L’Encyclopédie/1re édition/PLANTE-VER

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PLANTE-VER, (Hist. nat.) nom d’une prétendue plante envoyée de la Chine en Europe. Son nom chinois hia-tsao-tom-tchom signifie plante en été, & ver en hiver. C’est une racine de l’extrémité de laquelle sort une figure d’un ver sec & jaunâtre, de neuf lignes, où l’on distingue sensiblement la tête, les piés, le ventre de l’animal, & jusqu’à ses yeux & les plis de son dos ; mais cela même qui fait la merveille pour les Chinois, & la feroit bien aussi pour le commun des Francois, la détruisit pour l’académie : on s’apperçut bien vîte que c’étoit une vraie dépouille de quelque chenille ; & M. de Réaumur s’en assura pleinement par un examen plus particulier. On prend la figure de ver pour une partie & un prolongement de la racine, parce qu’en effet elle y tient étroitement ; & par-là on croit que cette portion de la racine est devenue ver : mais en y regardant de plus près, M. de Réaumur a fort bien vu que la substance de la racine ligneuse à l’ordinaire, étoit toute différente de celle qui reste du ver. Il juge que la chenille prête à se métamorphoser en nymphe ou en aurélie, ronge l’extrémité de la racine, y fait une cavité où elle introduit sa queue, qui s’y peut attacher encore par quelque viscosité du corps de l’animal, & qu’ainsi elle se ménage un point fixe, un appui pour se débarrasser plus aisément de l’enveloppe qu’elle doit quitter.

Il n’est point singulier qu’un ver qui se transformera, vive jusques-là sous terre, on en a plusieurs exemples ; il y en a aussi qui ne se cachent sous terre que pour se transformer ; la chenille de la Chine sera dans l’un ou l’autre cas. On ne peut trop remercier les physiciens qui nous guérissent de notre penchant superstitieux pour les fausses merveilles ; il y en a tant de véritables, dignes de nous occuper ! (D. J.)