L’Encyclopédie/1re édition/PERVENCHE

PERVENCHE, pervinca, s. f. (Hist. nat. Botan.) genre de plante à fleur monopétale, en forme d’entonnoir évasé en maniere de soucoupe & profondément découpée. Le pistil sort du calice ; il est attaché comme un clou à la partie inférieure de la fleur ; il devient dans la suite un fruit composé de deux siliques, & il renferme une semence oblongue, le plus souvent cylindrique & sillonnée. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plante.

Pervenche, pervinca, (Jardinage.) arbrisseau grimpant qui est toujours verd. Il vient dans les bois des pays tempérés de l’Europe. Il pousse du pié plusieurs tiges sarmenteuses & tort menues qui rampent contre terre & s’étendent au loin. Ses feuilles sont petites, oblongues, & relevées par-dessous d’une forte arrête dans le milieu ; leur surface est luisante, les bords sont sans dentelure, & la verdure en est agréable, quoiqu’un peu foncée. Ses fleurs de couleur bleue & disposées en rose paroissent au printems. Ses graines qui sont longues, ovales & sillonnées, se trouvent dans des siliques accouplées.

Cet arbrisseau est assez commun dans plusieurs pays, il se plait dans les terres grasses & humides, à l’ombre des arbres. Il se multiplie fort aisément de bouture & de branches couchées ; ses branches font racine pour peu qu’elles touchent contre terre. Son accroissement, qui est très-prompt, joint à cette facilité de se propager, fait qu’il envahit bien-tôt un terrein, si on le laisse aller.

Les pervenches peuvent contribuer à l’agrément d’un jardin. En les laissant courir à leur gré, elles formeront des tapis de verdure qui seront garnis de fleurs dans les mois de Mars & d’Avril. On en peut faire de petites pallissades en les soutenant avec du treillage. On les laisse aussi grimper contre la tige des gros arbres pour les garnir de verdure ; & comme ces arbrisseaux aiment l’ombre, la fraîcheur, l’exposition du nord, & qu’ils viennent à souhait dans les endroits serrés & couverts d’arbres, nulle autre plante ne pourroit réussir, il n’est pas douteux qu’on en peut tirer du service pour completer l’arrangement d’un grand jardin. Cette plante a d’ailleurs des propriétés intéressantes ; on en fait usage en médecine à plusieurs égards.

Les pervenches portent rarement des graines, mais elles se multiplient si aisément d’elles-mêmes qu’il ne faut pas y avoir de regret. Cependant on peut les amener à la fructification en les tenant en pot avec peu de terre au grand air.

On connoit plusieurs variétés de ces arbrisseaux : voici les principales.

1. La pervenche à fleur bleue, c’est la plus commune.

2. La pervenche à fleur blanche.

3. La pervenche à fleur rougeâtre.

4. La pervenche à fleur bleue, double.

5. La pervenche à fleur bleue, double & d’un pourpre foncé.

6. La pervenche à fleur double, variée de plusieurs couleurs.

7. La pervenche à feuilles panachées de blanc.

8. La grande pervenche à fleur bleue ; cet arbrisseau est plus grand que les précédens dans toutes ses parties. Sa verdure est très-brillante, ses fleurs sont d’un bleu vif de belle couleur. Elles paroissent de très-bonne heure au printems, & elles se succedent pendant plus de quatre mois. On a vu cette plante s’élever jusqu’à douze piés en deux ans. Elle est extrémement convenable pour garnir des murs exposés au nord.

9. La grande pervenche à fleur blanche.

10. La grande pervenche à feuilles panachées.

11. La pervenche de Madagascar. C’est un arbrisseau précieux & charmant, qui ne s’éleve qu’à douze ou quinze pouces. Sa fleur ressemble à celle du laurier-rose, qu’elle surpasse en vivacité, en beauté & en durée. Elle fleurit constamment pendant plus de six mois. Le grand soleil anime ses fleurs au lieu de les altérer & de les faire passer. Cette plante est délicate ; il faut la traiter comme les mirtes & la multiplier de semence.

Pervenche, (Mat. méd.) petite ou commune, à feuilles étroites, petit pucelage, violette des sorciers, grande pervenche, pervenche à larges feuilles, grand pucelage.

On emploie indifféremment les deux especes de pervenche qui possedent les mêmes vertus.

La pervenche est comptée parmi les vulnéraires astringens les plus usités. On ordonne intérieurement son infusion contre les pertes de sang ou flux immodéré des menstrues, contre le crachement de sang, & les autres hémorrhagies des parties internes. On donne aussi dans ces cas & dans la phthisie & la dyssenterie le lait coupé avec la décoction ou infusion de ses feuilles.