L’Encyclopédie/1re édition/FAISCEAUX
FAISCEAUX, s. m. pl. (Hist. rom.) Les faisceaux étoient composés de branches d’ormes, au milieu desquelles il y avoit une hache dont le fer sortoit par en-haut ; le tout attaché & lié ensemble. Plutarque, dans ses problèmes, donne des raisons de cet arrangement, que je ne crois pas nécessaire de transcrire.
Florus, Silius Italicus & la plûpart des historiens nous apprennent que c’est le vieux Tarquin qui apporta le premier de Toscane à Rome l’usage des faisceaux, avec celui des anneaux, des chaises d’ivoire, des habits de pourpre, & semblables symboles de la grandeur de l’Empire. Quelques autres écrivains prétendent néanmoins que Romulus sur l’auteur de cette institution ; qu’il l’emprunta des Etruriens ; & que le nombre de douze faisceaux qu’il faisoit porter devant lui, répondoit au nombre des oiseaux qui lui prognostiquerent son regne ; ou des douze peuples d’Etrurie qui, en le créant roi, lui donnerent chacun un officier pour lui servir de porte-faisceaux.
Quoi qu’il en soit, cet usage subsista non-seulement sous les rois, mais aussi sous les consuls & sous les premiers empereurs. Horace appelle les faisceaux superbos, parce qu’ils étoient les marques de la souveraine dignité. Les consuls se les arrogerent après l’expulsion des rois ; de-là vient que sumere fasces, prendre les faisceaux, & ponere fasces, quitter les faisceaux, sont les propres termes dont on se servoit quand on étoit reçû dans la charge de consul, ou quand on en sortoit. Il y avoit vingt-quatre faisceaux portés par autant d’huissiers devant les dictateurs, & douze devant les consuls : les préteurs des provinces & les proconsuls en avoient six, & les préteurs de ville, deux ; mais les décemvirs, peu de tems après être entrés en exercice, prirent chacun douze faisceaux & douze licteurs, avec un faste & un orgueil insupportable. Voyez Décemvir.
Ceux qui portoient ces faisceaux, étoient les exécuteurs de la justice ; parce que, suivant les anciennes lois de Rome, les coupables étoient battus de verges avant que d’avoir la tête tranchée, lorsqu’ils méritoient la mort : de-là vient encore cette formule : I, lictor, expedi virgas. Quand les magistrats, qui de droit étoient précédés par des licteurs portant les faisceaux, vouloient marquer de la déférence pour le peuple, ils renvoyoient leurs licteurs, ou faisoient baisser devant lui leurs faisceaux ; ce qu’on appelloit fasces submittere. C’est ainsi qu’en usa Publius Valérius après être resté seul dans le consulat ; il ordonna, pendant qu’il joüissoit de toute l’autorité, qu’on séparât les haches des faisceaux que les licteurs portoient devant les consuls, pour faire entendre que ces magistrats n’avoient point le droit de glaive, symbole de la souveraine puissance ; & dans une assemblée publique la multitude apperçut avec plaisir qu’il avoit fait baisser les faisceaux de ses licteurs, comme un hommage tacite qu’il rendoit à la souveraineté du peuple romain : Fasces, dit Tite-Live, majestati populi romani submisit. Ce fut cette sage conduite, que ses successeurs ne suivirent pas toûjours, qui fit donner à ce grand homme le nom de Publicola ; mais ce fut moins pour mériter ce titre glorieux que pour attacher plus étroitement le peuple à la défense de la liberté, qu’il relâcha de son autorité. Nous lisons dans Pline, l. VII. que lorsque Pompée entra dans la maison de Posidonius, fasces litterarum januæ submisit, pour faire honneur au philosophe, aux talens & aux sciences.
Ces généralités qu’on trouve par-tout, peuvent ici suffire ; voyez-en les preuves ou de plus grands détails dans Tite-Live, Denys d’Halicarnasse, lib. III. cap. lxxxjv. Florus, liv. I. c. 5. Silius Italicus, liv. VIII. v. 486. Plutarque, Censorin, de die nat. Rosin, antiq. rom. lib. VII. cap. iij. & xjx. Rhodiginus, lib. XII. cap. vij. Godwin, anthol. rom. lib. III. c. ij. sect. 2. César Paschal, de coronis ; Middleton, of roman senate, &c. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.
Faisceaux d’Armes ; c’est, dans l’Art militaire, un nombre de fusils dressés la crosse en-bas & le bout en-haut, rangés en rond autour d’un piquet principal, sur lequel sont des traverses pour arrêter le bout du fusil. On les garantit de la pluie en les couvrant d’un manteau d’armes. Voyez Manteau d’Armes.
Lorsque l’infanterie est campée, chaque compagnie a son faisceau d’armes. Ces faisceaux doivent être dans le même alignement, & à dix pas de trois piés, c’est-à-dire à cinq toises en-avant du front de bandiere. Voyez Front de bandiere. (P)
Faisceau optique, (Optique.) assemblage d’une infinité de rayons de lumiere qui partent de chaque point d’un objet éclairé, & s’étendent en tout sens. Alors ceux d’entre ces rayons qui tombent sur la portion de la cornée qui répond à la prunelle, feront un cone dont la pointe est dans l’objet, & la base sur la cornée ; ainsi autant de points dans l’objet éclairé, autant de cones de rayons réfléchis : or c’est l’assemblage des différens faisceaux optiques de rayons de lumiere, qui peint l’image des objets renversés dans le fond de l’œil. Voyez Rayon, Vision, &c. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.
Faisceau, (Pharmacie.) est un terme dont on se sert pour exprimer une certaine quantité d’herbes.
Par faisceau on entend autant d’herbes qu’un homme peut en porter sur son dos, depuis les épaules jusqu’au sommet des hanches ; d’autres le prennent pour ce qu’il en peut serrer sous un seul bras. Au lieu de faisceau les Medecins écrivent par abbréviation, fasc.
On ne détermine que très-rarement la quantité des plantes par cette mesure, qui est fort peu exacte, comme on voit. (b)
Faisceaux, (Jardinage.) sont composés de plusieurs canaux en forme de réseaux, servant à porter le suc nourricier dans toutes les parties de l’arbre. (K)