L’Encyclopédie/1re édition/MONOTHÉLITES

MONOTONIE  ►

MONOTHELITES, s. m. pl. (Hist. eccl.) anciens hérétiques, qui tiroient leur origine des Eutychiens, & furent ainsi nommés parce qu’ils ne reconnoissoient qu’une seule volonté en Jesus-Christ. Voyez Eutychien. Ce mot est grec, & composé de μονος, seul, & de θέλω, vouloir.

L’opinion des Monothélites prit naissance en 630, & fut protégée par l’empereur Heraclius. Ils ne différoient en rien des Séveriens acéphales. Voyez Séverien.

Ils admettoient bien à la vérité deux volontés en Jesus-Christ, considéré en tant qu’ayant deux natures en sa personne : mais des deux ils n’en faisoient qu’une, par rapport à l’union des deux natures ; regardant comme absurde qu’une même personne pût avoir deux volontés libres & distinctes. Voyez Personne.

Ils furent condamnés par le sixieme concile général, comme tendans à dégrader la perfection de la nature humaine en Jesus-Christ, en lui refusant une volonté & une opération qui lui fût propre. Ce concile déclara qu’il est de foi qu’on doit distinguer en Jesus-Christ deux volontés & deux opérations, qui ne sont point confondues l’une dans l’autre, mais subordonnées l’une à l’autre ; savoir la volonté humaine à la divine. Voyez Théandrique.

Il est bon d’observer 1°. que par le mot d’opération, les Monothelistes n’entendoient pas ou un acte, ou une faculté, mais l’un & l’autre en même tems, donnant au mot d’opération un sens plus étendu qu’à celui de volonté ; parcequ’opération comprend en général non-seulement tout acte, mais encore toute faculté d’agir, au lieu que le terme volonté marque seulement un certain genre d’opération & de faculté.

2°. Que quoiqu’ils ne reconnussent en Jesus-Christ qu’une opération ou qu’une volonté, ils n’expliquoient pas tous leurs sentimens d’une maniere uniforme. Les uns n’admettoient en Jesus-Christ qu’une puissance uniforme d’agir. Les autres au contraire, excluoient entierement cette puissance de la nature humaine, parce qu’ils croyoient, comme les Eutychiens, qu’elle avoit été comme absorbée dans la nature divine au moment de l’union hypostatique. D’autres pensoient que les facultés humaines étoient pour lors restées dans le Verbe, mais qu’elles y étoient demeurées comme mortes, n’ayant d’elles-mêmes nulle action, & n’agissant que comme des instrumens par l’impulsion de la volonté divine, d’où ils concluoient que pour les deux natures, il n’y avoit qu’une seule & unique opération. D’autres enfin admettoient en Jesus-Christ deux opérations, mais confondues l’une dans l’autre, & si bien mêlées, qu’elles n’en faisoient plus qu’une, à peu-près comme les Eutychiens, de deux natures n’en composoient qu’une, qu’ils comparoient à l’homme, composé de deux substances unies ensemble. Avec tant de variations & d’équivoques, il n’est point étonnant que les Monothélites en aient imposé aux empereurs, & même au pape Honorius, qui n’apperçut pas d’abord tout le venin de cette herésie.