L’Encyclopédie/1re édition/ESTURGEON

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ESTURGEON, s. m. (Hist. nat. Ichtholog.) accipenser, poisson cartilagineux, qui a le corps long, & cinq rangs d’écailles osseuses, qui s’étendent d’un bout à l’autre, & qui forment les bords de cinq faces longitudinales. Le ventre est plat, les écailles sont terminées par une petite pointe ferme & recourbée. Le bec est long, large, mince, & prolongé au delà de la bouche : il y a sous le bec quatre barbillons. La bouche est petite & dépourvûe de dents ; la queue ressemble à celle des chiens de mer ; le dessus du corps est d’un bleu noirâtre, & le dessous de couleur argentée. Ce poisson entre dans les grandes rivieres, & il y devient aussi grand qu’un poisson cétacée. On en a vû qui avoient plus de 16 piés de longueur, & qui pesoient jusqu’à deux cents soixante livres, mais dans la mer il ne passe guere un pié & demi. L’esturgeon est excellent à manger. Raii, synop. method. pisc. Rondelet, hist. des poissons. Voyez Poisson. (I)

* Esturgeon, (Pêche.) La pêche de l’esturgeon avec les tramaux dérivans commence en Février & dure jusqu’en Juillet & Août, & même plus tard, suivant la saison. Les Pêcheurs qui font cette pêche dans la riviere, amarrent par un cordage de quelques brasses les bouts de leur tressure, qui a quelquefois plus de 100 brasses de long, à un pieu qui est planté à la rive, ou attaché à quelque arbre de bord. Le rets, suivant la profondeur des eaux, a 2, 3 à 4 brasses de chûte, & pour lors le tramail reste sédentaire sans dérive, & arrête au passage les créacs, c’est-à-dire les esturgeons qui montent ou qui descendent.

On fait encore cette même pêche à la seine, qui est traînée par deux petites filadieres montées chacune de trois à quatre hommes. Cette seine a une espece de sac ou chausse dans le milieu. Les Pêcheurs manœuvrent toûjours de maniere que la marée soit portée dans la chausse, laquelle est soûlevée par le flot. Quand ils s’apperçoivent qu’il y a quelques esturgeons de pris, ils les retirent & les amarrent par des bouts de ligne qui passent au-travers des oüies & de la gueule du poisson : ils conservent ainsi les esturgeons vivans jusqu’à ce qu’ils en ayent assez pour faire un voyage à Bordeaux, où ils les portent tous ; & même un seul pêcheur amasse quelquefois les esturgeons des autres & les porte à la vente, pendant que les autres continuent leur pêche.