L’Encyclopédie/1re édition/PEDILUVE
PEDILUVE, s. m. (Médecine.) ce n’est autre chose que des bains pour les piés, dont la composition est la même que pour les bains ordinaires ; on s’en sert d’autant plus volontiers qu’ils demandent moins d’étalage ; on les compose d’eau pure sans addition, ou pour corriger la pesanteur ou la dureté de l’eau, on y mêle de la lessive, du son de froment, ou des fleurs de camomille ; bien que les lavemens des piés s’appliquent aux parties les plus basses & les plus éloignées, leur vertu se répand cependant & se communique au loin, & ils appaisent des maladies dont le siége est dans des parties fort éloignées ; car l’application des liqueurs chaudes au pié, relâche, ramollit les fibres nerveuses, tendineuses & musculeuses, dont ils sont composés, & qui sont entemêlés des vaisseaux. Les pores & les vaisseaux qui étoient auparavant resserrés se dilatent, le sang y aborde & les liqueurs y passent plus aisément ; ce qui fait que le sang qui se portoit avec impétuosité vers d’autres parties, se jette sur des parties latérales au grand soulagement du malade. Les bains des piés agissent par leur chaleur tempérée sur le sang ; & les humeurs qui passent par les vaisseaux des piés pendant qu’ils sont dans l’eau, ils les divisent & les délayent, les font couler avec plus de vîtesse ; de-là vient que si l’eau des bains des piés est trop chaude, elle augmente la raréfaction du sang & le battement des arteres ; mais ces bains ne conviennent pas dans tous les cas ; ainsi dans les regles qui sont imminentes, ou qui coulent actuellement, ils sont douteux pour leur effet ; ils peuvent diminuer ou augmenter l’écoulement, par la dérivation trop grande du sang qu’ils produisent dans l’artere aorte descendante, & même par la révulsion qu’ils occasionnent dans les tuyaux collatéraux des arteres qui vont à la matrice, ils ne manqueroient pas d’occasionner une suppression. C’est ce qui se voit par l’expérience des femmes imprudentes qui s’exposent par-là à des maladies fâcheuses.
Les bains des piés sont excellens dans tous les cas où il faut procurer une dérivation des humeurs des parties supérieures vers les inférieures ; ainsi ce remede est efficace dans le vertige, dans l’apopléxie, dans l’épilepsie imminente, dans les maladies soporeuses & convulsives, dans les spasmes & dans les affections spasmodiques, dans les douleurs de tête, dans la migraine ; mais si ces maladies ne sont pas occasionnées par des engorgemens des vaisseaux, ou par une pléthore locale du cerveau ou de ses parties voisines, ou par une élasticité & rigidité trop grande des fibres nerveuses, ce remede devient inutile ; ainsi lorsque ces maladies ne sont que des symptomes d’autres maladies, telles que l’indigestion, la sabure, la cacochylie, les vers, les affections spasmodiques dans les visceres du bas-ventre, c’est en vain que l’on tenteroit les lavemens des piés, la révulsion ne seroit que pernicieuse, & d’ailleurs la cause persistant, ces symptomes ne seroient point abattus. V. Bain. (m)