui s’allie par la fusion avec tous les métaux.

Le mot espagnol plata, signifie argent ; celui de platina, signifie petit argent ; il paroît que ce nom a été donné à la substance dont nous parlons à cause de sa couleur blanche. Quelques-uns cependant l’ont appellé or blanc, parce que la platine a plusieurs propriétés communes avec le plus précieux des métaux : c’est ce que nous aurons occasion de faire voir dans le cours de cet article.

Il n’y a que peu d’années que l’on connoît cette substance ; elle se trouve dans l’Amérique espagnole. Le premier auteur qui en ait parlé, est dom Antonio d’Ulloa ; dans son voyage du Pérou, imprimé à Madrid en 1748, il dit, que dans la province de Quito, au bailliage de Choco, il se trouve des mines d’or, que l’on a été obligé d’abandonner à cause de la platine dont le minerai est entremêlé. Il ajoute : « la platine est une pierre (piedra) si dure, qu’on ne peut la briser sur l’enclume, ni la calciner, ni par conséquent en séparer le minerai qu’elle renferme, sans un travail infini & sans beaucoup de dépenses ». Il est aisé de voir que c’est très-improprement que l’auteur appelle cette substance une pierre.

Dès l’an 1741, M. Charles Wood, métallurgiste anglois, avoit déjà apporté en Angleterre quelques échantillons de cette substance ; il les avoit reçus dans la Jamaïque ; on lui avoit dit qu’ils étoient venus de Carthagène ; sans lui déterminer précisément l’endroit d’où la platine avoit été tirée, on lui apprit seulement qu’il y en avoit des quantités considérables dans l’Amérique espagnole. On dit qu’il s’en trouve beaucoup, sur-tout près des mines de Santafé, & dans celles de Popayan. Quoi qu’il en soit, on assure que le roi d’Espagne a fait fermer ces mines, & a fait jetter à la mer une très-grande quantité de platines, pour prévenir les abus que ses sujets en faisoient. En effet, des personnes de mauvaise foi mêloient cette substance dans les lingots d’or, qu’ils adultéroient sans changer leur poids. Ce sont ces mesures si nécessaires, qui ont rendu la platine assez rare parmi nous. Quelques hollandois ayant été trompés de cette maniere, ne tarderent point à se venger cruellement des auteurs de cette supercherie ; étant revenus une seconde fois au même endroit, ils pendirent sans autre forme de procès aux mâts de leurs vaisseaux, les Espagnols qui leur avoient vendu de l’or falsifié avec de la platine. La fraude fut découverte, parce que les premiers lingots d’or s’étoient trouvés cassans comme du verre. Cette tromperie est d’autant plus dangereuse, que l’or allié avec la platine, ne souffre aucun changement dans son poids, & ne peut en être séparé par aucun des moyens connus dans la Chimie. Cependant on donnera à la fin de cet article les manieres de séparer l’or d’avec la platine.

Les Espagnols d’Amérique ont trouvé le secret de fondre la platine pour en faire des gardes d’épées, des boucles, des tabatieres, & d’autres bijoux semblables, qui sont très-communs chez eux, & qui s’y vendent à un prix très-inférieur à celui de l’argent.

En 1750, M. Watson communiqua à la société royale de Londres, dont il étoit membre, les échantillons de platine apportés par M. Wood, ainsi que quelques expériences qu’il avoit faites sur cette substance nouvelle & inconnue. Voyez les Transactions philosophiques, année 1750.

En 1752, M. Théodore Scheffer lut dans l’académie royale des Sciences de Stockholm, deux mémoires contenant les différentes expériences qu’il avoit eu occasion de faire sur la platine ; mais la petite quantité qu’il avoit reçue de cette substance, ne lui permit pas de pousser ses recherches aussi loin qu’il auroit souhaité. Ce même académicien suédois a encore publié en 1757, un nouveau mémoire sur la platine, dans lequel il releve quelques fautes qui étoient échappées à M. Lewis, savant chimiste anglois, à qui le public est redevable d’une suite complette d’expériences qu’il a insérées dans les Transactions philosophiques de l’année 1754, & dont nous allons donner l’extrait. Ces mémoires contiennent un examen suivi de la substance dont nous parlons : on en a publié en 1758, une traduction françoise, à laquelle on a joint tout ce qui avoit paru jusqu’alors sur la platine, à l’exception du dernier mémoire de M. Scheffer, dont on ne pouvoit avoir connoissance dans le tems de la publication de cet ouvrage, qui a pour titre, la platine, l’or blanc, ou le huitieme métal, & c.

On ne sait point positivement comment la platine se trouve dans le sein de la terre, c’est-à-dire, si elle est par masses ou par filons suivis, comme semble l’indiquer le récit de dom Antonio d’Ulloa. Une personne qui a fait un long séjour parmi les Espagnols de Carthagène en Amérique, m’a assuré n’avoir jamais vû de la platine qu’en particules déliées, ou sous la forme de sable ; & que c’est ainsi qu’on la trouvoit dans le pays où on ramasse cette espece de sable pour en séparer les paillettes d’or qu’il contient, au moyen du mercure. Cependant M. Bomare de Valmont a reçu en Hollande un échantillon de mine qu’on lui a dit être de la platine, dans lequel ce minéral est en masse attachée à une gangue, de même que quelques pyrites le sont à la leur.

Quoi qu’il en soit, la plûpart de la platine qui nous est venue en Europe, est sous la forme de sable, mêlé de particules ferrugineuses noires, attirables par l’aimant, parmi lesquelles on trouve quelquefois des paillettes d’or ; à l’égard de la platine même, elle est en grains blancs, de forme irréguliere, approchant pourtant de la triangulaire, & semblables à des coins dont les angles sont arrondis ; les facettes qui composent les plans de ces triangles ou coins, examinées au microscope, ont paru raboteuses & inégales en quelques endroits, & remplies de petites cavités noirâtres & raboteuses ; quelques-uns de ces grains sont attirables par l’aimant quoique foiblement.

Depuis, M. Lewis a trouvé dans la platine, qu’il a eu occasion d’examiner quelques petites portions d’une substance noire & luisante semblable à du charbon de terre ou à du jayet, & qui mise au feu, en répandoit la fumée & l’odeur. Il y a découvert des petites particules noirâtres, brunes & rougeâtres, semblables à des petits fragmens d’émeri ou d’aimant, dont plusieurs étoient foiblement attirés par l’aimant. Il y a remarqué des petits feuillets minces & transparens, semblables à du spath. Enfin il y a découvert des petits globules de mercure ; de toutes ces observations il conclud que la platine ne nous vient point d’Amérique dans son état naturel, qu’on la tire probablement des mines en grandes masses, que l’on brise ces masses pour les traiter avec le mercure, afin d’en extraire les paillettes & les grains d’or.

Les grains les plus purs de la platine s’étendent assez bien sous le marteau, lorsqu’on les frappe à petits coups ; cependant ils peuvent se pulvériser dans un mortier de fer à grands coups de pilons, & ces grains après avoir été rougis, sont plus cassans que froids.

On prétend que la pesanteur spécifique de la platine est à celle de l’eau comme 18 est à 1, à en juger par les grains les plus purs, sur lesquels on découvroit pourtant encore au microscope des petites cavités garnies d’une matiere étrangere & noirâtre, même après les avoir lavés & fait bouillir dans de l’eau forte & du sel ammoniac ; d’où l’on peut présumer que si on parvenoit à purifier parfaitement la platine, & à le dégager de toute matiere étrangere, elle auroit peut-être un poids égal ou même supérieur à celui de l’or. Ainsi on ne sait encore rien de certain sur la pesanteur spécifique de cette substance, & elle ne peut être déterminée avec exactitude par la balance hydrostatique, vu que pour la peser de cette maniere, il faudroit pouvoir fondre la platine seule, afin de la réduire en un corps dense & compacte ; mais comme on ne peut la peser que sous la forme d’un sable, ses grains laissent entr’eux de petits intervalles vuides, & occupent un plus grand volume que s’ils étoient en une masse.

L’action du feu le plus violent ne peut point parvenir à faire entrer en fusion la platine seule & sans addition ; quelquefois les petits grains semblent s’unir les uns aux autres, & avoir un commencement de fusion ; mais cela vient des particules ferrugineuses & étrangeres qui sont mêlées avec la platine. Elle ne se fond pas davantage, lorsqu’on y joint tous les fondans usités dans la chimie, tels que les sels alkalis, le flux noir, les matieres inflammables, les verres, le nitre, le soufre, &c. en un mot cette substance résiste au feu le plus violent qu’il soit possible de donner dans les fourneaux ordinaires, & dans les vaisseaux, soit fermés, soit lorsqu’on l’expose au contact immédiat des charbons, soit qu’on y joigne tous les fondans connus. Il ne paroît point que l’on ait encore essayé d’exposer cette substance au miroir ardent. Ainsi que l’or, la platine est dissoute par l’hépar ou le foie de soufre, & par-là elle devient miscible avec l’eau.

La platine ne se dissout nullement dans l’acide vitriolique, soit chaud, soit froid, soit foible, soit concentré ; elle ne se dissout pas plus dans l’acide du sel marin, soit en liqueur, soit appliqué dans toute sa force, comme dans la cémentation, soit concentré, comme il l’est dans le sublimé corrosif. Quand on met en cémentation un alliage d’or & de platine, cette derniere substance ne souffre aucun déchet ; ainsi ce qu’on appelle le cément royal, qui a toujours passé pour purifier l’or de toutes les matieres métalliques étrangeres, est un moyen insuffisant pour dégager l’or de la platine.

La platine résiste pareillement à l’action de l’acide nitreux, de quelque façon qu’on le lui applique.

L’eau régale, de quelque maniere qu’elle ait été faite, dissout la platine, ainsi que l’or. M. Lewis a trouvé qu’une partie de cette substance exigeoit environ 4 parties de ce dissolvant, pour que son entiere dissolution se fasse. Par-là le dissolvant devient d’abord d’une couleur jaune ; à mesure qu’il se charge de platine, il jaunit de plus en plus, & il finit par être d’un rouge brun.

Cette dissolution de la platine évaporée à une chaleur douce, & mise dans un lieu frais, a donné des crystaux presqu’opaques, d’un rouge foncé, feuilletés ; en les lavant avec de l’esprit de vin, la couleur en est devenue plus légere & semblable à celle du saffran ; exposés au feu ces crystaux ont paru se fondre, ils ont répandu de la fumée blanche, & se sont changés en une chaux grisâtre.

La dissolution de la platine dans l’eau régale ne teint point en pourpre les matieres animales telles que la peau, les os, les plumes, &c. ni le marbre, comme on sait que l’eau fait la dissolution d’or. La platine dissoute ne se précipite pas non plus d’une couleur pourpre par le moyen de l’étain, comme la dissolution d’or. La platine n’est point dégagée de son dissolvant ni par le vitriol martial, ni par l’esprit de vin, ni par les huiles essentielles, comme il arrive à l’or.

L’alkali fixe & l’alkali volatil précipitent la platine dissoute sous la forme d’une poudre rouge brillante semblable à du minium qui ne détonne point comme l’or fulminant. Cependant les sels alkalis ne précipitent point totalement la platine, & le dissolvant reste toujours coloré jusqu’à un certain point.

L’acide vitriolique précipite la platine dissoute : elle est aussi précipitée, quoique fort imparfaitement, par le zinc, par le fer, par le cuivre, par le mercure, par l’or. Les précipités que l’on obtient de ces différentes manieres, ne sont point propres à colorer le verre, comme ceux des autres métaux.

La platine s’allie par la fusion à tous les métaux & demi-métaux ; ces alliages exigent différens degrés de feu qui doivent être toujours très-violens ; cependant elle marque plus de disposition à s’allier à quelques métaux qu’avec d’autres ; il paroît pourtant que dans ces sortes d’alliages il ne se fait qu’un mélange, & non une combinaison intime & parfaite. La platine durcit tous les métaux avec lesquels elle est alliée, leur ôte leur ductilité, & les rend cassans ; tous ces alliages, lorsqu’on les pese à la balance hydrostatique, ont, suivant M. Lewis, un poids moindre que le calcul ne l’annonçoit ; ce savant chimiste a donné une table des pesanteurs de ces différens alliages ; mais M. Scheffer a fait voir dans son dernier mémoire que souvent il s’est trompé dans ses calculs, & il prouve que la plûpart des alliages métalliques faits avec la platine ont une pesanteur spécifique plus grande que celle qui étoit indiquée par le calcul. En effet la balance hydrostatique est un moyen très-peu sûr pour connoître la pesanteur des alliages métalliques. Voyez Métaux.

L’étain allié avec la platine donne une matiere cassante, d’une couleur plus foncée que celle de l’étain pur, & qui devient terne à l’air.

Le plomb allié avec cette substance donne une masse d’une couleur de fer foncée, ou purpurine, qui se ternit à l’air, & qui est d’un tissu feuilleté ou fibreux ; le plomb acquiert par cet alliage un plus grand degré de dureté que tous les autres métaux.

La platine a plus de peine à s’allier avec l’argent ; il y a même une portion qui ne fait point d’union avec lui, & qui se précipite au fond du creuset pendant qu’il se refroidit. Par cette union, l’argent perd sa malléabilité, mais moins qu’avec l’étain ou le plomb. La couleur de l’argent est altérée très-foiblement par cet alliage.

Un alliage de parties égales de platine & d’or est d’un jaune plus pâle que l’or seul ; il est dur à la lime, devient aigre & cassant ; mais lorsqu’on le remet au feu, l’alliage devient assez ductile. S’il y a quatre parties d’or contre une de platine, l’alliage est assez ductile pour pouvoir être battu en lames très-minces sans se casser ; en le fondant avec du borax & du nitre, il devient fort pâle.

La platine augmente la dureté du cuivre, sans lui ôter ni sa couleur ni sa ductilité, lorsqu’elle n’y est qu’en petite quantité ; mais quand on en met beaucoup, l’alliage éclate sous le marteau. Cet alliage prend un très-beau poli, & ne se ternit point à l’air aussi promptement que le cuivre seul.

Le fer forgé ne peut s’allier avec la platine ; mais elle s’unit avec le fer de fonte ou le potin ; elle le rend si dur que la lime n’a point de prise sur lui ; il devient par-là si tenace & si ductile, qu’il est très-difficile à casser. Cet alliage est composé de grains d’une couleur foncée dans la fracture.

La platine, suivant M. Lewis, paroît former un commencement d’union avec le mercure ; mais selon M. Scheffer, elle ne s’y unit pas du tout ; il ajoute que l’on peut employer ce moyen pour séparer l’or, lorsqu’il est allié avec de la platine, le mercure s’amalgamera avec l’or, & ne touchera point à la platine.

Alliée avec le bismuth, la platine ne change rien à sa consistance ; la masse est fragile, se ternit à l’air, & est d’un gris bleuâtre dans la fracture ; alliée avec le zinc, elle le rend plus dur & si aigre qu’il éclate sous le marteau. Son alliage avec le régule d’antimoine est dur, résiste à la lime, & est d’une nuance plus foncée que le régule seul.

Un des phénomènes les plus singuliers que présente la platine, c’est la facilité avec laquelle l’arsenic la fait entrer en fusion ; elle est au point qu’une partie de ce demi-métal suffit pour fondre 24 parties de platine. Il résulte de cet alliage une composition cassante & grise dans la fracture. Cette expérience est dûe à M. Scheffer ; M. Lewis ne l’avoit point tentée, ne croyant pas que le corps le plus fixe au feu de la nature pût se fondre à l’aide de l’arsenic qu’une chaleur assez foible dissipe & volatilise.

La platine alliée avec le laiton ou cuivre jaune, le blanchit, le durcit, le rend aigre, & forme une masse qui prend très-bien le poli. Si on allie la platine avec du cuivre & de l’étain, l’alliage qui résulte est plus sujet à se ternir que celui du cuivre seul sans étain.

La platine jointe avec du plomb résiste à la coupelle, comme l’or, il se fait un iris ; mais l’éclair ne se forme point parfaitement, parce que la platine retient toujours une portion du plomb, dont elle empêche l’entiere scorification, & l’on ne peut plus séparer cette portion de plomb, quelque degré de feu qu’on emploie. Pareillement lorsqu’on coupelle un alliage d’or & de platine, ou bien d’argent & de cette substance, le bouton qui reste sur la coupelle retient une quantité de plomb assez considérable.

Si on se sert du bismuth pour coupeller la platine, elle en retient aussi une portion.

Elle résiste pareillement à l’antimoine, & en retient une portion qu’elle garantit contre l’action du feu, & qu’elle empêche de se dissiper. La platine retient aussi une portion du zinc qui s’est uni avec elle par la déflagration.

Ces dernieres expériences font voir que la coupelle & la purification par l’antimoine, sont des moyens insuffisans pour dégager l’or d’avec la platine. Lorsqu’on voudra y parvenir, on n’aura qu’à faire dissoudre l’or allié avec de la platine dans de l’eau régale, & mettre du vitriol martial dans la dissolution, il précipitera l’or seul, n’ayant pas la propriété de précipiter la platine ; on édulcorera le précipité, on l’amalgamera avec le mercure qui, comme il a été dit plus haut, ne s’unit point non plus avec la platine, & par-là l’or seul restera dans l’amalgame.

De toutes les expériences qui viennent d’être rapportées, on conclud que la platine, & par-là l’or seul restera dans l’amalgame.

De toutes les expériences qui viennent d’être rapportées, on conclud que la platine est un métal particulier, qui a plusieurs propriétés communes avec l’or, & qui d’un autre côté en differe à bien des égards ; la platine n’a point sa ductilité, ni sa ténacité, ni sa couleur ; elle est beaucoup plus dure, & n’entre point en fusion au degré de feu le plus violent. Les propriétés qui lui sont communes avec l’or, sont sa pesanteur, sa dissolution dans l’eau régale & dans le foie de soufre, la faculté de résister au plomb dans la coupelle & à l’antimoine, qui jusqu’ici passoit pour le moyen le plus sûr pour dégager l’or des substances métalliques étrangeres avec lesquelles il étoit combiné. Cette espece d’analogie que la platine a avec l’or, est ce qui a donné lieu de l’appeller or blanc ; les Alchimistes trouveront peut-être dans cette substance, cet or non mur si desiré, à qui il ne manque que l’ame, ou le soufre colorant pour être un or parfait.

Malgré toutes les expériences qui ont été rapportées, bien des chimistes doutent encore que la platine soit un métal particulier ; ils croyent plutôt qu’on doit la regarder comme une combinaison particuliere dont le fer est la base, & qui est de la nature de la pyrite ; c’est au tems à nous apprendre ce que l’on doit penser de ces conjectures.

Quant aux usages de la platine, nous avons déja dit que les Espagnols en Amérique en font différens bijoux : il y a tout lieu de croire qu’ils y joignent pour cela soit du cuivre, soit de l’argent, soit quelqu’autre substance métallique, que l’on pourroit aisément découvrir si la platine étoit assez commune parmi nous, pour pouvoir être employée à ces usages. Elle paroît sur-tout très-propre à faire des miroirs de réflexion pour les télescopes, par la faculté que quelques métaux alliés avec elle, ont de ne point se ternir à l’air. C’est au tems à nous apprendre si cette substance si singuliere a quelques vertus médicinales, & si elle peut être employée plus utilement dans la société. (—)

Platine, s. f. terme d’Arquebusier, s’entend de toutes les pieces & ressorts montés à vis sur le corps de platine, & qui servent toutes ensemble à faire partir un fusil ; elle se place ordinairement vers la lumiere du canon, dans une entaille pratiquée au fût ou bois de fusil du côté droit.

Les fusils à deux coups ont deux platines, l’une à droite, & l’autre à gauche, qui ont chacune leur détente.

Platine, (corps de) terme d’Arquebusier, c’est un morceau de fer taillé en losange qui est percé de plusieurs trous vissés en écrous, qui sont faits pour recevoir les vis des pieces qui composent la platine, qui sont la batterie, le ressort de la batterie, le grand ressort, la noix, la bride, la gachette & le ressort de gachette.

Platine de lumiere, (Artillerie.) les platines de lumiere, sont des plaques de plomb en table, qui servent à couvrir la lumiere du canon. (D. J.)

Platine, (bas au métier.) il y a les platines à ondes, les platines à plomb, les barres à platines, les gardes-platines, le moule à platine ; toutes ces parties appartiennent au métier à bas. Voyez cet article.

Platines, (Fondeur de caracteres d’Imprimerie.) deux des pieces principales du moule, servant à fondre les caracteres d’Imprimerie. C’est la platine qui sert de point d’appui à toutes les autres, & sur laquelle elles sont assujetties par des vis & par des écrous. Voyez Moule & nos Planches.

Platine, terme d’Horlogerie, est une plaque de laiton à laquelle on donne une épaisseur suffisante, pour qu’elle ne puisse pas ployer ; il y a deux platines dans chaque montre & dans chaque pendule. Les Horlogers appellent platine des piliers, celle sur laquelle ces piliers sont rivés, & qui porte le cadran, on la fait toujours un peu plus forte que l’autre qu’on appelle platine du nom, platine de dessus, ou petite platine, cette derniere porte le cocq, la coulisse, la rosette, &c. elle s’ajuste sur les piliers, & on l’y fixe par le moyen de coupilles ; les platines ainsi ajustées, font ce que les Horlogers appellent cage. Voyez Cage, & voyez aussi nos figures, Pl. de l’Horlogerie, qui représentent les platines d’une montre vues des deux côtés.

Platine de presse d’Imprimerie, c’est une piece de cuivre très-poli, ou de bois bien uni ; son usage est de fouler sur la forme, par le moyen de la vis qui presse dessus, elle est attachée aux quatre coins de la boëte qui enveloppe la vis, avec des ficelles, mais dans plusieurs imprimeries avec des tirans de fer à vis. La platine est située entre les deux jumelles de la presse, & suit tous les mouvemens de la vis : elle foule lorsque la vis descend, & se releve lorsque la vis remonte ; c’est du bon ou du mauvais foulage d’une platine, que dépend souvent la qualité de l’impression : une platine doit être pour ses proportions, telle que l’exige le corps de presse pour laquelle elle a été faite : c’est pour cette raison qu’il y en a de différente grandeur. Voyez nos Pl. de l’Imprimerie.

Platine, (Ustensile de ménage.) on s’en sert pour étendre, secher, & dresser le menu linge ; la platine est faite d’un rond de cuivre jaune fort poli. Un pié de platine est ce qu’on met sous les vrais piés de la platine pour l’élever.

Platine se dit aussi d’une plaque de fer ou de cuivre qu’on applique en plusieurs endroits ; une platine ou écusson de porte qu’on met au-devant d’une serrure ; une platine de pistolet, de fusil, où s’attachent le ressort & le chien ; une platine de montre qui soutient les roues, les ressorts, les piliers, l’aiguille. Voyez ici les divers sens du mot Platine. (D. J.)

Platine, en terme de Metteur-en-œuvre, est cette partie de la chaîne d’une montre, derriere laquelle est le crochet pour suspendre la montre.

Platines, chez les Rubaniers, ce sont des plaques de plomb ou d’ardoise qu’on suspend sur chaque lisseron qui termine les hautes lisses ; quand le pié de l’ouvrier abandonne une marche, la platine fait retomber la haute lisse que le tirant avoit haussé.

Platine, (Serrur.) c’est une petite plaque de fer sur laquelle est attachée un verrouil ou une targette. On appelle platine à panaches, celle qui est chantournée en maniere de feuillage ; & platine ciselée. celle qui est emboutie ou relevée de ciselures.

Platine de loquet. Maniere de plaque de fer, plate & déliée, qu’on attache à la porte au-dessus de la serrure ; on l’appelle aussi entrée. (D. J.)

Platine, (Sucrerie.) On nomme la platine d’un moulin à sucre, une piece de fer acéré, longue de six pouces & large de trois, sur le milieu de laquelle on a pratiqué deux ou trois enfoncemens, pour recevoir la pointe du pivot du grand rôle ; elle s’emboîte dans ce qu’on appelle la table du moulin. Le P. Labat. (D. J.)