L’Encyclopédie/1re édition/INFÉRER

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 700).
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INFÉRER, verb. act. (Logique.) c’est conclure, c’est tirer des conclusions d’un raisonnement. Cette faculté intellectuelle consiste dans la perception de la liaison qui se trouve entre les idées moyennes, dans chaque degré de la déduction d’un raisonnement. L’esprit par-là vient à découvrir la convenance, ou la disconvenance certaine de deux idées ; ou bien il vient à voir simplement leur connexion probable.

Inférer, n’est donc autre chose que déduire une proposition comme véritable, en vertu d’une proposition qu’on a déja donnée comme véritable. Par exemple, supposons avec Locke qu’on avance cette proposition, « les hommes seront punis, ou récompenses dans l’autre monde » ; & que de-là on veuille en inférer, donc les hommes peuvent se déterminer eux-mêmes dans leurs actions. La question est de savoir si l’esprit a bien ou mal fait cette inférence ; s’il l’a faite en trouvant des idées moyennes, & en considérant leur connexion dans leur véritable ordre, il a tiré une juste conséquence ; s’il l’a faite sans une telle vûe, loin d’avoir tiré une conséquence fondée en raison, il a montré seulement le desir qu’il avoit qu’elle le fût, ou qu’on la reçût en cette qualité.

L’acte d’inférer est un des plus beaux apanages de la faculté raisonnable, quand elle tire des conséquences par la seule perception de la connexion des idées ; mais l’esprit est si fort porté à tirer des conséquences, soit par le violent desir qu’il a d’étendre ses lumieres, ou par le grand penchant qui l’entraîne à favoriser les sentimens qu’il a une fois adoptés, que d’ordinaire il se hâte d’inférer avant que d’avoir apperçu la connexion des idées qui doivent lier ensemble les deux extrèmes. (D. J.)