L’Encyclopédie/1re édition/FOURBISSEUR

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FOURBISSEUR, s. m. celui qui fourbit ; il ne se dit plus que de l’artisan qui fourbit & éclaircit les épées, qui les monte & qui les vend. Voyez Fourbir.

Les outils & instrumens dont se servent les maitres fourbisseurs, sont divers marteaux, toutes sortes de limes, des tenailles de fer, des cisailles, des rapes, des bigornes, des étaux, soit à main soit à établi ; un tas, des grateaux, des brunissoirs, des forets avec la palette & leur archet, quantité de différens mandrins, comme ceux qu’ils nomment mandrin de plaque, mandrin de garde, mandrin de corps, mandrin de branche, & mandrin debout ; une pointe, des pinces rondes, quarrées & pointues ; une chasse-poignée, une boule au chasse-pommeau ; des filieres à tirer l’or, l’argent, le cuivre : grand nombre de ciselets, entr’autres, des gouges, des feuilles, des rosettes, des perloirs, des frisoirs, des masques, des matoirs, des pointes, des grattoirs, des couteaux à refendre, des filieres, & quelques-autres qui servent à damasquiner & ciseler en relief les gardes, plaques, & pommeaux d’épée ; enfin divers burins & instrumens de bois sans nom, pour soûtenir le corps de la garde en la montant. Voyez une grande partie de ces outils, Pl. du Fourbisseur.

Les maîtres de cette communauté sont qualifiés, maîtres jurés Fourbisseurs & Garnisseurs d’épées & autres bâtons au fait d’armes, de la ville de Paris.

Ils ont droit de fourbir, monter, garnir, & vendre des épées, des lances, des dagues, des hallebardes, des épieux, des masses, des pertuisannes, des haches, & les armes qu’on a inventées de nouveau, & dont on se sert en la place des anciennes.

Quatre jurés, dont deux sont élus tous les ans, veillent à l’observation des réglemens, & doivent faire les visites deux fois le mois ; ils donnent le chef-d’œuvre aux aspirans à la maitrise, & appellent quatre bacheliers de ceux qui sont les derniers sortis de jurande, pour juger si le chef-d’œuvre est recevable.

Pour être reçû au chef-d’œuvre, il faut avoir fait apprentissage de cinq ans chez les maîtres de Paris. Les apprentis des autres villes y peuvent néanmoins être reçûs, en justifiant de trois années de leur apprentissage, & en le continuant encore trois autres à Paris.

Les fils de maîtres, même des maîtres de lettres, ne sont point tenus au chef-d’œuvre.

Les veuves joüissent de tous les priviléges de leurs maris, à la reserve du droit de faire des apprentis : elles peuvent cependant achever celui qui est commencé.

Aucune marchandise foraine ne peut être achetée par les maîtres, qu’elle n’ait été visitée des Jurés ; & même après la visite, elle est sujette au lottissage.

Les maîtres Fourbisseurs peuvent seuls dorer, argenter, & ciseler les montures & garnitures d’epées & autres armes ; comme aussi y faire & mettre des fourreaux.

Le bois qui sert à la monture des fourreaux se tire de Villers-Cotterets ; on n’y employe guere que du hêtre qu’on achette en feuilles de quatre pouces de large, & de deux ou trois lignes d’épaisseur ; & qu’après avoir dressé avec des rapes, on coupe le long d’une regle avec un couteau, pour les réduire & partager en une largeur convenable à la lame qui doit y être enfermée : ces feuilles de hêtre se vendent ordinairement au cent.

On n’employe point d’autre moule pour faire ces fourreaux, que la lame même de l’épée, sur laquelle on place d’abord le bois, qu’on couvre ensuite de toile, & enfin d’un cuir bien passé qu’on coud par-dessus, après avoir collé le tout ensemble. On met un bout de métal à la pointe & un crochet au haut.

Il y a des maîtres Fourbisseurs qui ne s’appliquent qu’à la fabrique des fourreaux ; d’autres qui ne font que des montures ; & d’autres qui montent les épées, c’est-à-dire qui y mettent la garde & la poignée.

Les Fourbisseurs de Paris ne forgent point les lames qu’ils montent ; ils les tirent d’Allemagne, de Franche-Comté, de S. Etienne en Forez ; ces dernieres ne servent que pour les troupes ; celles d’Allemagne sont les plus fines & les plus estimées, celles de Franche-Comté tiennent le milieu : elles se vendent toutes au cent, à la grosse, à la douzaine, & à la piece. Voy. les dict. de Chambers, de Trévoux, & du Comm.