L’Encyclopédie/1re édition/HOUBLON

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 321-322).

HOUBLON, lupulus, s. m. (Bot.) genre de plante à fleur, composée de plusieurs étamines, soutenues sur un calice. Cette fleur est stérile, comme l’a observé Cesalpin. Les embryons naissent sur des plantes qui ne portent point de fleurs, & deviennent des fruits écailleux, composés de plusieurs feuilles qui sont attachées à un poinçon, & qui couvrent des semences, enveloppées chacune d’une coëffe. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plante. (I.)

Les racines du houblon sont menues & entrelacées les unes dans les autres ; il en sort des tiges foibles, très-longues, tortillées, rudes, anguleuses, velues, creuses, purpurines, sans vrilles, lesquelles embrassent étroitement les perches & les plantes sur lesquelles elles grimpent. Ses feuilles sortent des nœuds deux à deux, opposées, portées sur des queues longues d’une palme, rudes, & quelquefois rougeâtres ; quelquefois elles imitent les feuilles de mûrier, & sont entieres, terminées par une pointe ; le plus souvent elles sont découpées en trois ou en cinq parties qui ont autant de pointes, dentelées à leur bord, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre.

L’espece qui porte les fleurs n’a point de graine, & celle qui porte les graines n’a point d’étamines.

Les fleurs naissent dans le houblon mâle, de l’aisselle des feuilles ; elles sont en grappes, comme celles du chanvre, de couleur d’herbe pâle, sans pétales, composées de plusieurs étamines & d’un calice à cinq feuilles ; elles sont stériles.

L’espece femelle porte des fruits qui sont comme des pommes de pin, composées de plusieurs écailles membraneuses, peu serrées, de couleur pâle, ou d’un verd jaune, attachées sur un pivot commun, à l’aisselle desquels naissent de petites graines, applaties, rousses, de l’odeur de l’ail, ameres, & enveloppées dans une coëffe membraneuse. Cette plante est très-commune dans les haies & les prés des pays, soit froids, soit chauds.

Mais en Angleterre, en Hollande, en Flandres & en Allemagne, on seme & on cultive avec grand soin, & avec beaucoup de dépense, le houblon dans des houblonnieres, où l’on plante de grandes perches, sur lesquelles les tiges de houblon montent, & les surpassent même. Il se plaît dans un terrein humide, gras & bien fumé : toute cette plante devient beaucoup plus belle par la culture ; ses épics chargés de fleurs, ses écailles & sa graine sont plus grandes que dans son état sauvage. Ses épis, qui sont les pommes de pin, & que l’on appelle souvent, mais improprement, fleurs, se recueillent au mois d’Août & de Septembre. On les seche dans un four préparé pour cela ; on les renferme ensuite dans des sacs, & on les garde pour faire la biere. On mange les jeunes pousses de houblon qui paroissent au commencement du printems.

Les feuilles sont ameres ; leur suc ne change point la couleur du papier bleu ; les fruits, ou les pommes de pin fraiches, ont une odeur agréable, & contiennent une graisse ou résine aromatique, un peu visqueuse, qui paroît être le principe de leur odeur & de leur amertume. Ils renferment un sel ammoniacal un peu nitreux, uni à une grande quantité d’huile, soit subtile, soit épaisse, aromatique & un peu amere : c’est par cette raison qu’on n’en peut point tirer de sel essentiel crystallin ; car le sel ammoniacal, sur-tout s’il est joint à une grande quantité d’huile, ne forme point de crystaux ; & étant séché, il devient comme un sable terreux.

Il résulte de cet exposé, que le houblon renferme un sel alumineux tartareux, amer. Voyez article suivant, ses propriétés médicinales. (D. J.)

Houblon. En Suede, les habitans de la province de Jemteland & de celle de Médelpadie, se servent avec succès des tiges du houblon pour en préparer de la filasse, dont ils font une toile grossiere ; par ce moyen le houblon leur tient lieu de chanvre. Pour cet effet, au lieu de jetter ces tiges comme inutiles, on en détache les feuilles, ensuite on met ces tiges en macération ou à rouir dans de l’eau, ou bien on les étend sur des toits de chaume pour y rester exposées pendant l’hiver aux injures de l’air ; souvent elles y demeurent long-tems couvertes de neige ; quelquefois on les laisse tremper dans l’eau de la mer, & ensuite on les expose alternativement à l’air libre, en les mettant sur la terre, ensuite de quoi on les laisse tremper dans des eaux courantes. D’autres, avant que de faire rouir les tiges ou sarmens de houblon, les exposent pendant la nuit à la rosée. Enfin, on les fait sécher à l’air, on les bat ; on les fait de nouveau sécher dans un four, & on finit par les traiter de la même maniere que le chanvre. Lorsque la macération a été bien faite, on obtient de la filasse aussi fine que celle du lin ou du chanvre : mais jusqu’à présent on n’a pû la blanchir parfaitement ; mais elle n’en a que plus de solidité, vû que le blanchissage ne fait que nuire à la durée de la toile. On peut cependant teindre la toile qui a été ainsi faite, & l’employer à des usages communs. Voyez les mémoires de l’Académie de Suede, année 1750. (—)

Houblon, (Diete & Mat. méd.) on fait cuire les jeunes pousses de houblon qui paroissent au printems dans de l’eau comme les asperges, & on les mange avec de l’huile, du sel & du vinaigre. On les apprête aussi de plusieurs autres façons. Elles lâchent doucement le ventre ; sont utiles pour les obstructions des visceres, & sur-tout pour les engorgemens du foie & de la rate. Geoffroy, Mat. méd.

Tout le monde connoît l’usage du houblon pour l’assaisonnement de la biere. Voyez & Brasserie.

Ce que l’on a dit des bonnes & des mauvaises qualités que le houblon donnoit à la biere, est absolument gratuit. On manque d’observations pour décider la question agitée principalement en Angleterre ; savoir, si la biere houblonée chassoit & fondoit la pierre des reins, ou si elle ne contribuoit pas au contraire à la former. Un fait assuré, c’est que les bieres rouges forcées de houblon, sont plus enyvrantes, & qu’elles jettent dans un assoupissement dangereux ; mais il n’est pas clair que ces effets soient dûs au houblon.

On ne se sert que très-rarement du houblon à titre de médicament : on pourroit l’employer cependant aussi utilement que les autres plantes ameres, contre les défauts d’appétit habituel, les obstructions du foie & les maladies de la peau.

On trouve dans quelques boutiques un extrait de houblon, qu’on peut faire entrer dans les bols & les électuaires magistraux, qu’on emploie dans le traitement des maladies que nous venons d’indiquer. Les feuilles de houblon entrent dans le syrop de chicorée composé, & son suc dans les pilules angéliques de la pharmacopée de Paris. (b)