L’Encyclopédie/1re édition/DEIVIRIL

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DEIVIRIL, adj. (Théol.) terme employé par les Théologiens pour signifier en Jesus-Christ des opérations, qui tenoient en même tems de la nature divine & de la nature humaine ; comme le marque ce mot composé de Deus, Dieu, & virilis dérivé de vir, homme. Les Grecs exprimoient la même chose par le mot théandrique. Voyez Theandrique.

C’est dans ce sens que S. Denys appellé vulgairement l’Aréopagite dans son épître jv. à Caïus, disoit : ab Incarnationis tempore non secundum Deum divina gessit Christus ; nec humana secundum hominem : verum Deo viro facto novam quamdam theandricam seu Dei virilem operationem expressit in vitâ.

Les Monothélites lisoient unam operationem, au lieu de novam, pour établir leur opinion de l’unité de volonté en Jesus-Christ.

M. Witasse, dans son traité de l’Incarnation, part. II. quæst. vj. art. 3. sect. 3. remarque que ni les anciens ni les modernes n’ont jamais eu une notion bien claire de la vraie signification de ces mots, opérations dei-viriles : car, dit-il, on peut distinguer en Jesus-Christ trois sortes d’opérations ; les unes propres à l’humanité seule, comme avoir faim, avoir soif, manger, &c. les autres propres à la seule divinité, comme produire le S. Esprit, conserver la nature humaine, &c. d’autres enfin communes en quelque sorte à la nature divine & à la nature humaine, comme de ressusciter les morts par sa parole, de guérir les malades par l’attouchement de son corps, &c. De toutes ces opérations, continue ce théologien, lesquelles appellera-t-on Dei-viriles ? donnera-t-on ce titre à toutes les opérations de Jesus-Christ, selon la maxime reçûe, actiones ou operationes sunt suppositorum ? car ce suppositum, c’est-à-dire Jesus-Christ, étoit Dieu & homme tout ensemble : ne l’accordera-t-on qu’aux opérations par lesquelles il faisoit des miracles, parce que son corps y concouroit avec la puissance divine ? Il conclut donc que par ce terme on doit entendre une nouvelle maniere d’opérer qui étoit dans Jesus-Christ depuis l’Incarnation, parce que, ajoûte-t il, ce que le Verbe faisoit de divin, il ne le faisoit pas sans l’humanité ; & ce qu’il faisoit d’humain, il ne l’opéroit pas sans la divinité. D’où il s’ensuit que toutes les opérations du Christ pouvoient être appellées en ce sens dei-viriles : ce qui au reste ne favorise en rien la prétention des Monothélites. Voyez Monothelites. (G)