L’Encyclopédie/1re édition/GRADUÉS

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GRADUÉS, s. m. pl. (Jurisprud.) en général sont ceux qui ont obtenu des degrés dans une université, tels que le degré de maître-ès-Arts, celui de bachelier, de licentié, ou de docteur.

Les gradués joüissent de plusieurs prérogatives.

Il faut être gradué pour être reçû dans la plûpart des offices de judicature, du-moins dans les cours souveraines & dans les bailliages & sénéchaussées.

Mais c’est sur-tout en matiere bénéficiale que les priviléges des gradués sont considérables, & qu’ils sont susceptibles d’un plus grand détail. On entend ordinairement par le terme de gradués dans cette matiere, ceux qui après avoir étudié dans une université fameuse du royaume, y ont obtenu des degrés & les ont fait signifier à des patrons ou collateurs, afin de pouvoir requérir les bénéfices dans les mois qui leur sont affectés. Voyez Université fameuse.

Les degrés obtenus dans des universités étrangeres, ne sont pas considérés à l’effet d’obtenir des bénéfices ; il faut néanmoins excepter l’université d’Avignon, qui joüit à cet égard des mêmes priviléges que les universités du royaume.

On comprend aussi quelquefois sous le nom de gradués, tous ceux qui ont obtenu des degrés, quoiqu’ils ne les ayent pas fait signifier à des patrons ou collateurs.

Les gradués qui ont fait signifier leurs grades peuvent requérir & recevoir des bénéfices ; ceux qui ne les ont pas fait signifier ne peuvent pas requérir, mais seulement recevoir certains bénéfices qui ne peuvent être possédés que par des gradués.

On distingue trois sortes de gradués : savoir ceux qui ont été reçûs dans les formes prescrites par les statuts & reglemens autorisés par les lois ; les gradués de grace qui ont la capacité requise, mais qui ont été dispensés du tems d’étude & de quelques exercices ordinaires pour y parvenir ; enfin, les gradués de privilége. On appelle ainsi ceux qui en Italie, & dans quelques autres pays catholiques, ont obtenu du pape ou de ses légats & autres personnes qui prétendent en avoir le pouvoir, des lettres à l’effet d’être dispensés des examens & autres exercices.

Les degrés de grace de docteurs ou de licentiés suffisent aux personnes que le Roi nomme aux archevêchés ou évêchés, lorsque les universités les ont donnés sur des dispenses accordées ou autorisées par le Roi ; mais les universités n’ont pas le pouvoir d’en donner de leur autorité privée.

Les gradués de grace, tels que sont ceux qui prennent des degrés en droit par bénéfice d’âge, & ceux qui obtiennent des degrés dans certaines universités où l’on a la facilité de les accorder, sans exiger le tems d’étude nécessaire, ne peuvent en vertu de leurs grades requérir des bénéfices.

Les gradués de privilége ne sont point reconnus en France.

L’origine du droit des gradués sur les bénéfices est fort ancienne : en effet, dès le xiij. siecle les papes conféroient les bénéfices aux gradués, suivant le rôle qui leur en étoit envoyé par les universités ; mais les gradués n’avoient pas encore un droit certain aux bénéfices.

Les gradués étant fort négligés par les collateurs & par les patrons, il en fut fait de grandes plaintes au concile de Bâle, qui leur affecta la troisieme partie des bénéfices, ce qui fut aussi-tôt confirmé en France par la pragmatique-sanction du roi Charles VII. & depuis par le concordat fait entre Léon X. & le roi François I.

Mais comme il n’étoit pas facile de partager tous les bénéfices du royaume en trois parties égales, le même concordat ordonna que l’année seroit divisée en trois parties, & que les bénéfices qui vaqueroient par mort durant le tiers de l’année, seroient affectés aux gradués.

Ce tiers étant de quatre mois : on en a affecté deux aux gradués simples ; savoir Avril & Octobre, qu’on nomme mois de faveur ; & deux aux gradués nommés, qui sont Janvier & Juillet, qu’on appelle mois de rigueur.

Tous gradués soit simples ou nommés, sont sujets à l’examen de l’ordinaire avant d’obtenir le visa, & ce non-seulement pour les mœurs, mais aussi pour la capacité.

On entend par gradués simples, ceux qui n’ont que les lettres de leurs degrés avec leurs attestations de tems d’étude ; les gradués nommés sont ceux qui ont en outre des lettres de nomination, par lesquelles l’université en laquelle ils sont gradués, les présente aux collateurs & patrons ecclésiastiques pour être pourvûs des bénéfices qui viendront à vaquer dans les mois qui leur sont affectés.

Il y a néanmoins une exception pour les bénéfices à charge d’ames, à l’égard desquels il est permis au collateur par les derniers reglemens de gratifier le plus capable, quoique le bénéfice ait vaqué dans un mois de rigueur.

Tous collateurs & patrons ecclésiastiques, soit séculiers ou réguliers, sont sujets à l’expectative des gradués ; les chanoines, chapitres, doyens, abbés, abbêsses, évêques, archevêques, cardinaux.

Le pape même seroit sujet au droit des gradués, s’il conferoit comme ordinaire de France ; mais il n’y est pas sujet quand il confere comme ordinaire des ordinaires, jure devolutionis.

Les bénéfices sujets aux gradués sont tous les bénéfices dont ils sont capables, & qui vaquent par mort dans les mois qui leur sont affectés, à l’exception des bénéfices consistoriaux, des électifs-confirmatifs, & de ceux qui sont à la nomination ou collation du Roi.

Ceux dont la nomination appartient alternativement au Roi & à un patron ou collateur ecclésiastique, sont sujets aux gradués dans le tour du patron ou collateur ecclésiastique.

Les dignités des églises cathédrales sont exemptes de l’expectative des gradués, suivant l’édit de 1006 ; mais il n’a pas été enregistré au grand conseil, ni dans quelques parlemens.

Les bénéfices en patronage laïc, ceux qui exigent quelques qualités particulieres, comme de noble ou de musicien ; les bénéfices unis valablement, & ceux fondés depuis la date de la nomination des gradués, ne sont pas non plus sujets à leur droit, ni les chapelles desservies par commission dans des châteaux & maisons particulieres, ces chapelles n’étant pas des bénéfices.

L’affectation particuliere d’un certain nombre de bénéfices d’une église faite à des gradués par le titre d’érection d’une église, n’empêcheroit pas les gradués de requérir les autres bénéfices dans les mois qui leur sont affectés.

Les gradués ne peuvent pas requérir des bénéfices en Bretagne ni en Franche-Comté, dans les trois évêchés de Metz, Toul, & Verdun, ni dans le Roussillon.

Le concordat donne aux gradués le decret irritant, c’est-à-dire que toute disposition qui seroit faite au préjudice de leur requisition, seroit nulle de plein droit ; mais si le collateur ordinaire avoit conféré à un non-gradué un bénéfice sujet aux gradués, & qui auroit vaqué dans un des mois qui leur sont affectés, la provision ne seroit pas nulle de plein droit ; elle subsisteroit, pourvû qu’aucun gradué ne vînt après requérir dans les six mois.

Suivant le concordat, les gradués doivent s’adresser dans les six mois de la vacance du bénéfice au collateur ordinaire & patron, pour requérir le bénéfice vacant ; en cas de refus du collateur ou patron, ils doivent s’adresser au supérieur immédiat, en remontant de degré en degré jusqu’au pape ; & si le collateur n’a point de supérieur ecclésiastique dans le royaume, les parlemens commettent le chancelier de Notre-Dame ou le grand archidiacre de la même église, pour donner des provisions. En Normandie, les gradués obtiennent des lettres de chancellerie adressées aux évêques ou à leurs grands-vicaires, qui leur ordonnent de conférer aux gradués, & les collateurs obéissent à cet ordre.

Lorsqu’un bénéfice sujet aux gradués vient à vaquer, le gradué qui veut le requérir doit se transporter chez le collateur, lui demander le bénéfice ; si le collateur le lui refuse, il faut prendre acte du refus, le faire insinuer, & se présenter au supérieur immédiat, lui justifier de l’acte de refus, & des titres en vertu desquels le gradué requiert, & en cas de nouveau refus, il faut faire la même chose auprès du supérieur.

Le collateur supérieur ne peut pas conférer d’avance, mais seulement en cas de refus de la part du collateur ordinaire.

Le tems d’étude nécessaire pour acquérir les degrés à l’effet de pouvoir requerir des bénéfices, est reglé par l’ordonnance de Louis XII. du mois de Mars 1498, & du mois de Juin 1510, auxquelles le concordat est aussi conforme en ce point ; ce tems est de dix ans pour les licentiés ou bacheliers formés en Théologie ; sept ans pour les docteurs ou licentiés en Droit canon, civil, ou en Medecine ; pour les maîtres ou licentiés-ès-Arts cinq ans à logicalibus inclusivè, ou en autre plus haute & supérieure faculté ; pour les bacheliers simples en Théologie six ans ; pour les bacheliers en Droit canon ou civil, cinq ans, à-moins qu’ils ne fussent nobles ex utroque parente, & d’ancienne lignée ; auquel cas il suffit qu’ils ayent étudié trois ans.

L’université de Paris est dans l’usage de recevoir maîtres-és-Arts ceux qui ont fait leur cours dans les universités de Reims & de Caen, & qui ont étudié un an dans l’université de Paris.

Le certificat de tems d’étude doit être signé du professeur, & visé du principal où l’on a étudié.

Les lettres de degré doivent aussi être délivrées par les universités ou l’on a étudié.

Pour obtenir des bénéfices en vertu de ses grades, il faut notifier aux collateurs ou patrons ses degrés, ses lettres de nomination, si on en a, & le certificat de tems d’étude.

Cette notification doit être faite en présence de deux notaires apostoliques, ou d’un notaire apostolique & de deux témoins qui signent la minute de la notification ; en cas de refus du notaire apostolique, il faut lui demander acte de son refus ; s’il ne veut pas le donner, il faut s’adresser au juge royal, pour en obtenir une ordonnance qui autorise un autre officier à instrumenter au lieu & place du notaire apostolique.

Les mêmes formalités doivent être observées dans la notification que les gradués sont obligés de réitérer tous les ans dans le tems de carême, de leurs noms & surnoms aux collateurs ou patrons ecclésiastiques.

Le concordat veut que ces notifications soient faites à la personne du collateur ou à son domicile ; cependant il y a des diocèses où ces actes se signifient à l’évêque, en parlant à son secrétaire : le greffier du chapitre, ou la premiere dignité dans les lieux où cet usage est établi, reçoivent aussi les actes de notification comme feroit le chapitre même.

A l’égard de la rémotion qui se fait tous les ans en l’absence des collateurs, elle peut être faite à leurs vicaires, & au défaut des vicaires au greffe des insinuations.

Le gradué qui a fait notifier ou insinuer ses degrés au collateur avant la vacance du bénéfice, est préféré à celui qui n’a notifié les siens que dans le tems de la vacance ; mais celui-ci l’emporte sur un pourvû per obitum, postérieurement à la requisition.

Quand la nomination du gradué n’est adressée qu’au patron, il suffit de la notifier au patron ; mais si elle est aussi adressée au collateur, il faut la notifier à l’un & à l’autre.

Un gradué qui omet en un carême de réitérer la notification de ses noms & surnoms, n’est pas pour toûjours déchu de son droit, mais seulement pour cette année.

Quand un bénéfice vaque dans un des deux mois de faveur, le collateur ou patron n’est pas obligé de le conférer au plus ancien gradué ni au plus qualifié ; il peut choisir entre tous les gradués soit simples ou nommés qui ont requis, celui qu’il juge à-propos.

Ainsi les gradués nommés peuvent requerir les bénéfices qui vaquent dans les mois de faveur ; mais les gradués simples ne peuvent pas requérir ceux qui vaquent dans les mois de faveur.

Dans les mois de rigueur le collateur ou patron est oblige de conférer aux gradués nommés, eu égard à l’ancienneté & à la prérogative de leurs grades.

L’ancienneté se détermine par la date des lettres de nomination.

Entre plusieurs gradués nommés, qui sont également anciens, on préfere le plus qualifié : ainsi les docteurs, licentiés, ou bacheliers formés en Théologie, sont préférés aux docteurs en Droit civil, en Droit canon, ou en Medecine ; les bacheliers en Droit canon ou en Droit civil, aux maîtres-ès-Arts ; les docteurs en Droit canon, aux docteurs en Droit civil, & aux docteurs en Medecine ; les bacheliers en Droit canon, aux bacheliers en Droit civil : mais cela n’a lieu qu’en concurrence de date.

On ne peut tirer aucune préférence de ce qu’un gradué a été nommé par une université plus fameuse qu’une autre, pourvû que celle-ci soit aussi du nombre des universités fameuses.

Si plusieurs gradués ont des lettres de nomination du même jour, on préfere celui qui a obtenu le premier ses degrés.

Lorsque toutes choses se trouvent égales, le collateur ou patron a la liberté de nommer celui qu’il juge à-propos.

Les gradués nommés sont obligés d’exprimer dans leurs lettres les bénéfices dont ils sont pourvûs, & la véritable valeur de ces bénéfices, année commune.

Les gradués doivent aussi faire mention des pensions qu’ils se sont reservées en résignant.

Ce n’est pas assez pour requérir un bénéfice en vertu de ses grades, d’avoir fait insinuer dûement ses degrés, il faut aussi avoir l’âge & les autres qualités requises pour le bénéfice, soit par la loi, soit par la fondation.

Il faut aussi être françois, ou du moins être naturalisé ; mais il suffit que ces lettres soient enregistrées avant le jugement du procès.

Pour requérir des bénéfices en vertu de ses grades, il faut être du-moins tonsuré.

Il faut aussi être né d’un mariage légitime.

Il est pareillement nécessaire d’être capable des effets civils.

Un gradué qui est in reatu, ne peut requérir de bénéfice.

Pour qu’un gradué soit censé rempli, il faut qu’il ait du-moins quatre cents livres de revenu en bénéfices obtenus en vertu de ses grades, ou six cents livres en bénéfices obtenus autrement qu’en vertu de ses grades, si c’est un ecclésiastique séculier ; car s’il est régulier, le plus petit bénéfice suffit pour qu’il soit censé rempli ; le tout à-moins que les gradués ne prouvent qu’ils ont été évincés de ces bénéfices par jugement contradictoire donné sans fraude ni collusion.

Lorsqu’il s’agit de déterminer s’il y a replétion, on considere la valeur des bénéfices du gradué, eu égard au tems qu’ils lui sont advenus.

Les rétributions & même les distributions journalieres & les obits de fondation, sont comptés dans le revenu pour la replétion.

La somme de quatre cents ou de six cents livres nécessaire pour remplir le gradué, s’entend, toute déduction faite, des charges ordinaires, telles que les décimes, mais non pas des charges extraordinaires & casuelles, au nombre desquelles on met le don gratuit.

Les gradués ne sont pas remplis par des pensions qui ne sont pas cléricales ; mais celles qui leur tiennent lieu de la dotation d’un titre ecclésiastique, les remplissent comme des bénéfices. Il en est de même des autres pensions cléricales assignées sur les fruits d’un bénéfice, pour être payées par le titulaire pendant la vie du pensionnaire.

Un gradué séculier ne peut pas requérir un bénéfice régulier, & vice versâ.

Les gradués réguliers ne peuvent requérir en vertu de leurs grades des bénéfices d’un autre ordre, même avec dispense du pape ; & celui qui a déjà un bénéfice autrement qu’en vertu de ses grades, ne peut pas non plus en requérir un autre, quand même il auroit une dispense ad duo, parce que le pape ne peut donner d’extension au concordat.

Les bénéfices que peuvent requérir les gradués, sont ceux qui vaquent par mort ; ils ne peuvent pas exercer leur droit sur ceux dont le défunt a permuté, ou dont il a donné sa démission pure & simple, lorsqu’il y a deux jours francs avant le décès de celui qui a résigné ou permuté.

Pour posseder une cure dans une ville murée, il faut être gradué ; la dispense de degrés qui seroit donnée par le pape, ne seroit pas admise.

Au reste, il suffit d’être gradué avant la prise de possession d’une telle cure.

Il y a encore d’autres bénéfices pour lesquels il faut être gradué. 1°. Les prébendes théologales ne peuvent être conférées qu’à des docteurs en Théologie, ou à des bacheliers formés. 2°. Pour posseder une dignité dans une cathédrale, ou la premiere dignité d’une collégiale, il faut être au-moins bachelier en Théologie ou en Droit canon. Pour être archevêque ou évêque, il faut être docteur en Théologie, ou docteur en Droit, ou au-moins licencié ; mais les princes du sang & les religieux mendians sont dispensés d’être gradués.

Les régens septenaires de l’université de Paris, c’est-à-dire qui ont professé quelque science pendant sept ans, même la Grammaire, pourvû que ce soit en un collége célebre, & ceux qui ont été principaux d’un collége de même qualité aussi pendant sept années entieres & sans interruption, sont préférés dans les mois de rigueur à tous les gradués nommés, excepté aux docteurs en Théologie.

Les professeurs, pour joüir de ce privilége de septenaires, doivent avoir leur quinquennium.

En concurrence de plusieurs professeurs en diverses facultés, on adjuge le bénéfice à celui d’entre eux qui est le plus ancien gradué.

Quand le régent septenaire concourt avec un docteur en Théologie aussi ancien que lui, ces deux gradués étant égaux en toutes choses, le collateur peut gratifier celui qu’il juge à propos.

Le septenaire de Paris est préféré aux gradués des autres universités, même pour les bénéfices des autres diocèses.

Les régens septenaires des universités de Caën & de Reims ont aussi le même privilége que ceux de Paris.

Le tems que les gradués ont pour requérir, est de six mois.

Le pape peut prévenir les gradués, mais il faut que ce soit avant leur requisition ; & pour empêcher la prévention du pape, il n’est pas nécessaire que le gradué ait obtenu des provisions du collateur ordinaire ; il suffit pour lier les mains au pape, qu’il ait fait sa requisition, & si le collateur ou patron la refuse, qu’il en prenne un acte de refus.

La requisition faite par un gradué dont le degré seroit nul, met à couvert le droit de tous les autres gradués, quoiqu’ils n’ayent requis qu’après les provisions données par le pape.

Quoiqu’un gradué nommé ait obtenu des provisions, il est évincé de plein droit par un gradué nomme plus ancien que lui, qui se présente dans les six mois qu’ils ont pour faire leurs requisitions.

Les chapitres peuvent sede vacante conférer aux gradués simples & nommés.

Il n’est pas libre aux collateurs ou patrons dans les mois de faveur, de gratifier des gradués qui n’ont pas fait insinuer leurs grades.

Les gradués ne peuvent pas transmettre leurs droits à d’autres gradués, si ce n’est après avoir obtenu des provisions.

A l’égard du droit de conférer les bénéfices affectés aux gradués, quand il est dévolu au supérieur faute par l’inférieur d’avoir conféré dans six mois, le supérieur peut conférer de la même façon qu’auroit fait l’inférieur, & conséquemment gratifier un des contendans, supposé que l’inférieur eût le droit de le faire, soit que le bénéfice eût vaqué dans un mois de faveur, ou que toutes choses fussent égales entre les contendans ; autre chose seroit si le droit étoit dévolu au supérieur, pour avoir par l’inférieur conféré à un clerc non gradué ; car dans ce cas le collateur a perdu le droit de gratifier pour avoir contrevenu au concordat.

Un gradué qui se marie ou qui s’est fiancé, perd son droit de nomination.

Il y auroit encore bien d’autres choses à observer par rapport aux gradués, mais qui nous jetteroient dans une trop longue discussion ; ceux qui voudront approfondir cette matiere, peuvent consulter les ordonnances de Louis XII. du mois de Mars 1498, & Juin 1510 ; le concordat, l’édit de 1606, le traité des matieres bénéficiales de Fuet, celui de Drapier.

Il ne nous reste plus qu’à expliquer dans les subdivisions suivantes les différentes qualifications que l’on donne aux gradués. (A)

Gradué ancien, ou plûtôt comme on dit, l’ancien gradué, ou le plus ancien gradué, n’est pas celui qui a le premier obtenu ses grades ; on entend ordinairement par-là celui d’entre plusieurs gradués nommés dont les lettres de nomination sont antérieures aux lettres des autres gradués. Il arrive néanmoins aussi qu’entre plusieurs gradués nommés dont les lettres sont de même date, & toutes choses étant égales entr’eux, on préfere celui qui est le plus ancien par ses grades. (A)

Gradué ès Arts, est celui qui a obtenu des lettres de maître dans la faculté des Arts. Voyez Maitre-ès-Arts. (A)

Gradué en Droit canon, est celui qui a obtenu des degrés dans une faculté de Droit en Droit canon seulement. (A)

Gradué en Droit civil, est celui qui a obtenu des degrés en droit civil seulement : ce qui ne se pratique plus qu’à l’égard des étrangers. Voyez ce qui a été dit ci-dev. au mot Docteur en droit. (A)

Gradué en Droit civil et canonique, ou in utroque jure, est celui qui a obtenu ses degrés dans l’une & l’autre faculté. (A)

Gradué de faveur : on donne quelquefois ce nom aux gradués simples. Voyez Gradué simple. (A)

Gradué dans les formes, est celui qui pour obtenir ses degrés, a rempli le tems d’étude & les autres formes nécessaires, suivant les réglemens observés dans le royaume. Voyez Gradué de grace & Gradué de privilege. (A)

Gradués de grace, sont ceux qui obtiennent des degrés en droit par bénéfice d’âge, & ceux qui obtiennent des degrés dans certaines universités où l’on a la facilité de les accorder sans exiger le tems d’étude nécessaire. Ces sortes de gradués ne peuvent en vertu de leurs grades requérir des bénéfices. (A)

Gradué en Midecine, est celui qui a obtenu des degrés dans une faculté de Medecine. Les gradués en Droit sont préférés aux gradués en Medecine. (A)

Gradué nommé, est celui qui a obtenu des lettres de nomination de l’université où il a pris ses degrés, par lesquelles l’université le présente aux collateurs & patrons ecclésiastiques pour être pourvû des bénéfices qui viendront à vaquer dans les mois qui sont affectés aux gradués. (A)

Gradués de Privilége, sont ceux qui en Italie & dans quelques autres pays catholiques ont obtenu du pape ou de ses légats & autres personnes qui prétendent en avoir le pouvoir, des lettres à l’effet d’être dispensés des examens & autres exercices. Ces sortes de gradués ne sont point reconnus dans le royaume, à l’effet de requérir des bénéfices. (A)

Gradué qualifié, est celui qui a les qualités requises pour posséder un bénéfice. Entre plusieurs gradués, le plus qualifié est celui qui a le grade le plus élevé, ou en parité de grades, qui a d’ailleurs quelqu’autre qualité qui doit le faire préférer, comme s’il est noble. (A)

Gradué rempli, est celui qui possede du-moins 400 liv. de revenu en bénéfices obtenus en vertu de ses grades, ou 600 liv. en bénéfices obtenus autrement qu’en vertu de ses grades, si c’est un ecclésiastique séculier ; car si c’est un régulier, le plus petit bénéfice suffit pour le remplir. Voyez ce qui en est dit ci-devant au mot Gradué, & ci-après Replétion. (A)

Gradué régulier, est un religieux ou chanoine régulier qui a obtenu des degrés dans une université : sur quoi il faut observer qu’il n’y a que certains ordres qui soient admis à prendre des degrés. (A)

Gradué de rigueur, voyez Gradué nommé.

Gradué per saltum, est celui qui a obtenu ses degrés sans observer le tems d’étude & les interstices nécessaires entre l’obtension des différens degrés. Les grades ainsi obtenus per saltum ne servent pas en France pour requérir des bénéfices. Voyez Gradué de grace. (A)

Gradué séculier, est un ecclésiastique séculier qui a obtenu des grades. Gradué séculier est opposé à gradué régulier ; on confond quelquefois gradué laïc avec gradué séculier. Voyez Gradué régulier. (A)

Gradué septenaire : on donne quelquefois improprement ce titre de gradué à celui qui a professé pendant sept ans dans un collége de plein exercice, ou qui a fait pendant sept ans la fonction de principal. Ces deux fonctions équivalent l’une & l’autre à un grade. Le septenaire est même préféré à tous les gradués, excepté aux docteurs en Théologie. (A)

Gradué simple, est celui qui n’a que les lettres de ses degrés avec une attestation du tems d’étude ; à la différence des gradués nommés, qui ont en outre des lettres de nomination sur un collateur ou patron. Les gradués simples ne peuvent requérir que les bénéfices qui vaquent au mois de faveur. Voyez ci-devant au mot Gradué. (A)

Gradué en Theologie, est celui qui a obtenu quelque degré dans la faculté de Théologie, comme de bachelier, licencié, ou docteur. Ces gradués sont préférés à tous les autres en partie de degré. (A)

Gradué in utroque, voyez ci-devant Gradué en Droit civil et canon. (A)