L’Encyclopédie/1re édition/BILLET

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BILLET (en droit) est une promesse ou obligation sous signature privée, par laquelle on s’engage à faire ou payer quelque chose. Il faut pour en demander le payement en justice : 1°. qu’il soit contrôlé par un commis établi à cet effet : 2°. que l’écriture en soit reconnue par la partie qui l’a faite, ou vérifiée par experts, à l’exception des billets de change pour lesquels il n’est besoin ni de reconnoissance ni de contrôle. Voyez Change.

On appelle aussi billets, quantité d’autres petits actes faits sous signature privée, sans aucune formalité. (H)

Le mot billet se prend en différentes acceptions. Nous allons parcourir les principales.

Billet de Banque, voyez Banque.

Billets de Marchandises, exposition de différentes especes de marchandises, & de leur prix, dont le vendeur donne le détail à l’acheteur.

Billet de Cargaison ou connoissement, acte privé, que signe un maître de navire, en reconnoissant qu’il a reçu dans son bord les marchandises de quelqu’un, & s’obligeant de les remettre en bon état au lieu où elles sont destinées.

Il en est ordinairement de trois sortes. Le premier que garde le marchand ; le second, que l’on envoie au facteur à qui elles sont destinées ; & le troisieme, que retient le maître.

Billet de Vente : lorsqu’une personne a besoin d’une somme d’argent, elle met des marchandises entre les mains d’un prêteur, en gage de l’emprunt, en lui donnant ce billet, qui l’autorise à vendre les choses ainsi livrées, si la somme qu’elle emprunte n’est point acquittée avec les intérêts dans le tems prescrit.

Billets de Provisions, liberté accordée par le bureau de la douane aux marchands, pour leur permettre de se munir, sans payer certains droits, de choses dont ils ne peuvent se passer dans leurs voyages.

Billet de souffrance, privilége accordé par la doüane d’Angleterre à un marchand de trafiquer d’un port d’Angleterre à l’autre sans payer les droits.

Billet d’Entrée, détail de marchandises tant foraines qu’Angloises passées au bureau.

Outre les différentes especes de billets dont nous venons de faire mention, il y en a un si grand nombre d’autres, que l’énumération en seroit infinie.

Il y a plusieurs especes de billets dont les marchands, banquiers, & négocians se servent dans le commerce, lesquels operent divers effets.

Les uns sont causés pour valeur reçûe en lettres-de-change ; les autres portent promesses d’en fournir, d’autres sont conçûs pour argent prêté, & d’autres pour marchandises vendues : mais de ces diverses sortes de billets, il n’y en a que deux qui soient reputés billets de change, les autres n’étant regardés que comme de simples promesses, qui cependant peuvent être négociées, ainsi que les billets de change, pourvû qu’ils soient payables à ordre ou au porteur.

La premiere espece de billets de change, sont ceux qui sont causés pour valeur reçûe en lettres-de-change, c’est-à-dire lorsqu’un marchand ou banquier fournit à un autre négociant des lettres-de-change pour les lieux dans lesquels il a besoin d’argent ; & que pour la valeur de ces lettres, il donne son billet de payer pareille somme au tireur.

Cette premiere sorte de billet doit faire mention de celui sur qui les lettres ont été tirées, & de celui qui en aura payé la valeur, & si le payement a été fait en deniers ou marchandises ou autres effets, à peine de nullité ; c’est-à-dire que faute d’être conçûs en ces termes, ils ne sont plus regardés comme billets de change, mais seulement comme simples billets pour argent prêté, qui n’ont pas les mêmes priviléges, art. 27. & 28. de l’Ordon. de 1673.

La deuxieme espece de billets de change, sont ceux qui portent pour laquelle somme je promets fournir lettre-de-change sur une telle ville. Ils sont très-utiles dans le commerce, & doivent aussi faire mention du lieu où les lettres de-change doivent être tirées, si la valeur en a été reçûe, & de quelles personnes, à peine de nullité. Ceux au profit desquels sont faits ces billets de change, ou au profit desquels les ordres sont passés, peuvent contraindre les débiteurs à leur fournir les lettres-de-change, & au refus leur faire rendre l’argent qu’ils ont reçû, & leur faire payer ce qu’il leur en coûteroit pour avoir leur argent par lettres-de-change dans les lieux designés par leur billet.

Les billets que l’on nommoit autrefois billets en blanc, c’est-à-dire où l’on laissoit en blanc le nom de celui à qui ils devoient être payés pour être remplis toutes fois & quantes, & sous quel nom il plairoit à celui au profit duquel ils étoient faits, & dont la cause portoit simplement valeur reçûe sans exprimer la valeur, non-seulement ne sont plus en usage, mais sont absolument défendus ; car comme après avoir passé en plusieurs mains il n’étoit pas possible d’en découvrir l’origine, il étoit aisé de s’en servir pour un commerce usuraire.

On a tâché d’introduire dans le commerce d’autres billets, qui ne sont pas moins dangereux que les précédens pour couvrir l’usure ; ce sont les billets payables au porteur, sans faire mention ni de qui on a reçû la valeur, ni quelle sorte de valeur a été reçûe.

Les plus sûrs de tous les billets dans le commerce, sont ceux qui sont faits à une personne précise ou à son ordre, pourvû qu’ils portent ces mots essentiels, valeur reçûe d’un tel, & que la valeur y soit exprimée. En voici un modele conforme à l’ordonnance de 1673.

Je payerai au 20 du mois prochain au sieur Pierre Doré, marchand de cette ville, ou à son ordre, la somme de douze cents livres, valeur reçûe de lui en deniers comptans. Fait, &c.

Endosser un billet, c’est le souscrire ou se charger du payement. Un billet négocié, est celui qui a passé en main tierce au moyen de l’ordre qui a été mis au dos : tout billet payable au porteur, est aussi censé billet négocié. Faire courir un billet, c’est le négocier ou chercher à emprunter de l’argent par le moyen des agens de change ou autres personnes.

Sur les billets en général & la police actuelle du royaume à cet égard, voyez le Dictionnaire du commerce, tom. I. pag. 997 & suiv.

Les marchands Persans font leurs billets & promesses, en mettant leur sceau au bas & leur nom en haut. Les témoins attestent le sceau du contractant en y joignant le leur. Il n’y a qu’entre marchands que ces sortes de billets soient valables, quoique non faits en justice.

Billets de l’Epargne, sont d’anciens billets, mandemens ou rescriptions, dont le payement avoit été autrefois assigné sur l’épargne du roi ; mais qui ayant été supprimés au commencement du ministere de M. Colbert, sont devenus depuis surannés & de nulle valeur dans le commerce.

Billets, sont encore des especes de passe-ports que l’on prend aux portes & barrieres des villes où il y a barrage, lorsqu’on veut faire passer de bout des vins & des bestiaux à travers de ces villes. Voyez Passe-de-bout.

Billets Lombards, ce sont des billets d’une figure & d’un usage extraordinaire, dont on se sert en

        1. Italie & en Flandre, & qui depuis l’année 1716 se

sont aussi établis en France. Les billets lombards d’Italie, qui sont de parchemin coupé en angle aigu de la largeur d’un pouce ou environ par le haut, & finissant en pointe par le bas servent principalement lorsque des particuliers veulent prendre intérêt à l’armement d’un vaisseau chargé pour quelque voyage de long cours ; ce qui se pratique ainsi. Celui qui veut s’intéresser à la cargaison du navire, porte son argent à la caisse du marchand armateur, qui enregistre sur son livre de caisse, le nom du prêteur & la somme qu’il prête ; ensuite il écrit sur un morceau de parchemin, de la largeur de douze ou quinze lignes, & de sept ou huit pouces de longueur, le nom & la somme qu’il a enregistrée ; & coupant ce parchemin d’un angle à l’autre en ligne diagonale, il en garde une moitié pour son bureau, & délivre l’autre au prêteur pour le rapporter à la caisse au retour du vaisseau, & le confronter avec celui qui y est resté, avant que d’entrer en aucun payement, soit du prêt soit des profits. Ceux qui prêtent sur gages en Flandre font à peu près la même chose. Ils écrivent sur un pareil morceau de parchemin le nom de l’emprunteur & la somme qu’il a reçûe ; & l’ayant coupé en deux, ils en donnent la moitié à l’emprunteur, & cousent l’autre moitié sur les gages, afin de les lui remettre en rendant la somme stipulée.

Billets de la caisse des emprunts. Voyez Caisse des emprunts.

Billets de la banque royale. Il y a peu de différence pour l’usage entre le billets lombards d’Italie & les billets de la banque royale de France : mais il y en a quelqu’une pour la forme, ces derniers n’étant que de papier, & se coupant du haut en bas en deux parties égales ; ensorte néanmoins que la coupure reste dentelée : précaution sûre contre la friponnerie de ceux qui voudroient les contrefaire. D’ailleurs les moitiés de ces billets, qui demeurent aux bureaux de la banque sont reliées en des registres ; & au bas de chaque partie du billet qui se délivre au porteur, est l’empreinte d’une espece de sceau.

Billets de monnoie. Billets occasionnes par la refonte générale des monnoies ordonnée par Louis XIV. en Juin 1700, & qui n’ayant pû se faire assez promptement pour payer toutes les vieilles especes qu’on portoit aux hôtels des monnoies, les directeurs ou changeurs en donnerent leurs billets particuliers qui devinrent dettes de l’état ; & en 1703, il fut ordonné qu’ils porteroient intérêt à huit pour cent : mais ces papiers s’étant trop multipliés par le trafic usuraire qu’en firent les agioteurs, ils furent supprimés ou convertis en rentes sur la ville, ou tirés du commerce par d’autres voies.

Billets de l’état, sont des billets qui ont commencé presqu’en même tems que le regne de Louis XV. pour acquitter les dettes immenses contractées sous le regne précédent. Ces dettes qui montoient à plusieurs centaines de millions ayant été payées en partie par divers moyens, le roi les réduisit à un capital de 250 millions, qu’il se chargea de payer, & en fit, pour ainsi dire, ses billets aux intéressés. Ces nouveaux billets furent appellés billets de l’état ; par ce que le roi en fit sa dette, & qu’il promit de les payer sur les revenus de l’état ; au lieu qu’auparavant ce n’étoient que des billets de particuliers, quoique faits pour des sommes fournies pour les besoins de l’état. La plûpart de ces billets ont été depuis retirés, soit en taxes sur les gens d’affaire, soit en actions de la compagnie d’occident, soit en rentes viageres sur l’hôtel de ville de Paris, soit enfin par des loteries qui s’y tiroient tous les mois. Dictionnaire du commerce, tom. I. pag. 952, &c.

Billets de l’échiquier. Voyez Echiquier. (G)

* Billet de santé, (Hist. mod. & Police) c’est une attestation de santé accordée dans les tems contagieux, par un conseil qu’on institue alors sous le nom de conseil de santé. Ce billet contient le lieu d’où le porteur est parti, son nom, sa qualité, sa demeure, la date de son départ, l’état de santé de la ville, du bourg ou village d’où il vient, & la permission de le recevoir où il se présentera avec ce billet ; au bas duquel il aura pris certificat de tous les lieux où il aura dîné, soûpé & couché.