L’Encyclopédie/1re édition/EMOUCHOIR

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EMOUCHOIR, s. m. (Manége.) espece de couverture qui revêt toutes les parties du corps du cheval harnaché, qui ne sont point occupées par la selle ; elle s’étend par conséquent sur la croupe, sur l’encolure & sur le sommet de la tête, & descend environ jusque sur le milieu des faces latérales de ces mêmes parties. Au haut de l’extrémité antérieure de la portion destinée à recouvrir l’encolure, sont percés deux trous à l’effet de livrer un passage aux oreilles de l’animal, & à son extrémité postérieure près de la sellette, sont attachés deux contre-sanglots que l’on arrête dans des boucles près de la pointe de l’arçon de devant. A l’égard de la portion qui garnit toute la croupe, elle est fixée d’une part à la croupiere, par le moyen d’une attache qui est cousue dans son milieu, & de l’autre & de chaque côté, par d’autres attaches qui la lient aux pointes de l’arçon de derriere : elle fournit aussi un passage à la queue. Cette sorte de couverture est bordée de toutes parts, & de cette bordure qui regne tout le long du corps de l’animal, partent à l’encolure & à la croupe des especes de cordes que nous nommons des volettes, qui descendent de maniere qu’elles jouent au moindre mouvement, & qu’étant portées alors de côté & d’autre indifféremment, elles remplissent l’intention que nous avons d’émoucher le cheval, c’est-à-dire, de le garantir de l’insulte & de la picquûre des mouches, & de chasser celles qui l’incommodent. Ces volettes n’outre-passent pas en descendant le corps de l’animal, & n’empietent que très peu sur ses extrémités.

Le mot émouchoir dérive donc de l’usage auquel cette couverture est consacrée. Quelques personnes la nomment émouchettes, mais ce terme ne paroît point adopté ; d’autres l’appellent chasse-mouche ; d’autres enfin ne la connoissent que sous un nom qui ne lui convient point, & qui est destiné à désigner une autre sorte de couverture, puisque c’est sous celui de caparasson.

Il est deux sortes d’émouchoirs ; les uns sont à mailles ou à filets, les autres sont d’un tissu suivi. Ces derniers se font ordinairement de couti, & sont plus capables de satisfaire l’objet que nous nous proposons, puisque les insectes dont nous voulons défendre l’animal, ne trouvent point comme dans les premiers, des espaces au-travers desquels ils puissent s’insinuer jusque sur les tégumens. Peut-être que quelqu’un pensera qu’ils ne parent point un cheval autant que les émouchoirs à mailles bordés d’or ou d’argent, & dont les volettes sont de soie ; mais j’imagine que l’utilité doit toûjours être préférée aux ornemens ; & d’ailleurs il n’est pas impossible de construire des émouchoirs semblables aux seconds, d’une étoffe très-riche, de les border en or, d’y ajuster des volettes d’or, si on le veut, & de porter en un mot à cet égard, le luxe & la magnificence à leur plus haut degré.

On conçoit au surplus que les émouchoirs seroient fort inutiles en hyver. Ils ne conviennent point à la chasse, par la raison qu’ils résisteroient très-peu dans les bois, dans les taillis, &c.

Il est assez commun de voir dans les provinces des émouchoirs à mailles placés sur les harnois des chevaux de carrosse.

Les émouchoirs usités relativement aux chevaux de tirage, sont de simples volettes de cordes qui sont bordées ; on attache aussi à la museliere un filet garni de volettes plus courtes.

Les Maréchaux appellent aussi émouchoir, une queue de cheval, joüant dans un manche de bois auquel elle est attachée. Ils s’en servent pour faire émoucher l’animal lorsqu’ils le ferrent ou qu’ils pratiquent quelqu’opération ; cette précaution est d’autant plus sage, qu’il ne leur seroit pas possible de maintenir en été le cheval dans un état de tranquillité nécessaire, & qu’il pourroit même en être blessé, s’ils ne prenoient le parti de le débarrasser de l’importunité de ces insectes. (e)