L’Encyclopédie/1re édition/BORD

Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 331-332).

BORD, s. m. (Gramm.) se dit communément des parties les plus éloignées du milieu d’une étendue limitée. Cette définition est presque générale ; & c’est en ce sens qu’on dit le bord d’un pré, d’une table, d’un lit, d’une riviere, &c.

Bord, on entend ordinairement par le mot bord, le vaisseau même. On dit retourner à bord, sortir du bord, pour dire retourner au vaisseau, sortir du vaisseau ; venir à bord, c’est se rendre au vaisseau.

Renverser, tourner, changer le bord ; c’est revirer, & porter le cap sur un autre air de vent.

Rendre le bord, c’est-à-dire, venir mouiller, ou donner fond dans quelque rade ou quelque port.

Bord sur bord, courir bord sur bord ; c’est louvoyer, & gouverner tantôt à stribord, tantôt à basbord : lorsque le vent est contraire, & qu’il ne permet pas de porter à route, on chicane le vent, & on court sur plusieurs routes, pour approcher du lieu où l’on veut aller, ou pour ne s’abbatre pas, & ne s’éloigner que le moins qu’on peut.

Faire un bord, faire une bordée ; c’est faire une route, soit à basbord, soit à stribord.

Courir même bord que l’ennemi ; tenir même bord, c’est virer à stribord & à basbord, selon que l’ennemi y a viré, & porter sur le même rumb.

Mettre à l’autre bord ; virer, changer de bord.

Tenir bord sur bord, c’est-à-dire, courir d’un côté ou d’un autre au plus près de vent, soit pour attendre un vaisseau qui est de l’arriere, soit pour s’entretenir dans un parage. (Z) De bord à bord ; cette expression veut dire autant sur un côté du vaisseau que sur l’autre, & signifie encore de part & d’autre, de la droite route ; ce qui désigne la même chose. Lorsque l’on dit, par exemple, que l’on peut naviger ou faire des bordées sur onze points de compas de bord à bord, cela signifie qu’on peut se servir des onze airs de vent qui sont à stribord, ou à l’un des côtés du vent de la route ; & encore des onze autres airs de vent qui sont à basbord, ou à l’autre côté du même vent de la route. Comme si le lieu de la route est à l’ouest, le vent d’est sera le vent de la droite route : mais l’on peut se servir de vingt-deux rumbs de vents différens pour porter à l’ouest, ou s’en approcher ; savoir des onze airs de vent qui sont depuis l’est jusqu’au sud-ouest, quart de sud, & des onze autres airs de vent qui sont depuis l’est jusqu’au nord-ouest. Ainsi c’est naviger & gouverner sur onze airs de vent de bord à bord.

Bord à bord, deux vaisseaux qui sont bord à bord ; c’est-à dire, qu’ils sont prêts l’un de l’autre de l’avant en arriere.

Un bord qui allonge, c’est-à-dire, que la bordée que l’on court sert à la route, quoique le vent soit contraire.

Bon bord, faire un bon bord ; c’est-à-dire, que l’on a gagné ou avancé à sa route, étant au plus près du vent.

Bord à terre, bord au large ; on employe ce terme, lorsqu’on parle d’un vaisseau qui court à la mer, & qui recourt à terre, ou de la mer à terre, & de la terre à la mer.

Passe du monde sur bord ; c’est un commandement qui se fait à l’équipage, pour faire passer des matelots des deux côtés de l’échelle, pour recevoir ceux qui veulent entrer ou sortir du vaisseau. Ce commandement ne se fait que pour les officiers, & pour ceux à qui on veut rendre des honneurs.

Bas bord, haut bord ; on dit un vaisseau de haut bord, on dit aussi un vaisseau de bas bord. Voyez Navire & Vaisseau.

Bord de la mer, c’est le rivage ou les premieres terres qui bordent la mer.

Bord, Bordage ; ce sont les planches qu’on emploie à border un vaisseau.

Franc bord, ce sont les bordages qui couvrent les membres du vaisseau. Ce mot se prend aussi en particulier pour le bordage, depuis le bas des fleuves jusqu’au haut du vaisseau. (Z)

Bord de bassin, en Architecture, c’est la tablette ou le profil de pierre ou de marbre, ou le cordon de gason ou de rocaille, qui pose sur le petit mur, ou circulaire, ou quarré, ou à pans d’un bassin d’eau. (P)

Bords dentelés, (Rubannerie-Tissuterie.) est la même chose que dent de rat. Voyez Dent de rat.

Bord, Ruban, ou Galon, qu’on met aux extrémités des chapeaux, des juppes, & sur les coutures des habits, &c. On fabrique des bords de différente largeur, & de toute sorte de matiere, comme or, argent, soie, fil, &c.

On fait à Amiens quantité de bords de laine ; on en compte de trois sortes : l’un qu’on appelle petite bordure, dont la chaîne doit être composée de vingt-sept fils, & la piece doit contenir vingt-quatre aunes : l’autre dont la chaîne est de trente-trois fils, & la piece de vingt-quatre aunes, se nomme bord & demi ; & le troisieme qui doit avoir trente-six fils à la chaîne, & trente-six aunes à la piece, est appellé bord à dentelle. Voyez Rouleau de laine.

Bord, en terme de Vannier, c’est un cordon d’osier, plus ou moins gros selon la piece qu’il termine par en-haut, & qu’il rend plus solide.

Bord, en terme de Fondeur de cloche, est la plus grande épaisseur qu’elle ait, sur laquelle frappe le battant. Voyez l’article Fonte des cloches, & la fig. 1. Plan. de la fonderie des cloches. La troisieme partie du bord s’appelle corps. Voyez Corps.

Bord de manchon, en Pelleterie ; c’est une fourrure que l’on fait avec la peau d’un animal, aux deux bouts des manchons. Voyez Manchon.

Bord de front, terme de Perruquier ; c’est le nom que ces ouvriers donnent aux tresses qui se placent sur le bord de la perruque qui touche au front, & regnent depuis une des tempes jusqu’à l’autre.